Personne cachée jusqu'à la libération

Dernière mise à jour le 14 mars 2015.

Harold Edward BENTZ / O-733590.
13205 Terminal Avenue, Cleveland, Ohio, USA.
Né le 22 février 1921 en Ohio / † le 10 août 2007 à Etowah, Caroline du Nord, USA
2nd Lt, USAAF 305 Bomber Group 422 Bomber Squadron, copilote.
lieu d'atterrissage : en Bretagne près de Lorient.
Boeing B-17F-BO Flying Fortress, 42-29531, JJ-Z, abattu le 29 mai 1943 par la chasse allemande lors d'une mission sur la base sous-marine de Saint-Nazaire.
Appareil écrasé derrière la Cime de Kerchouan, au lieu-dit La Lande Allinto à La Harmoye (2 km au sud-ouest de Saint-Bihy), Cotes d'Armor, France.

Evadé en Suisse.

Informations complémentaires :

Il n'y a pas de Rapport de perte d'équipage (MACR). Rapport d'évasion du Lt Bentz : E&E 1716, disponible en ligne.

L'appareil décolle de Chelveston vers 13h30 heure locale. Touché par la Flak au-dessus de l’objectif, il est sévèrement touché, le moteur n°4 est en feu et ne peut être mis en drapeau. Il doit quitter la formation et le pilote, Lt Marshall R. Peterson, donne l'ordre d'évacuer. Il sera fait prisonnier, tout comme son copilote 2nd Lt Lawrence F. Madelberg; l'opérateur radio S/Sgt John J. Freeborn; le mitrailleur dorsal T/Sgt Hilton G. Hilliard; le mitrailleur gauche T/Sgt George P. Smith.

Le mitrailleur droit, le S/Sgt Percy C. Matthews, perdra la vie et son corps ne sera jamais retrouvé.

Trois hommes seront évacués par la ligne Bourgogne/Burgundy : le bombardier 2nd Lt Frank R. Perrica (E&E 64), le mitrailleur arrière S/Sgt Salvadore S. Tafoya (E&E 72) et le mitrailleur ventral S/Sgt Peter P. Milasius (E&E 73).

Harold Bentz, dont c’est la 9ème mission, saute à environ 5200 m à environ 100 km au Nord de Saint-Nazaire. Il perd son kit d’évasion et sa pochette de monnaies de pays occupés en quittant l’avion. On l’avait pris en photo avant la mission, mais il n’avait pas reçu ces clichés destinés à l’aider en cas d’évasion. Il atterrit dans un pré et, ignoré par des gens qui s’y trouvaient, il court vers le Sud et va se cacher dans un fossé. Bientôt, trois soldats allemands passent à proximité de sa cachette, heureusement sans le voir.

Il décide de marcher toute la nuit avant de s’endormir dans un champ. Au matin du 30 mai, lorsqu’il se réveille, il est entouré de plusieurs Français, l’un d’entre eux un fermier qui avait vécu à Kansas City aux USA. On lui donne des vêtements civils et de l’argent et il marche jusqu’à Mûr-de-Bretagne, au Nord de Pontivy, où un gendarme l’interpelle. Le gendarme le mène alors chez une comtesse parlant l’anglais (Simone de BOISBOISSEL veuve de KERENFLECH) et qui lui achètera un billet de chemin de fer jusqu’à Paris, lui disant de prendre contact là avec sa sœur (Tiphaine de BOISBOISSEL veuve Robert LUCAS McDONALD) qui travaillait pour la Croix Rouge dans un bureau près de la Gare du Nord. Au bout de quatre jours, sa fille Suzanne LEGRAND, qui vit avec sa mère au 4 Avenue de Nancy à Saint-Cloud (Seine-et-Oise), les reconduit chez AŸLÉ.

Dans son rapport, Bentz déclare qu’à partir de ce moment, il a été pris en charge par trois organisations différentes, ne pouvant en identifier aucune. Une quatrième organisation, avec laquelle il vit quelque temps, est constituée de jeunes réfractaires au travail obligatoire en Allemagne et vivant dans les collines.

Des archives nous apprennent que Catherine de BRUNEL de SERBONNES, épouse JANOT, entre (en mai 43) en contact avec l'Oberscharführer Paul Fuchs de la KdS (Kommandantur der Sicherheitspolizei) de Paris, collègue de Hermann Genzel qui chapaute l'agent provocateur Jacques Désoubrie. Robert Aylé est averti par la famille TINEL qu'il allait être arrêté, à cause d'un jeune Belge qui guidait de Bruxelles à Paris. Ce Belge était depuis longtemps dans le réseau et en avait rencontré les principaux chefs récemment (début mai). Robert Aylé ne peut croire l’information et pense qu'il doit s’agir d'un autre réseau.

Mme PEYRAT lui téléphone encore quelques heures avant les arrestations du 07 juin 43, mais ne parvient pas à le toucher. Catherine JANOT va chez les AŸLÉ à la Rue de Babylone mais ne les y trouve pas. Elle prévient tous les logeurs connus de AŸLÉ (TINEL, BOHN, AUQUIER et MERLEAU-PONTY, SAINTE-BEUVE et RAOUL-DUVAL) et fait déplacer l'aviateur américain qui était chez Georges MERLEAU-PONTY et son épouse France FIEVET depuis une semaine (il s'agit de Harold Bentz) au 28 Rue d'Auteuil à Paris XVIe. Ce ménage a été recruté par Pierre GRAPIN, présenté à Robert AŸLÉ et Frédéric DE JONGH par le Père Michel RIQUET. Ce n'est qu'après la guerre que l'on apprendra que Maurice GRAPIN (le fils de ce Pierre GRAPIN ?) alias "Henri Crampon", était en fait un agent de Hans Kieffer, chef adjoint du SD (Sicherheitsdienst) parisien.

Harold Bentz est ainsi guidé par Pierre GRAPIN chez Simone KELLER au 1 Rue Abel Perry, Paris XVIe. Il mentionne dans son rapport que les seuls noms dont il se rappelle sont ceux de trois jeunes femmes nommées KELLER : Alice, Simone et Marthe, chez qui il a logé pendant 1 mois, en face des usines Renault. C'est au 1 Rue Abel Ferry, Paris XVIe. Son évacuation est finalement assurée par Olivier RICHET, de Défense de la France.

Bentz précise seulement qu’il a été guidé par la suite vers la frontière suisse par un pilote de chasse français nommé NESS. Il déclare être arrivé ainsi en Suisse le 6 juillet 1944 et avoir passé une nuit à la prison de Porrentruy avant d’être mené à Berne où il reste six jours. Soumis là à des interrogatoires, il est finalement confié à la Légation des Etats-Unis. Après une quarantaine de 21 jours à Berne, il est envoyé au camp de la RAF à Vevey, sur le Lac Leman.

En septembre 1943, on l’envoie travailler au Consulat américain à Berne et à la Noël, il est dirigé vers le camp américain à Klosters (=Klosters-Serneus, près de Davos ?), où il passe l’hiver. Au mois de mai 1944, il est placé au "camp des évadés" à Glion, au bord du Lac Léman [vraisemblablement logé à l’«Hôtel des Alpes», cité par le Lt Noble K. Gregory dans son rapport E&E 2180). Il y reste jusqu’au 23 août, date à laquelle il accompagne le Lt Larsen et le F/O Lee dans leur marche vers la France. [Il s’agit du Lt Robert D. Larsen, copilote du B-17 42-30000 du 92ème BG abattu le 6 septembre 1943 – E&E 1650 et du Lt Otis S. Lee, pilote du B-17 42-30474 du 99ème BG, abattu en Italie le 6 octobre 1943 – pas d’E&E…]

Les trois hommes arrivent finalement à Saint Gingolph (le Lt Larsen précise que c’est à vélo qu’ils ont rejoint cette localité), en face de Vevey, de l’autre côté du lac, où ils soudoient les douaniers pour passer la frontière. Les trois évadés sont alors pris en charge par des maquisards français qui les dirigent vers Thonon-les-Bains, d’où on les mènera à Annecy où ils attendront une semaine un avion censé les amener à Hauteville (Hauteville-Lompnes, dans le Département de l’Ain, à une cinquantaine de km à l’Ouest d’Annecy). Le Lt Larsen mentionne les noms de trois des maquisards qui les ont aidé : le Lt DISCHERT, d’Annemasse, ERLING, de Saint-Gingolph et le Lt MORGOULIS de Tournon.

L’avion n’arrive pas et ils décident de tenter leur chance tout seuls. Ils marchent en direction des troupes américaines et entrent en contact le 2 septembre avec le QG de la 45ème Division d’Infanterie Américaine. Ils sont alors envoyés à Aix-les-Bains, où Larsen signale avoir été séparé de Bentz et Lee. Ensemble ou pas, ils quittent tous trois Aix par avion à destination de Naples, d’où ils partent par avion le 6 septembre pour atteindre Caserta où des ordres arrivent, signalant leur retour en avion le 7 septembre à destination de Casablanca. De là un autre appareil les ramène en Angleterre où ils arrivent le 8 septembre. Ils sont interrogés le même jour puis encore le lendemain par les services de renseignement.

Harold Bentz repose au Cimetière National d'Arlington, Virginie, USA.

Merci à feu Alton Brown, Floride, pour la photo en noir et blanc en médaillon. Nos remerciements également à Daniel Carville (http://francecrashes39-45.net/index.php) pour ses renseignements à propos du lieu du crash. La photo en couleurs nous a été transmise par la famille Bentz (via sa fille Chris Deitz, que nous remercions), de même que l’article publié dans un journal de Cleveland, Ohio peu après le retour d’Harold Bentz aux Etats-Unis. L’article relate brièvement son long périple depuis la Hollande jusqu’en Suisse. La photo qui l’accompagne montre son épouse Ethel et leur fils de 13 mois, Harold Bentz Junior, que l’aviateur voyait pour la première fois.


Article publié dans un journal de Cleveland, Ohio, octobre 1944.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters