Les tâches de Comète, quand un aviateur débarque …

Par Victor Schutters

Dernière mise à jour le 14 décembre 2011.

La prise en charge des aviateurs

Après avoir vécu une tension considérable durant l’attaque de son avion par la défense anti-aérienne allemande ou par des chasseurs ennemis, il ne restait plus à l’aviateur touché que de s’extirper de son appareil en flammes et de sauter en parachute.

Ce saut était généralement le premier qu’il faisait car les aviateurs ne recevaient que peu ou pas d'entraînement parachutiste avant leurs missions au-dessus de l’Europe.

La distance encore parcourue par l’avion après le saut de l’équipage, pouvait dans bien des cas être de l'ordre de plusieurs kilomètres, ce qui explique pourquoi l’aviateur ne tombait pas toujours près du lieu du crash de son avion. Ainsi, la première chose qu’il avait à faire, était de cacher son parachute de manière à ne pas se faire repérer par les Allemands. Ces derniers se mettaient à fouiller toutes les maisons des environs où l’aviateur était susceptible de se trouver.

Se situer géographiquement était de première importance également, afin qu'il puisse s'orienter dans la meilleure direction possible. A l'aide notamment de la boussole et de la carte se trouvant, avec d'autres articles, dans son kit d'évasion, l'aviateur pouvait au départ plus facilement repérer l'endroit ou au moins la région et même le pays où il se trouvait. Dans beaucoup de cas, montrer la carte à l'un ou l'autre inconnu souhaitant l'aider, lui permettait de poursuivre alors ses déplacements en meilleure connaissance de cause. [Voir le texte sous "Matériel d'évasion".]

L’aviateur devait ensuite demander de l’aide à la population locale en espérant que l’on serait disposé à le cacher. Puis, contacter la Résistance qui s’occuperait de sa prise en charge. La chose n’était pas évidente car il n’était pas facile de se faire comprendre face à des personnes qui ne parlaient pas toujours l’anglais.

De plus, les autorités allemandes avaient publié un décret stipulant que tout citoyen qui fournirait de l'aide à un aviateur allié serait passible de la peine de mort.

Dès que l'aviateur avait pu trouver un refuge, la personne qui l'hébergeait contactait généralement l'instituteur, le curé, le médecin ou le bourgmestre du village. Ces personnes connaissaient dans la plupart des cas un membre de la Résistance. Cependant, le résistant ainsi contacté n'appartenait pas nécessairement à une ligne d'évasion destinée à venir en aide aux aviateurs échoués sur le sol belge ou dans un pays voisin. Il pouvait en effet s'agir d'un membre d'un réseau s'occupant de presse clandestine ou d'un service de renseignement ou de sabotage. Sachant cela, le réseau Comète avait contacté les différents groupes de Résistance pour que, dans toutes les éventualités, l'aviateur soit amené vers lui.

Il arrivait que suite à l'attaque de son avion ou de son saut en parachute, l'aviateur se blesse et nécessitait certains soins. Il fallait dans ce cas faire appel à un médecin qui était prêt à fournir son aide en toute discrétion. Car il était malheureusement exclu d'hospitaliser le blessé en cas de besoin et les conditions dans lesquelles devait alors intervenir le médecin n'étaient pas optimales. Parfois, une simple visite chez le dentiste nécessitait beaucoup de précautions. En effet, la façon de prodiguer des soins dentaires, aux Etats-Unis par exemple, était différente de celle en usage en Europe et le praticien pouvait ainsi bien vite deviner la nationalité du patient.

L’identification

L'identification rigoureuse était la première chose que devait faire Comète dès la réception d'un aviateur. En effet, les Allemands avaient à plusieurs reprises introduit de faux aviateurs dans la Ligne, comme on appelait le réseau Comète avant l’arrestation d'Andrée De Jongh, le 15 janvier 1943. Il s’agissait en fait de militaires allemands portant des uniformes britanniques ou américains et qui maîtrisaient parfaitement l’anglais. Comme on peut l’imaginer, si de tels stratagèmes n’étaient pas dévoilés à temps, les conséquences pouvaient en être désastreuses.

Mais l’identification des aviateurs n’était pas aisée car certains d’entre eux trouvaient les questions qu'on leur posait trop précises et craignaient que les réponses fournies puissent servir la cause des Allemands si elles étaient venues à leur connaissance. En fait, avant leur départ en mission, ils recevaient en Grande-Bretagne des consignes de sécurité strictes.

En plus de la déclinaison de leur identité, de leur grade et de leur numéro de matricule, les questions portaient sur le type d’avion à bord duquel ils se trouvaient, la composition de leur équipage, l’objectif de leur mission et la réussite ou non de celle-ci.

Ils trouvèrent une solution efficace : Une fois le questionnaire complété, il était transmis à l’Intelligence Service de Londres qui pouvait alors procéder à des recoupements et transmettre ses conclusions par message codé.

En outre, l'analyse de l'écriture des aviateurs donnait également de précieuses indications. La manière de former les lettres par les Anglo-saxons se distinguait en effet nettement de l'écriture allemande, certains petits détails tels que le fait, pour les Américains, de ne pas barrer le chiffre 7 ou, pour les Allemands, de former le chiffre 4 en le faisant ressembler à un éclair étaient très significatifs.

Il arrivait également que l’on demande à un aviateur déjà pris en charge par Comète depuis un certain temps de procéder à l’identification d’un nouvel arrivant. Des questions très pointues telles que la demande par exemple de décrire un aérodrome militaire anglais ou la place de Picadilly Circus à Londres pouvaient alors être posées et démasquer à coup sûr tout usurpateur.

L’établissement de faux papiers d’identité

L’établissement de faux papiers d’identité suivait alors l’identification.

Au cas où l'aviateur n'avait pas été pourvu de photos d'identité avant son départ en Angleterre, il était d'abord photographié pour que l'on puisse lui fabriquer une fausse carte d'identité et une fausse carte de travail. Dans un premier temps, les photos étaient réalisées dans des cabines photomaton mais les Allemands étant devenus suspicieux, on décida de faire appel à des photographes capables de procéder eux-mêmes à l'impression des photos et en qui on avait parfaite confiance. Dans de nombreux rapports d'évasion, les évadés arrivés en Angleterre mentionnèrent souvent que les photos que l'on leur avait fournies avant de partir en mission étaient trop grandes ou trop petites ou inutilisables pour l'une ou l'autre raison. A un moment donné, Comète demanda également à Londres de doter les aviateurs du type de photos d'identité qui pouvait être utilisé en toute sécurité pour la réalisation de faux documents.

Les documents vierges étaient soit fabriqués de toutes pièces, soit subtilisés dans les administrations communales qui comptaient souvent des résistants parmi leurs employés.

Quant aux cachets-tampons qui étaient apposés sur les faux documents afin de les authentifier, ils étaient soit subtilisés dans les bureaux officiels, soit contrefaits par des professionnels qui s'étaient joints à la Résistance.

L’hébergement

L’hébergement, si ce n’était pas déjà fait, était alors l’étape suivante.

Il fallait donc trouver un endroit où l’aviateur pouvait être hébergé d’une manière sûre en attendant son évacuation vers l'Angleterre.

L'organisation Comète faisait appel à des personnes de confiance qui étaient prêtes à accueillir l'évadé en toute discrétion. De manière à limiter les risques, cette tâche était généralement confiée à des personnes n'ayant pas d'enfants en âge scolaire. Si cela n'était pas possible, les aviateurs étaient par exemple présentés aux enfants comme étant des cousins venant de loin, ce qui pouvait expliquer qu'on leur parlait dans une autre langue.

Afin de ne pas divulguer la présence de l'aviateur, il était soit caché dans le grenier ou dans la cave, soit dans une autre cachette d'où il se tenait toujours prêt à prendre la fuite en cas de visite impromptue.

L’alimentation

L'alimentation représentait sans aucun doute avec l’hébergement un des problèmes les plus difficiles à résoudre.

En effet, la population belge était fortement rationnée, la nourriture souvent difficile à trouver et de surcroît de mauvaise qualité.

Certaines denrées étaient fort chères et le fait d’avoir une ou plusieurs bouches supplémentaires à nourrir n’était pas évident. Pour se donner une idée du rationnement infligé par les autorités allemandes, notons que chacun avait droit par jour à 20 grammes de viande, 200 grammes de pommes de terre, 225 grammes de pain et 7 ½ grammes de confiture et autant de miel.

Le contrôle de la distribution des denrées était régi par l’octroi de timbres numérotés et de différentes couleurs qui correspondaient chacune à une sorte de marchandise.

Devant la difficulté de s’alimenter correctement via le ravitaillement officiel, les moins démunis se tournaient vers le marché noir où les prix étaient exorbitants. Les quelques exemples suivants en sont la preuve : 1 kilo de sucre se vendait 125 BEF ; 1 kilo de beurre, 325 BEF ; 1 kilo de viande, 200 BEF ; 1 kilo de café, 2000 BEF, 1 kilo de pain blanc, 75 BEF ; une orange ou un citron, 25 BEF ; un œuf, 8 BEF ; …

Pour mieux vous rendre compte de ce que cela représentait, sachez que le salaire mensuel moyen d'un ouvrier était alors compris entre 1200 BEF et 1800 BEF. De plus, la qualité des ces soi-disant produits de luxe était loin de ce qu'elle avait été avant la guerre.

Quand on pense à l’inflation qui a eu lieu depuis la guerre, on peut s’imaginer les montants astronomiques que ces prix représentaient à l’époque. Les prix d'alors peuvent grosso modo se lire en Euros actuels.

Les logeurs recevaient bien une aide financière de la trésorerie de Comète qui était de l’ordre de 70 BEF par jour et par aviateur. Cela permettait difficilement de répondre aux besoins vitaux et il fallait se débrouiller comme on le pouvait.

Ainsi, pour pallier aux problèmes d'approvisionnement en nourriture, les résistants organisèrent des raids qui consistaient à reprendre aux Allemands ce qu'ils avaient pris aux Belges car des trains entiers emmenaient des marchandises de la Belgique vers l'Allemagne afin de nourrir la population allemande et surtout ses soldats. La nourriture était ensuite partagée avec différentes organisations, dont Comète.

Par ailleurs, pour en faire bénéficier les personnes qui hébergeaient et nourrissaient des aviateurs, les résistants subtilisèrent également des feuilles de timbres de rationnement. Cela se faisait souvent avec l'aide d'employés communaux qui s'occupaient à un moment ou un autre de leur distribution.

L’habillement

L'habillement était un autre problème. Comme toutes les autres denrées, les vêtements étaient difficiles à trouver. Au fur et à mesure que les années de guerre s’écoulaient, les vêtements qui ne pouvaient pas être remplacés s’usaient et étaient parfois rapiécés de toutes parts.

Il fallut donc encore ruser pour parvenir à vêtir les aviateurs. Sans oublier que leur taille était souvent supérieure à celle des Belges et qu’il n'était pas facile de les habiller d’une manière séante qui n'éveillerait pas les soupçons.

Les déplacements

Afin d'alléger le fardeau de certains logeurs ou pour éviter de trop longs séjours dans un même lieu, les évadés étaient constamment changés de cachette. Les déplacements des aviateurs d'un lieu sûr à un autre, au même titre que leur hébergement, représentaient une tâche risquée dont devaient s'acquitter les membres de Comète. Souvent, l'aviateur était tombé à la campagne et généralement les premières personnes avec lesquelles il entrait en contact étaient des paysans. Il arriva que ces derniers ou d'autres habitants locaux refusèrent d'aider l'évadé ou le dénoncèrent aux Allemands, soit contre une somme d'argent, soit pour éviter d'éventuels problèmes avec les autorités. La plupart du temps, l'aviateur recevait, tôt ou tard, de l'aide et était mis en contact avec un membre de la Résistance.

Après que le contact avec la Résistance fut établi, on procédait à son évacuation vers la ville où il était souvent plus aisé de le cacher et de préparer son départ pour l'Angleterre.

Cela représentait la procédure habituelle et idéale. Cependant, suite aux suspicions qui pouvaient apparaître ou aux arrestations de certains membres de Comète, il fallait souvent trouver de nouvelles cachettes et assurer chaque fois les déplacements avec le plus de discrétion possible. Le danger était partout et tout le monde devait être extrêmement prudent.

Comme les Allemands avaient réquisitionné toutes les voitures privées et de nombreux autres véhicules, il y en avait très peu qui circulaient et ce moyen de transport n'était que très peu utilisé. La majorité des déplacements se faisaient donc à pied, à vélo ou en tramway au sein des villes ou entre les villages voisins. Quant aux distances plus longues, elles se faisaient en train. L'avantage du tramway résidait dans le fait que la destination n'était pas mentionnée sur le billet de transport. L'on pouvait changer plusieurs fois de véhicule pour aller d'un endroit à un autre. Cela permettait d'éviter d'être suivi ou du moins de s'en rendre compte et d'échapper dans ce cas au poursuivant. De plus, il y avait moyen d'acheter des cartes de transports valables pour plusieurs voyages qu'il suffisait de présenter au contrôle et de faire poinçonner sans avoir à prononcer le moindre mot. Ceci représentait bien évidemment une grande facilité pour les voyageurs anglo-saxons.

Le tramway n'avait pas que des avantages car les contrôles effectués par les Allemands étaient fréquents. Les voyageurs se voyaient alors obligés de descendre du véhicule et selon ce qu'ils cherchaient, les Allemands procédaient à la vérification des identités ou du contenu des bagages.

L’évacuation des aviateurs vers l’Espagne

L’évacuation des aviateurs vers l’Espagne pour qu’ils puissent regagner leur base en Angleterre était la tâche finale et le principal objectif de Comète. Ce voyage était planifié dès que possible. Cependant, une distinction entre les aviateurs avait lieu en fonction du poste qu’ils avaient occupé à bord de leur avion. Ainsi, les pilotes dont la formation était la plus longue, étaient évacués en priorité.

C’est alors que débutait un long et périlleux voyage. Les aviateurs étaient souvent évacués par groupes de deux ou de trois et étaient accompagnés d’un guide qui veillait à ce que tout se passe pour le mieux.

En fait, ce voyage était assuré par plusieurs guides qui effectuaient chacun une partie du parcours et qui se passaient le relais. Afin de garantir la sécurité, le guide connaissait rarement l'identité des accompagnateurs desquels il recevait les aviateurs ou auxquels il les remettait.

De manière à ne pas se faire arrêter, de nombreuses consignes devaient être respectées. Ainsi, le guide avait soin de ne pas prendre des tickets de train dont la numérotation se suivait et qui en cas de contrôle auraient permis de supposer que l’on voyageait ensemble.

Les contrôles pouvaient avoir lieu n'importe où, dans les gares, à bord des trains, aux ponts, aux carrefours, etc. L'identité de chacun pouvait être contrôlée par différentes polices allemandes telles que la Gestapo, la Geheime Feldpolizei ou la Feldgendarmerie, soit par des contrôleurs qui traquaient notamment les personnes qui s'adonnaient au marché noir. En France, outre des policiers, des miliciens français ont également été souvent impliqués dans de tels contrôles, en collaboration avec leurs "partenaires" allemands.

En cas de contrôle, les aviateurs avaient pour consigne de se faire passer pour sourd et muet. Il était pratiquement impossible de leur apprendre à décliner leur fausse identité sans que leur accent anglo-saxon ne soit dévoilé. Si des questions supplémentaires leur avaient été posées, ils auraient d'ailleurs été bien embarrassés d’y répondre…

Et puis, lors des contrôles, qui étaient particulièrement sévères en France, il fallait également justifier sa présence sur la partie de l'itinéraire que l'on empruntait par le biais de documents officiels. C'est pourquoi, les aviateurs recevaient à chaque partie du trajet, des cartes d'identité et des cartes de travail, de même que des autorisations de circuler, qui auraient pu leur être délivrées par les autorités locales.

Pour ne pas attirer l'attention, on faisait en sorte que ces faux papiers ne paraissent pas trop neufs en les abîmant volontairement. La procuration de ces documents n'était évidemment pas aussi simple et il fallait tenir compte de tout changement de l'autorité qui les validait, sans quoi la signature imitée n'était pas valable ou n'était plus d'actualité.

Quant à la route empruntée, plusieurs itinéraires furent suivis en fonction des circonstances et les étapes étaient nombreuses. L'un de ces interminables voyages à partir de Bruxelles, amenait les aviateurs jusqu'au village frontalier de Rumes, en Belgique, après avoir changé de train à Tournai.

Le passage de la frontière franco-belge se faisait alors à pied jusqu’au village de Bachy, en France, grâce à la complicité de certains douaniers et à l’aide de guides qui connaissaient très bien la région.

Cependant, avant de passer la frontière, il était impératif de vérifier que rien sur l'aviateur ne pouvait donner idée d'où il venait. Il fallait le dépouiller de tout indice de son pays d'origine, de son escadrille, des noms et adresses de ses helpers et de ses logeurs, tout devait être éliminé avant de poursuivre le voyage. C'était capital. Ainsi, on veillait notamment à ce que les poches, les souliers, les vêtements des aviateurs ne contiennent aucun objet ou marque compromettants qui auraient pu discréditer ce qui était mentionné sur leurs faux papiers. En effet, la présence sur eux de cigarettes ou d'allumettes anglaises ou américaines aurait bien vite fait détecter qu'ils étaient des aviateurs alliés, compromettant ainsi non seulement leur propre sécurité mais aussi celle de leurs guides et, finalement, de tous les maillons de l'organisation.

Par ailleurs, il arrivait qu’un aviateur soit tombé amoureux d’une jeune fille qui lui était venue en aide. Cela pouvait alors lui donner l’envie de conserver sur lui un nom ou pire, une adresse ou une photo de la personne qui lui était chère. Là encore, il fallait l’obliger à se séparer de ces objets car le moindre petit papier aurait pu entraîner un désastre.

Même certains gestes étaient à proscrire. Ainsi, lorsqu'ils allumaient une cigarette, les aviateurs avaient le réflexe de protéger leur briquet du vent en l'entourant de leurs mains. Le vent était en effet souvent présent sur les aérodromes. Agir de la sorte lorsque ce n'était pas nécessaire pouvait bien évidemment interpeler les Allemands qui étaient conscients de cela. Une autre façon de se comporter et qui pouvait trahir la nationalité des aviateurs résidait dans le fait que les Américains ont pour coutume de couper leurs aliments avant de commencer à manger et de passer ensuite la fourchette dans la main droite pour ingurgiter leur repas. Cela aussi devait être évité.

Après la frontière, on faisait prendre aux aviateurs le train jusqu’à Lille. De là, ils reprenaient un train jusqu’à Paris, puis un autre pour Bordeaux.

A Bordeaux, un train encore les emmenait à Bayonne où ils se voyaient remettre des vélos qui leur servaient de moyen de transport à travers les Landes jusqu'aux pieds des Pyrénées. Certains montaient sur une bicyclette pour la première fois de leur vie et de mémorables incidents eurent lieu le long de certains parcours.

Après s'être restauré et avoir repris des forces auprès des derniers relais, les aviateurs étaient conduits par des guides basques qui, par des petits sentiers de contrebande, les faisaient franchir les Pyrénées.

C'est durant cette dernière rude épreuve physique qu'ils devaient traverser la rivière Bidassoa formant la frontière naturelle entre la France et l'Espagne et qui en période de crues et par temps froid se révélait être un obstacle redoutable. [Pour plus de détails concernant les différentes routes empruntées par les évades et leurs guides dans les Pyrénées : voir les textes sur la route classique et les itinéraires de l'Est alternatifs.]

Enfin, arrivés à Bilbao en Espagne, ils étaient pris en charge par le corps diplomatique britannique et emmenés en voiture jusqu’à Madrid. De là, toujours sous le couvert de l’immunité diplomatique, ils étaient conduits jusqu’à Gibraltar d’où ils regagnaient l’Angleterre en bateau la plupart du temps.

L'expérience ainsi vécue par les aviateurs depuis leur saut en parachute jusqu'à leur retour à leur base militaire en Angleterre peut donc sans aucun doute être qualifiée de véritable épopée. Les difficultés rencontrées pour ne pas tomber aux mains des Allemands et l'épuisant voyage destiné à reprendre le combat en valaient tout de même la chandelle, non seulement du fait que les aviateurs évadés avaient pu rejoindre l'Angleterre mais aussi parce que leur retour avait un impact psychologique extrêmement positif sur le moral de leurs compagnons d'escadrille qui devaient encore partir en mission. Ils savaient alors en effet que s'ils étaient amenés à abandonner leur avion au-dessus des Pays-Bas, de la Belgique ou de la France, ils avaient une chance non négligeable d'éviter la capture.

Victor Schutters – 2005.