Aviateurs de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 28 mai 2022.

Chester Benedict HINCEWICZ ("Chet") / 13116005
817 Cynon Street, Scranton, Pennsylvanie, USA
Né le 7 juillet l921, près de Buffalo, Etat de New York / † le 9 octobre 2016 à Naples, Floride.
T/Sgt, USAAF 445 Bomber Group 702 Bomber Squadron, mécanicien/mitrailleur dorsal.
Lieu d'atterrissage : près de Hingeon, Belgique.
Boeing B-24H-1-FO Liberator - 42-7601 - WV- ? / "Sin Ship", abattu le 12 avril 1944 lors d'une mission sur Zwickau.
L'avion a explosé en l'air ; débris écrasés dans un champ entre Hingeon et Vezin, au Nord-Ouest d'Andenne, Province de Namur.
Durée : 4 mois
Caché dans la région de Namur.

Informations complémentaires :

Le Missing Air Crew Report relatif à la perte de cet appareil : MACR 3828. Rapport d'évasion E&E 1911.

En route vers l'objectif, juste avant la frontière allemande, la couverture nuageuse devient trop importante et l'ordre est donné à la formation de faire demi-tour et de rejoindre la base. D'abord touché par un obus de la Flak, l'appareil du Lt Joseph Pavelka est ensuite attaqué par trois Fw 190 qui endommagent sérieusement l'appareil. Le moteur n° 3 est hors d'usage, les contrôles d'aileron également, le feu se déclare dans la soute à bombes et dans le poste de commandement. L'appareil perd de la hauteur et quitte ainsi la protection de la formation.

Hincewicz, blessé à la tête par l'explosion d'un obus de 20 mm dans sa tourelle, perd temporairement connaissance, se réveille pour constater la propagation des incendies, éteint celui qui s'était déclaré dans le système hydraulique, puis celui dans l'un des moteurs, mais constate que le feu se propage dans le compartiment radio et, plus grave, près d'une aile où est stocké du carburant 100 octane. Il avertit le pilote de la situation et l'ordre de sauter est donné au reste de l'équipage.

Ayant vu l'importance des dégâts, certains hommes avaient déjà sauté en parachute : le navigateur 2nd Lt Philip Solomon, le radio Richard F. Hanson, le mitrailleur dorsal Robert T. Hansen, le mitrailleur gauche Wade R. Luce, le mitrailleur droit Michael R. Ciano et le mitrailleur de queue, Peter M. Clark.

Peu après, Hincewicz quitte également l'appareil, imité en cela par le bombardier William T. Burtt, le copilote Albert P. Gilsdorf Jr et le pilote Pavelka. Ce dernier retrouve rapidement son navigateur, Philip Solomon, atterri comme lui près de Hingeon, et tous deux sont pris en charge par la Résistance avant que les Allemands puissent les capturer. Pavelka et Solomon seront évacués ultérieurement vers la Suisse (rapports d'évasion, respectivement E&E 2216 et E&E 2326.)

Quant aux autres, Gilsdorf, Burtt, Hanson (initialement évadé, arrêté à Huy), Hansen, Luce et Ciano, blessé à la jambe, ils seront faits prisonniers, tandis que Peter Clark parviendra lui aussi à s'évader (caché en France et en Belgique jusqu'à la Libération - E&E 1674).




Documents allemands (rapport KU-1507) concernant la capture de Gilsdorf, Hanson, Hansen, Luce et Ciano,
les 5 autres, dont Hincewicz, étant "flüchtig" (en fuite) – Archives NARA

Chester Hincewicz saute à 6.000 m et attend d'être assez près du sol avant d'ouvrir son parachute. Dès son atterrissage, il aperçoit deux femmes et se décide à leur demander où il se trouve. Les femmes se précipitent pour l'aider et l'une d'entre elles montre un saut d'un puits proche pour laver le sang de son visage. L'autre femme va chercher des vêtements civils à la ferme et l'aviateur les échange contre sa Mae West. Elles lui font comprendre qu'il était dangereux de rester et qu'il ferait mieux d'aller se cacher. Hincewicz se dit qu'une chapelle isolée serait l'idéal et il en trouve une aux abords d'un champ.

Peu après, il entend des voix d'enfants. Ce sont quatre gamins qui lui font signe de les suivre, l'un d'entre eux lui passant un vélo. Par la suite, il est finalement pris en charge par "Jean", membre de la Résistance, qui s'occupe de le faire soigner, lui donne des vêtements et une fausse carte d'identité. Comme il connaît bien la langue de ses ancêtres polonais, son identité devient "Pavel Hinewie", journaliste polonais.

Parlant également un peu le français, qu'il perfectionnera au cours de son évasion, Hincewicz décide de partir seul et, selon ce qu'il déclare en 1947 dans une lettre au radio Hanson, "il arrive à Bastogne", puis loge à Namur dans la maison d'une dame travaillant pour la Croix Rouge, à proximité d'une batterie de DCA allemande. Il y déclare avoir échappé à une quarantaine de soldats allemands lancés à sa poursuite dans les Ardennes, après avoir été apparemment dénoncé (voir ci-dessous).

Les trois dernières semaines de son évasion sont passées près de Bastogne et vers la fin, il est guidé vers une grande propriété, avec un manoir et des écuries, ayant servi un temps d'orphelinat. Un jour, des soldats allemands arrivent, à la poursuite d'évadés et, comme d'autres aviateurs Américains qui se trouvaient là avec lui, Hincewicz parvient à s'échapper et à rejoindre des maquisards dans les bois, d'autres évadés se faisant arrêter. Lui et ses compagnons sont libérés par l'avance des troupes américaines. Selon un texte de 2002 sur le site de Virgil Marco (mitrailleur arrière du B-17 42-31816 du 305th Bomb Group abattu le 24 avril 1944 et également évadé), ceci se serait passé à Bastogne. Suite au décès de Marco, ce site n’existe plus.


William Ferrell, Gordon Grip et Chester Hincewicz à Maissin le 8 septembre 1944.


Debout de gauche à droite : Chester B. Hincewicz, Joseph Pavelka, Albert P. Gilsdorf Jr, Philip Solomon, William T. Burtt et Richard F. Hanson.
Accroupis de gauche à droite : Peter M. Clarke, Walter J. Turnbull (remplacé pour la mission par Michael R. Ciano), Robert T. Hansen et Ralph Oak (remplacé pour la mission par Wade R. Luce).


Faux papiers de Chester Hincewicz.


Chester Hincewicz chez des logeurs.

Dans l'Appendix "C" de son rapport d'évasion, Hincewicz ne mentionne les noms que de deux de ses helpers : François RUELENS, 2, Rue "du Maneche" à Gilly (Charleroi), où il reste 4 semaines (il s'agit en fait de la Rue Nanèche) et Melle Madeleine RECTEM (1923-2011), 70 rue Jules Desrée à Wangenies, chez qui il reste 1 semaine. Il ne précise pas les dates de ces séjours.

Le nom de Chester Hincewicz est repris dans la liste des hommes cachés dans les Ardennes (Marathon). Il rentre en Angleterre le 10 septembre 1944 et y est interrogé par l'I.S.9. Une photo (voir ci-dessous) prise près de Maissin/Paliseul le 8 septembre 1944, le montre avec le Sgt William R. FERRELL (B-17 42-97617 abattu le 13 avril 1944 - E&E 1884) et le 2nd Lt Gordon Grip, navigateur du 42-31466.

Rentré aux Etats-Unis, Chester Hincewicz travaille comme mécanicien d'aviation avant de se ré-engager dans l'Air Force en 1948, y terminant sa carrière en 1970 avec le grade de Major.

Chester Hincewicz repose au Arlington National Cemetery à Arlington, Virginia.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters