Personne capturée durant son évasion

Dernière mise à jour le 2 juillet 2023.

Chester Al LISIEWSKI / 36219876
4861 South 18th Street, Milwaukee, Wisconsin, USA
Né le 21 novembre 1919, Milwaukee, Wisconsin, USA / † le 11 avril 1999 North Las Vegas, Nevada, USA
S/Sgt, USAAF 385 Bomber Group 550 Bomber Squadron, mitrailleur dorsal et mécanicien
Atterri du côté de Echt-Susteren, Provincie Limburg, Pays-Bas.
Lockheed/Vega B-17F-35-VE Forteresse Volante, N° série : 42-5913, Immatriculation/Nom : HR-Q / "Shack Bunny", abattu par la Flak le 20 octobre 1943 lors d'une mission sur Düren.
Ecrasé à Slek, au Sud de Maasbracht, à l'arrière de maisons sises Slekkerstraat 29-33, à l'Ouest de la Roterweg, (Pays-Bas).
Durée : 3 mois.
Arrêté à Paris le 20 janvier 1944.

Informations complémentaires :

Le rapport de perte d'équipage relatif à cet appareil : MACR 828.

L'avion est du 551st Bomber Squadron, mais son équipage ce jour-là était du 550 BS. Aucune mission n'était prévue pour l'équipage, normalement en repos, mais vu les fortes pertes de la semaine précédente lors du raid sur Schweinfurt, on le désigna d'office pour cette mission et le Lt Fryer dut se contenter d'un appareil d'un autre Squadron, d'autres du 550e n'étant plus disponibles. Se rendant compte que le "Shack Bunny" n'était pas en très bon état mécanique, le Lt Fryer demanda à ses hommes s'ils voulaient avorter la mission ou continuer. Tous décidèrent d'y aller.

Un moteur en régime trop faible retarde le B-17 qui peine en arrière du groupe et ne parvient pas à coller à la formation. Au-dessus de la France, un autre moteur est atteint par des obus de la Flak et il prend feu.

Un quart d'heure avant l'heure prévue pour le largage des bombes, l'appareil est aperçu faisant demi-tour à hauteur de Dinant/Beauraing (Château d'Ardenne à Houyet, que le MACR situe erronément en France). L'avion poursuit son vol mais bientôt l'ordre de l'évacuer doit être donné. L'équipage saute près de la frontière belgo-hollandaise et l'avion s'écrase à l'Est de Maaseik.


L'équipage du Lt Fryer : en bas de gauche à droite : Lyle Fryer, Cliff McIlveen, John Durakow et Dale Rinkenberger. Debout (pas forcément dans l'ordre) : Fred Browning, Chester Lisiewski (2e depuis la gauche), William Cokins (3e depuis la gauche), Joseph Pittman, George Good et David Carr [Photo via Jim Rinkenberger, fils du bombardier].

Tout l'équipage est sauf et sera fait prisonnier : 1st Lt Lyle Vermont Fryer, pilote ; 2nd Lt Clifford G. Mc.Ilveen, copilote ; 1st Lt John S. Durakov, navigateur ; 2nd Lt Edwin Dale Rinkenberger, bombardier ; T/Sgt William G. Cokins, radio ; S/Sgt George Arnold Good, mitrailleur ventral ; T/Sgt Fred Browning, mitrailleur gauche ; T/Sgt Joseph Franklin Pittman, mitrailleur droit et S/Sgt David Edwin Carr, mitrailleur arrière.


Lettre de Chester Lisiewski, datée de juillet 1946 et dans laquelle il déclare n’avoir noté que le nom de la famille VERBRUGGEN à Roermond,
chez qui il avait été hébergé pendant 6 semaines
(extrait du dossier de Frans VERBRUGGEN – Dutch Helpers files – NARA – USA)

Dans sa lettre reproduite ci-dessus, Lisiewski indique qu’à peine atterri, il s’encourt vers un bois où un Hollandais à vélo l’assiste et va chercher un autre homme. Il est conduit vers 14h30 à une ferme voisine où on lui donne à manger et des vêtements civils. Vers 20h00, un autre homme encore vient lui apporter de faux papiers d’identité, ensuite de quoi il est mené à vélo à Roermond où il est hébergé pendant 6 semaines par la famille VERBRUGGEN. Il ajoute que de Roermond on l’a alors mené vers une autre petite ville, puis, à Neerpelt en Belgique et enfin Bruxelles. Après plusieurs jours passés à Bruxelles, "we" ("nous") - il ne précise pas de quel autre aviateur il s’agit - ils sont guidés plus près de la frontière française. Après quelques jours restés là, ils sont menés en train à Lille, France. Les deux hommes quittent Lille en train tôt le matin du 20 janvier 1944, escortés par deux dames aux cheveux noirs et arrivent à Paris vers 13h00. [Ceci exclut que le compagnon de Lisiewski puisse être John Mattey, avec lequel il se trouvait en Hollande et en Belgique pour un temps, car Mattey a été arrêté le 8 janvier dans le train de Lille à Paris…] Les deux dames "les" guident (un "Englishman" et lui) vers une maison où ils sont confiés à deux guides masculins qui leur disent de les suivre. Alors qu’ils marchent vers cet endroit à 4 blocs de distance, ils sont subitement confrontés à une horde de la Gestapo qui commence à tirer avec des mitraillettes et des pistolets. Lisiewski peut apercevoir leurs guides, qui marchaient à une centaine de mètres devant eux, poursuivre leur route sans être inquiétés. Il termine en disant qu’ils sont menottés et conduits à la prison de Fresnes où ils restent 60 jours (avant d’être envoyés en Stalags).

Des recherches dans les dossiers de divers Helpers néerlandais nous ont permis de reconstituer au mieux le parcours de Lisiewski aux Pays-Bas. Les informations ne concordent pas toujours et beaucoup de détails manquent. Voici ce que nous pouvons en déduire : Hans POLAK, douanier, 127 Gevaren à Posterholt (situé à une quinzaine de km à l’est de Echt, Lisiewski ayant vraisemblablement atterri entre les deux) indique qu’il a ramassé Lisiewski à Echt le 20 octobre et l’a conduit à vélo chez JOOSTEN à Horn. Il s’agit d’Emmanuel JOOSTEN, du B 96 Kerkpad à Horn, à 20 km au NE de Echt. JOOSTEN rapporte qu’il a hébergé Lisiewski du 20 au 22 octobre avant de le confier à Frans VERBRUGGEN du 27 Minderbroederssingel à Roermond. VERBRUGGEN est le chef local du groupe d’aide aux aviateurs. Lisiewski figure dans la liste de ce dernier, reprenant 57 noms identifiés sur les 80 aviateurs aidés par son groupe. Un autre membre du groupe, Remko ROOSJEN, du 4B Bisschop Boermansstraat à Roermond, adjoint direct de VERBRUGGEN et chargé du transport d’aviateurs, cite Lisiewski dans sa propre liste mais ne donne pas de détails, indiquant seulement dans son rapport qu’il avait procuré de la nourriture, de l’habillement et, parfois, logé des aviateurs chez lui… avant de les conduire chez d’autres Helpers…

Dans son rapport, Frans VERBRUGGEN confirme un séjour de 40 jours de Lisiewski chez ses parents à l’adresse précitée. Par ailleurs, dans son propre rapport, Johannes HUYSMANS, 84 Kapellerlaan à Roermond, reprend la date du "9 novembre 1943" (!) et déclare avoir reçu Lisiewski de VERBRUGGEN et l’avoir hébergé chez lui pendant 10 jours avant de le rendre à VERBRUGGEN (?)… Compte tenu de ce qui figure dans le rapport de Frans van RIEL, sergent dans la Maréchaussée, habitant à Valkenswaard mais travaillant dans le secteur de Maarheze, Lisiewski a dû être guidé jusqu’à Weert, à une vingtaine de km au NE de Horn.

C’est en effet à Weert que van RIEL déclare avoir reçu Lisiewski de "H. de KORT, Koen MOLENAAR ou trouvé dans les environs de Leendert" avant de le guider vers la Belgique. Ceci ne correspond pas tout à fait avec ce que rapporte Hendrik J. de KORT, 3 Sint Paulusstraat à Weert dont le rôle était d’aller chercher les aviateurs en train ou en voiture pour les amener à Weert. Il reprend "Lisieuwsky" dans son rapport et indique que Willem HOUWEN (7 Schoolstraat, Helden, Limburg), à la demande de Remko ROOSJEN, a conduit Lisiewski en voiture de Roermond à Weert pour le remettre à de KORT… Ce dernier ajoute qu’il l’avait reçu de "ter Brugge" et l’a hébergé 2 jours chez lui avant son départ vers la Belgique et la Witte Brigade... Nous avons pu trouver que "ter Brugge" est en fait Mme Veuve Jantje de GROOT-ter BRUGGEN ("Jantien") du 7 Princes Beatrixplantsoen (plus tard au 55 Waardstraat) à Meppel. Cette dernière travaillait comme agent principal de logement de l’organisation de Peter van den HURK à Meppel (utilisant aussi l’adresse du 7 Princes Beatrixplantsoen). Elle rapporte qu’elle a hébergé chez elle 48 aviateurs, chacun pour une durée moyenne de 14 jours. Ayant dû fuir son domicile pour échapper à l’arrestation lors d’une descente de la Gestapo chez elle le 18 décembre 1944 (2 aviateurs américains cachés chez elle y furent capturés), tous les documents ont été perdus. Une liste de noms d’aviateurs figure dans son rapport, établie au départ du dossier de Peter van den HURK, mais le nom de Lisiewski n’y figure pas, la liste en question étant forcément incomplète… de nombreux documents ayant été brûlés lors de l’arrestation de van Hurk ce même 18 décembre…

Lisiewski est ensuite mené à vélo chez le fermier Hendrikus Leonardus SEMLER et son épouse Catharina ("Triene", née HENDRICKX) au Vogelsberg à Maarheze, près de Soerendonk. Il y loge dans "De Rode Kar" (repris comme “The little red wagon” dans beaucoup de récits d’aviateurs passés par là). Il s’agit d’un wagon de chemin de fer reconverti en logement de deux pièces et parqué à l’arrière de la ferme voisine des frères SNELDERS, Joannes Antonius, Franciscus, Petrus et Jan.

Outre van RIEL, d’autres membres de la Maréchaussée (Police montée/gendarmerie) mentionnent Lisiewski dans leurs rapports. Trois d’entre eux déclarent qu’ils l’ont fait passer à vélo depuis Maarheze jusqu’à Hamont en Belgique : Laurent HEUKESHOVEN (2 Gestelseweg, Budel-Noord-Brabant) ; Jan LUIJDENDYK, habitant 19 Westersingel à Rotterdam ; Willem VERMAZEN (de Rotterdam, mais également basé à Maarheze). On cite également W. de LEYER, 24 Kleine Berg à Eindhoven, qui est mentionné comme ayant conduit Lisiewski jusqu’à la frontière belge. Le bref rapport de de LEYER, membre des "Vrijbuiters" de Maarheze (groupe de Résistance de jeunes locaux, dirigés par le couple SEMLER), ne reprend pas nommément Lisiewski ni aucun autre nom d’aviateur :


Les gendarmes indiquent que passée la frontière ils remettent les aviateurs à Louis VROLIX
(Budelpoort, Hamont) et Hubert PEETERS de la même localité.

Lisiewski est cité comme hébergé chez Frans WIJNEN et son épouse Catharina, née KWANTEN, à la Bosstraat à Hamont-Achel, du 30 novembre au 1er décembre en compagnie de John Mattey. Une bouteille de Bols est ouverte en leur honneur. Ils reçoivent ensuite un repas et sont conduits au grenier, où ils peuvent dormir dans une chambre aménagée. Frans WIJNEN leur explique le lendemain qu'il possède une petite usine qui produit des gaines de paillage pour les bouteilles de vin. Il fournissait d'ailleurs les Allemands et pouvait ainsi aider quelques résistants. Plus tard, ce même matin, un chef local de résistance et ses deux lieutenants viennent leur faire remplir les formulaires d'évasion (Form E) et les photographier. Après deux semaines, le chef résistant vient les prévenir qu'ils partiront dans deux jours.

Lisiewski (et Mattey) sont ensuite remis à Michel SPOOREN, Haspershoven à Overpelt. Selon notre ami Michael Leblanc (chercheur canadien) Lisiewski et Mattey se retrouvent ensuite à Anvers, où ils sont est pris en charge par le Groupe de Charles Willekens (du Beverbeek à Achel, près de Hamont). Selon le rapport de Charles WILLEKENS, Lisiewski a été guidé par lui jusqu’à Anvers le 1er décembre 1943 et Mattey deux jours plus tard.

Amenés par Gustave Damien BUSSCHOTS du 9 Zurenborgstraat à Antwerpen/Anvers, ils logent chez Virginie DE BRUYN au 37 Keizerstraat, Anvers, qui est en relation avec Élie MIROIR de Bruxelles. Cette dame rapporte un logement des deux aviateurs chez elle en fin 1943 avant de les confier à nouveau à BUSSCHOTS. Le nom de Lisiewski figure parmi les aviateurs guidés par Marcel DAELEMANS d'Anvers à Bruxelles où il est pris en charge par le Groupe EVA. A partir de leur départ vers Bruxelles, Lisiewski ne reverra plus Mattey. Étant donné l’arrestation de Mattey le 8 janvier, le voyage de Lisiewski et Mattey a donc dû se faire en fin décembre 1943/tout début de janvier 1944, BUSSCHOTS mentionnant 1943 pour leur transfert d’Anvers à Bruxelles… Aline DUMONT et les VAN TUYKOM [Jean et Jeanne (née OTTOY) VAN TUYKOM, 2 Rue Martin Lindekens à Woluwé-Saint-Pierre] s'en occupent, de même semble-t-il que Madeleine MEUNIER. A noter que le nom de Lisiewski ne figure pas dans la liste des 56 aviateurs repris au dossier de Jean VAN TUYKOM et son épouse Jeanne… On rapporte Lisiewski et Mattey hébergés par Yvonne MEUNIER-LACHAPELLE et sa fille Madeleine, 16½ ans, au 2 Avenue du Blankedelle à Auderghem (voir note en bas de page). Lisiewski est renseigné comme y étant resté 15 jours et il semble que ce soit après avoir été hébergé chez les HOYAUX dont question ci-dessous (?)

Lisiewski est signalé comme hébergé du 30 décembre au 6 janvier 44 chez Clotilde TARTE, épouse HOYAUX au 21 Boulevard Poincaré à Anderlecht/Bruxelles, où il avait été amené par Marie MACA, épouse d’Henri MACA. Le nom de Lisiewski est repris dans le dossier de ces derniers (habitant au 31 Avenue du Val d’Or à Woluwé-Saint-Pierre) sans détails…

Le 6 janvier 1944, Marie MACA demande à Clotilde TARTE de conduire Lisiewski à "l'Allée Verte" (nom utilisé à l’époque par beaucoup de Bruxellois pour désigner la Gare du Nord) et de l'y remettre à Élie MIROIR. Comme le rapporte Lisiewski dans sa lettre en début de cette page, il part en train le 20 janvier avec un autre aviateur et leurs 2 dames guides à destination de Paris. Ils prennent à Lille le train de Paris… et se font arrêter peu après leur arrivée. Henri MACA a été arrêté le 23 janvier 1944 à Paris, victime lui aussi du traître belge Jacques DESOUBRIE, à la solde de la Gestapo, dans une vague d’arrestations dans laquelle furent également pris, à Paris, deux membres importants de Comète, Jacques LE GRELLE et Jean-François NOTHOMB.

Chester Lisiewski est interné au Stalag Luft 4 à Gross Tychow (actuellement Tychowo) en Pologne.

Décédé en 1999, il repose au Palm Desert Memorial à Las Vegas, Nevada.

Note : Le n° 2 de l’Avenue du Blankedelle faisait le coin avec le n° 110 de la Rue de l’Homme de Bien et les MEUNIER y tenaient un café. Ces deux rues ont été rebaptisées après la guerre en l’honneur de résistants morts en captivité et sont devenues respectivement, l’Avenue Charles Schaller et la rue Albert Meunier (Albert étant l’époux d’Yvonne et le père de Madeleine – arrêté le 14 juillet 1942 ; décapité à Wolfenbüttel, Allemagne, le 14 juin 1944).


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters