Personne cachée jusqu'à la libération

Dernière mise à jour le 15 octobre 2011.

Roger John BLAKE / O-809512
2105 South 51st Avenue, Cicero, Illinois
Né le 21 mars 1918 à Chicago, Illinois / † le 17 septembre 2003 à Phoenix, Arizona, USA
2nd Lt, USAAF 92 Bomber Group 325 Bomber Squadron, navigateur
à 15km au Nord-Ouest de Breda, Noord-Brabant, Pays-Bas.
Boeing B-17G-DL Flying Fortress - 42-38104 - NV-?, abattu par la Flak et un chasseur allemand lors de la mission du 23 mars 1944 sur Münster.
Ecrasé près de Spontin-Durnal, Province de Namur, Belgique
Durée : 5 mois ½.
A Bruxelles à la libération

Informations complémentaires :

Le rapport de perte d'équipage relatif à cet appareil : MACR 3417. Rapport d'évasion de Roger Blake : E&E 1601 disponible en ligne.

L'appareil décolle à 07h50 de Podington. Après le largage des bombes, il est touché par la Flak puis pris sous le feu de chasseurs allemands. La queue est fortement endommagée et peu après, alors qu'ils atteignent la frontière néerlando-allemande, le feu se déclare dans l'aile gauche. L'appareil continue sa route en direction de Rotterdam et de la Mer du Nord. Alors que l'équipage se rend compte qu'il ne pourra plus atteindre l'Angleterre, l'avion est dérouté vers le sud en direction d'Anvers via Roosendael.

Le pilote, Lt Douglas L. Mac Donald donne l'ordre d'évacuer et tous les membres de l'équipage seront sains et saufs.

Quatre hommes sautent au sud de Breda : le mitrailleur dorsal T/Sgt Charles M. Lowe atterrit près de Etten (Pays-Bas) et s'évade en Belgique via Breda, vraisemblablement grâce à Christ VAN DEN BUYS, mais est arrêté à Anvers.

Le mitrailleur gauche S/Sgt James N. Barrow, le bombardier 2nd Lt Abner E. Fleisher et le mitrailleur arrière S/Sgt William P. Bailey atterrissent entre Breda et Tilburg (Pays-Bas) et sont faits prisonniers.

Le restant de l'équipage saute peu après. Le pilote, Mac Donald atterrit dans les environs du camp de travail de Tereik (Belgique) et est immédiatement arrêté.

Le copilote 2nd Lt Thomas J. Corkin atterrit dans la région frontalière et est pris en charge par Jozef-Maarten VISSERS "De Witte" de Tereik. Le mitrailleur droit S/Sgt Ernest H. Jones atterrit aux Pays-Bas et est aidé par GOETSTOUWERS et VAN ERCK. Corkin et Jones sont conduits à Loenhout (Belgique) auprès de la famille JOCHEMS. Le mitrailleur ventral S/Sgt Robert T. Waddle atterrit à Brecht (Belgique) et est caché par C. DE CLERCK.

On ne sait pas exactement où ont atterri Roger Blake et l'opérateur radio T/Sgt Walter D. Jucha. Corkin, Jucha, Jones et Waddle arrivent finalement chez Corneel NOUWS à Gooreind (Belgique). Ils sont ensuite aidés par Adolf HEEREN de Brasschaat (Anvers) mais ils seront finalement arrêtés, certains d'entre eux à Brasschaat, d'autres à Anvers.

Roger Blake sera le seul à pouvoir réussir son évasion. Il saute à 6.000 m, atterrit près de Breda et marche pendant deux jours et deux nuits avant d'approcher un fermier qui lui donne des vêtements civils. Ce fermier, aidé d'un policier, le fait traverser la frontière hollando-belge pour le confier à un troisième homme. Celui-ci remet 20 francs belges à l'aviateur et le met sur la route d'Anvers. Arrivé dans la ville, il déambule avant de prendre un tram dont il descend pour ensuite marcher vers Boom. Là, il aborde un homme manchot qui lui donne à manger avant de le mettre dans un tram. Comme il y a erreur de direction, Blake en descend et fait à pied le trajet inverse pour retrouver le manchot. Celui-ci le fait se cacher dans une étable où il tentera de dormir, transi et trempé.

Au matin, un autre homme arrive et répare ses chaussures avant que Blake ne se mette en route à pied vers Londerzeel-West (Brabant flamand/Vlaams Brabant). Là, dans un champ, il approche un jeune garçon, fils d'un tenancier de café, qui le guidera jusqu'à sa maison où il pourra manger et dormir. Par la suite, un "Johnnie WILLIAMS" apparaît qui, en compagnie d'une jeune fille, emmène Blake à la maison de sa mère au 57 Geerdegemvaart à Malines/Mechelen où Blake loge pendant deux mois. La mère de Johnnie avait été mariée à un soldat anglais ayant combattu durant la guerre précédente; ses sœurs, qui tenaient une confiserie en ville, s'occupaient d'assurer l'alimentation de l'évadé. Durant le séjour de Blake à cette adresse, y furent également hébergés deux prisonniers de guerre Russes évadés ainsi qu'un belge réfractaire.

Le rapport de Blake mentionne que le 8 ou 9 mai, le mari de la fille d'un précédent mariage de Mme WILLIAMS, ingénieur dans une centrale télégraphique à Bruxelles, guide Blake vers Bruxelles pour le confier à un homme (Jacques DELHAYE ?) qui, lui, le mène chez Albert STEIN, 30-40 ans, tenancier de la Brasserie ALBERT au 1 Rue de la Conciliation à Anderlecht, au coin avec le 17 Rue de la Justice. Blake a été logé là pendant deux mois, avant d'être guidé vers la maison d'un citoyen suisse marié à une belge et vivant avec elle à la Rue Vondel à Schaerbeek.

C'est probablement chez ce couple qu'il vit l'épisode qu'il relate dans le livre de l'AFEES (Air Forces Escape and Evasion Society, Turner Publishing Cy, 1992): Evadé depuis environ six semaines et en mauvaise condition physique, il se trouve dans le Nord de Bruxelles près d'une grande gare de triage [la Rue Vondel se trouve effectivement près de la Gare du Nord) où il est caché dans une maison en compagnie d'un marchand de moyens contraceptifs et de sa jolie épouse. Avant de quitter pour un temps la maison, le couple lui dit de ne pas faire de bruit et de ne pas aller ouvrir si quelqu'un frappe à la porte. Une nuit vers la mi-mai, Blake, seul dans le logement, entend le parquet craquer à l'extérieur de sa cachette et voit la poignée de porte actionnée à plusieurs reprises, sans succès. Le manège dure plus d'une heure jusqu'à ce qu'il entende des pas s'éloigner puis la porte de rue claquer. Il rassemble ses maigres effets (un rasoir et des lames, quelques barres de chocolat, une carte…) et s'enfuit par une porte arrière. Il se poste à l'arrêt de tram près d'un parc voisin, où il attend le retour de l'épouse de son hébergeur. Il lui raconte sa mésaventure et elle lui dit de rester dans le parc en attendant qu'elle vérifie la situation. Elle apprend que c'était effectivement la Gestapo qui le recherchait et on dit alors à Blake de retourner chez le cafetier Albert STEIN et arrivé là, le réseau est à nouveau contacté.

Jacques DELHAYE amène alors Blake chez Louise KNOPS, épouse Miguel NAVARRO, au 199 Rue de Flandre, Bruxelles-Ville (résistante aux Insoumis) et l'aviateur loge chez elle pendant deux semaines. Il y a probablement rencontré Glenn Brenneke. Vraisemblablement suite à une dénonciation de la présence de Blake dans l'immeuble par l'occupant du rez-de-chaussée des NAVARRO-KNOPS (mais il y a d'autres raisons, dont des filatures à Paris quand Louise KNOPS travaillait pour Aline DUMONT et sa mère), la Gestapo fait une descente sur place au matin du 30 juin. Blake déclare avoir échappé "de justesse" à une arrestation, ce qui ne sera pas le cas de Louise KNOPS. Embarquée à bord d'un train en partance pour l'Allemagne le 3 septembre 1944 (le "Train Fantôme"), elle pourra éviter la déportation grâce à l'action de cheminots résistants.

Retourné à nouveau chez Albert STEIN à Anderlecht, il y séjourne pendant une quinzaine, après quoi on le transfère à la maison d'un Lt GODEFROID, aviateur durant le dernier conflit, et sa femme GABRIELLE, au 93 Avenue de l'Opale à Schaerbeek où il rencontre le Lt David O'Boyle. Le rapport d'évasion de Blake indique que ce dernier avait été aidé par M. STOCKER, un cousin de GODEFROID, et habitant au 93 Rue "Emile Marx" (?) ainsi que par la famille DE WALS, pâtissiers au 170 Chaussée de Mons à Anderlecht.

Le rapport de Blake renseigne que, pendant qu'il se trouvait à Bruxelles, l'homme en charge de ses déplacements d'une cachette à l'autre était "Joe PARKS", directeur de parc, du 102 Avenue Edouard Speeckaert à Woluwe-Saint-Lambert, dont le chef était "Madame ANNE" (= Anne BRUSSELMANS). Blake déclare avoir ouï-dire que l'organisation avait été mise en danger par un mitrailleur Américain qui, pendant son hébergement par le réseau, avait apparemment rencontré une Allemande dont il serait tombé amoureux et sous l'influence de laquelle il aurait dévoilé les noms et adresses de personnes aidant des évadés Américains. Une des personnes arrêtées suite à cela est citée dans le rapport comme étant Mme KNOPS (= Louise KNOPS). Il conclut en indiquant que lorsque l'appartement de Mme KNOPS fut envahi par les hommes de la Gestapo, le chef de ces derniers fut abattu par un Américain blessé qui se trouvait hébergé là. Blake dit ignorer ce qu'il est advenu de cet Américain par la suite. [Ces évènements se sont déroulés à l'aube du 30 juin 1944.] Une autre raison est que Blake et O'Boyle étaient cachés dans un groupe pénétré par le VMann René Van Muylem, et il est difficile de discerner les rumeurs de ce qui s'est réellement passé.

Roger Blake et David O'Boyle sortent de leur cachette le 4 septembre 1944 lors de la Libération de la ville pour aller à la rencontre de soldats des Irish Guards. On les fait se regrouper avec de nombreux autres évadés à l'Hôtel Métropole et de là, Blake déclare s'être rendu directement à l'aéroport pour rencontrer un Air Commodore. Ce dernier l'emmène alors sans tarder le 6 septembre par avion à Northolt en Angleterre d'où Blake rejoindra Londres pour y être interrogé le lendemain par l'I.S.9.

Roger Blake, qui a également servi (au sol) en Corée dans l'US Air Force, a terminé sa carrière militaire comme Lt Colonel. Il repose au Fort Rosecrans National Cemetery à San Diego, Californie.


Fausse carte d'identité belge préparée pour Blake (photo d'Yvonne DALEY, fille d'Anne BRUSSELMANS).


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters