Dernière mise à jour le 21 janvier 2023.
Edwin Lee VINCENT ("Lee") / 02043746
2132 High Street, Selma, Fresno County, California.
Né le 2 octobre 1917 à Placentia, Orange County, Californie, USA / † le 21 juillet 1998 à Palo Alto, Californie.
1st Lt USAAF, 381 Bomber Group 534 Bomber Squadron, bombardier.
Atterri près de Beek, au nord de Maastricht, Pays-Bas.
B-17F Flying Fortress, n° série 42-3227, GD-G, abattu le 17 août 1943 lors d'une mission sur Schweinfurt.
Écrasé près de Obsinnich, Fourons / Voeren, Belgique, au sud-est de Maastricht.
Durée : environ 7 mois.
Arrêté en mars 1944 au Nord de Paris
[NOTE : Son prénom est repris comme Elwin dans les recensements (US Census) de 1930 et 1940, fils de George P. et Nora O. Vincent ; sa carte d’enrôlement en octobre 1940 indique "Elwyn Lee VINCENT (ou Edwin)". Le MACR et sa fiche de prisonnier aux archives de la NARA ainsi que sa carte de prisonnier à Buchenwald le reprennent tous comme Edwin Lee…]
Rapport de perte d’équipage / Missing Air Crew Report - MACR 661.
Le B-17 décolle de Ridgewell et, en route vers l’objectif, à hauteur de la frontière belgo-hollandaise, il est attaqué par des chasseurs allemands. Le moteur n°1 est touché et mis en drapeau, le n°2 est en feu et le B-17 est aperçu chutant vers le sol, son équipage l’abandonnant en parachute.
L’équipage comprend : le pilote Hamden L. Forkner, le Copilote Joseph A. Kelly, le navigateur Robert E. Hyatt, le Bombardier Edwin L. Vincent (la présente page, remplaçant le Lt Keith D. Moore ce jour-là), l’opérateur radio Chester E. Shattuck, le mitrailleur ventral Ralph E. Stease et le mitrailleur arrière Lin F. Chew. Ils seront tous faits prisonniers, Edwin Vincent après avoir pu s’évader pendant environ 7 mois. Le mécanicien et mitrailleur dorsal Paul Shipe, le mitrailleur latéral droit Harry Horton réussiront leur évasion, de même que leur pilote, Hamden Forkner (E&E 2192) et le mitrailleur gauche Edward Sobolewski (E&E 331), le premier, caché à Maastricht jusqu’à la Libération, le second, comme Horton, évacué via la Bretagne.
L’un des membres de l’équipage rapporte dans le MACR que Vincent, qui avait été le deuxième à sauter du B-17, était resté caché près du village de Beek, au nord de Maastricht (Pays-Bas) pendant près de 3 semaines. Nous ignorons le parcours d’Edwin Vincent après son atterrissage. Vincent est renseigné comme ayant été hébergé en mars 1944 par Marie DE DEKEN dans sa Villa Wouwenhof, à 's Gravenwezel, à 5 km au nord-ouest de Schilde près d'Anvers, en même temps que George Mikel.
Selon des informations de Michael Leblanc (novembre 2013), il semble que "vers le 14 mars 1944", Marie DE DEKEN a guidé George Mikel et Edwin Vincent à Béthune, à une trentaine de km à l'ouest de Lille, en France, chez Madame Yvonne MOUFLIN au 18 Boulevard d'Artois (vraisemblablement rebaptisé Boulevard Jean Moulin après la guerre ?) en leur disant d'y attendre de nouvelles instructions. Mikel et Vincent auraient vainement attendu là pendant cinq jours et auraient décidé de tenter leur chance seuls en direction de l'Espagne.
Une lettre de George MIKEL du 8 septembre 1945 (reproduite ci-dessous et trouvée en 2018 dans des archives américaines) en réponse à une carte postale envoyée le 22 janvier 1945 à ses parents par Lucienne ALBERT du 99 Rue Justin Lenders à Liège, apporte quelques éléments que nous ignorions. Selon cette lettre, Mikel et Edwin Vincent ont été hébergés (durée non précisée) par la famille ALBERT à l’adresse précitée à Liège. La liste des Helpers belges reprend bien Paul, Victor et Lucienne ALBERT à cette adresse, sans autres détails. Mikel mentionne un Mr "Gardier", ami des ALBERT, passé le voir aux USA, son rôle en région liégeoise n’étant pas détaillé (nous n’avons pas pu identifier ce J. L. GARDIER, décrit par Mikel comme chef dans la Résistance liégeoise.) Après leur séjour à Liège, Mikel et Vincent ont été conduits par "Robert" vers la frontière belgo-française où ils discutent avec un ami de Mme "HEAUSES" ( ?) qui leur dit qu’ils pourraient être rapatriés par avion en Angleterre endéans cinq jours. L’ami en question retourne à Liège avec une lettre des deux aviateurs à l’intention de la famille ALBERT pour leur signaler leur déplacement. Selon Mikel, après un court séjour du côté français, les deux hommes repassent en Belgique où ils sont pris en charge durant 5 mois par différentes organisations.
Toujours selon la lettre, en mars 1944, ils quittent un groupe de Résistance à Anvers, ayant décidé de rejoindre l’Espagne par leurs propres moyens. Après 4 ou 5 jours de marche, ils sont arrêtés par les Allemands au nord de Paris.
Tous deux seront internés pendant deux semaines à Saint-Quentin, puis pendant 4 mois ½ à la Prison de Fresnes près de Paris.
Les troupes Alliées approchant de Paris, dont la population et la Résistance commencent à s’insurger, préparant leur libération, les Allemands décident d’évacuer les aviateurs internés à la Prison de Fresnes. Comme 167 autres aviateurs Alliés et plus de 2000 civils, dont un tiers de femmes, internés à Fresnes, Edwin Vincent et George Mikel se retrouvent à bord de l’un des derniers convois partis vers l’Allemagne. Ce convoi, le n° I.264, à destination du camp de Buchenwald, part de la gare de Pantin dans la soirée du 15 août 1944.
Parmi les 169, il y a 2 Néo-Zélandais, 9 Australiens, 1 Jamaïcain, 1 Néerlandais, 24 Canadiens, 49 Britanniques et 83 Américains (dont 1 servant dans la Royal Canadian Air Force = F/O Stevenson, voir ci-dessous).
Le convoi avance lentement, les voies ayant été endommagées par les bombardements. Le 16, le pont de chemin de fer surplombant la Marne étant détruit, le convoi reste bloqué pendant 3 heures dans le tunnel d’approche. Finalement, les prisonniers sont obligés de quitter le train et de marcher jusqu’au pont de Saâcy-sur-Marne pour monter à bord d’un autre train de l’autre côté de la Marne.
Tôt dans la matinée du 17 août, près de Mézy-Moulins, alors que le train ralentit, un aviateur Américain servant dans la RCAF (F/O Joel Matthew Stevenson, pilote du Lancaster KB727 abattu le 4 juillet 1944 - SPG 3325/2812) et quelques civils Français parviennent à s’évader d’un wagon à bestiaux. Tous sont rapidement repris, sauf Stevenson qui réussira son évasion mais un Français sera abattu par les Allemands. Après Epernay et Châlons-sur-Marne, le convoi arrive à Nancy le 18 vers midi. Passant par Lunéville, Sarrebourg, Sarrebrücken et Strasbourg (où il traverse le Rhin), le convoi arrive en Allemagne où l’attitude des gardes Allemands semble s’assouplir un peu. Les prisonniers arrivent à Frankfurt-am-Main dans la matinée du 19. Puis, après être passé par Hanau, Fulda, Gotha (où ils reçoivent enfin une nourriture un peu plus consistante, même s’il ne s’agit que de biscuits, d’un peu de pain et de viande) et Erfurt, le convoi arrive à la gare de Weimar. Tous les prisonniers sont dans un état lamentable, manquant d’eau, de nourriture et obligés depuis des jours de subir des conditions sanitaires inhumaines, de manquer d’espace et d’air frais.
Les wagons contenant les femmes sont détachés et elles seront envoyées au camp de Ravensbrück. Les autres wagons sont arrimés à un train local qui quitte Weimar pour amener les prisonniers à une petite gare dans une clairière de la forêt de Buchenwald. Descendus des wagons à coups de bottes par des gardes de la SS, les aviateurs sont battus continuellement alors qu’ils titubent vers le camp de concentration de Buchenwald. Ils se posent des questions en apercevant de la fumée noire s’échappant en permanence d’une cheminée basse, leurs narines emplies d’une odeur nauséabonde… Après une longue séance de comptage, ils sont parqués à ciel ouvert (le "Kleine Lager") pendant deux semaines dans des conditions abominables. Le 24 août, des bombardiers américains ont pour objectif des usines d’armement à Weimar tout proche. Des bombes tombent sur une partie du camp près des usines, n’occasionnant que des dégâts matériels. Les aviateurs prisonniers sont obligés, avec difficulté et sans matériel adéquat, d’éteindre les incendies et déblayer les ruines et le Squadron Leader Phillip Lamason (voir sa page sur le présent site), le plus haut gradé parmi eux, proteste auprès du commandement du camp et s’entend dire par les SS que les aviateurs sont tous des terrorfliegers et susceptibles d’être exécutés sans autre forme de procès.
Tous tentent de survivre aux privations, au manque total d’hygiène, aux coups, à la faim et la soif. Ayant eu vent de projets consistant à faire travailler les aviateurs dans un camp de travail proche (Dora), Phillip Lamason est déterminé à faire savoir au commandement de la Luftwaffe que leur détention là par les SS est contraire aux conventions. En effet, les aviateurs auraient dû être internés dans un Stalag et non un camp de travail et d’extermination. En début octobre, un as de la chasse allemande, l’Oberst Johannes Hannes Trautloft de la Luftwaffe, qui avait entendu parler d’aviateurs Alliés internés dans le camp, veut vérifier les rumeurs et prétexte une tournée d’inspection pour examiner les dégâts à Dora et Buchenwald suite aux bombardements. Les SS ne montrent à Trautloft et ses adjudants que les aspects présentables du camp, les bureaux de l’administration et les baraquements des gardes. Ils déclarent que les détenus sont tous des prisonniers politiques assurant la main d’œuvre d’une usine de munitions à l’intérieur du camp et pour d’autres usines proches.
Trautloft et son groupe s’apprêtent à partir lorsqu’il est interpellé en allemand de derrière les barbelés par un détenu. L’homme déclare qu’il est un officier Américain. Les SS tentent de dissuader Trautloft de lui parler, mais Trautloft leur rappelle son grade et les fait se tenir à distance. Bientôt, il est approché près des fils barbelés par d’autres aviateurs parlant l’allemand, dont le F/Lt Splinter Adolphe Spierenburg, un officier néerlandais de la RAF servant habituellement d’interprète à Lamason. Trautloft s’entend confirmer qu’il y a effectivement plus de 160 aviateurs dans le camp et on le supplie de les en faire sortir. Trautloft prend quelques notes et promet de faire ce qu’il peut auprès de ses supérieurs pour que les prisonniers militaires soient transférés vers un camp géré par la Luftwaffe.
Ayant appris par la suite que, devant le refus des aviateurs et particulièrement de Lamason de collaborer, la Gestapo avait ordonné leur exécution pour le 24 ou le 26 octobre, Lamason redouble d’efforts. Finalement, sur ordre du Maréchal Goering, la Luftwaffe obtient de la Gestapo que les hommes soient transférés dans un camp adapté à leur statut. George Mikel et 155 de ses compagnons furent évacués de Buchenwald par train le 19 octobre 1944 et arrivèrent au Stalag Luft 3 à Sagan/Zagan, Pologne, le 21. Les 10 derniers, dont Edwin Vincent, restés au camp pour diverses raisons, dont la maladie, quitteront Buchenwald 5 semaines après les autres et arriveront en train à Sagan le 29 novembre.
Deux aviateurs sont décédés pendant leur détention au camp : le F/O Philip Derek HEMMENS, RAF 49 Squadron, bombardier à bord du Lancaster ND533 abattu le 10 juin 1944, âgé de 20 ans, décédé le 10 octobre (selon sa carte de prisonnier) de septicémie, pneumonie et rhumatisme articulaire et incinéré le lendemain. L’autre est le 1st Lt Levitt Clinton BECK Jr, USAAF, 24 ans, pilote du P-47 42-8473 abattu en combat aérien le 29 juin 1944. Sa carte de prisonnier indique qu’il est mort le 31 octobre 1944 et incinéré le 1er novembre. Cause du décès : pleurésie purulente (mal soignée…). Parmi les civils, on estime que la grande majorité d’entre eux ont été exterminés soit à Buchenwald ou dans les camps de travail de Dora et d’Ellrich, très peu d’entre eux survivant à leur détention.
Devant l’avance des troupes russes, le Stalag Luft 3 est évacué en fin janvier 1945 et après des semaines de marche forcée les prisonniers Américains de ce camp arrivent finalement au Stalag 7A à Moosburg, d’où ils sont libérés par la 3ème Armée du Général Patton le 29 avril 1945. Après son retour en Angleterre, Edwin Vincent est rapatrié aux Etats-Unis où il arrive le 13 juin 1945.
Décédé en 1998, 4 ans après sa seconde épouse, Sylvia (mariage en 1950), Edwin Vincent repose au Oakwood Memorial Park à Santa Cruz, Californie. Sa photo en médaillon a été publiée par Amy Jentoft Hussar.