Aviateurs de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 29 juillet 2024.

Stuart Kauffman BARR / T-61270
1906 Hunting Park Avenue, Philadelphie, Pennsylvanie
Né le 5 novembre 1918 à Mount Joy, Lancaster County, Pennsylvania / † 27 décembre 2002 à Palm Beach, Floride
Fl/Off, USAAF 448 Bomber Group 712 Bomber Squadron, copilote
Atterri entre Neuville-lès-Dieppe et Arques-la-Bataille en Seine Maritime, France
Boeing Liberator B-24H-FO, 42-64447, CT-I / "The Comanche", abattu le 20 mars 1944 par la Flak au Sud de Dieppe au retour d’une mission avortée sur Francfort, Allemagne
Écrasé près de Pommeréval vers 13 heures et demie, à 30 km au Sud de Dieppe (Seine Inférieure), France
Durée : 5 mois
Camps Marathon : Fréteval

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 3340. Rapport d'évasion E&E 1061, disponible en ligne.

Le Lt Myers Wahnee (de Anadarko, Oklahoma, membre de la Comanche Nation, et ayant donné le nom à son avion) est le pilote de l'appareil qui a quitté Seething vers 09 heures et demie. Ils ne peuvent lâcher les bombes sur l'objectif que Barr décrit comme étant Frankfurt. La formation devait effectivement bombarder des installations militaires à Francfort, mais vu la forte couverture nuageuse, la mission fut annulée et la plupart des bombardiers rebroussèrent chemin. Sur le vol du retour, le B-24 est touché par la Flak entre 5500 et 6700 m d’altitude et malgré ses efforts, le pilote perd le contrôle de l'avion. Ils lâchent alors leurs bombes et le pilote donne l'ordre de sauter. Stuart Barr inspecte la soute où coule de l'essence et retourne dans le cockpit, d'où Wahnee lui fait signe de quitter l’appareil.

(photos : https://www.b24.net/2ndADA-Newsletters/1984-Jun.pdf)


Le pilote Lt Myers Wahnee


Myers Wahnee et Stuart Barr

Le pilote Wahnee et 7 autres membres de son équipage seront faits prisonniers : le navigateur 2nd Lt Royal D. Goldenberg (qui ne faisait pas partie de l’équipage habituel de Wahnee et avait remplacé au pied levé le Lt Richard M. Hager) ; le bombardier 2nd Lt Walter S. Maszewski ; l’opérateur radio/mitrailleur T /Sgt Lawrence R. Reep ; le mitrailleur dorsal T/Sgt Walter Farmer ; le mitrailleur ventral S/Sgt William V. Cordray ; le mitrailleur droit S/Sgt John C. Coppola et le mitrailleur arrière S/Sgt Edward J. McGraw. Seuls Stuart Barr et le mitrailleur gauche S/Sgt Richard H. Elliott parviendront à s’évader. Elliott atterrit près de Fresnoy-Foly et sera aidé dans la région, puis guidé à Paris, ensuite vers Toulouse, passant en Espagne via les Pyrénées le 16 juin. Mené à Gibraltar via Barcelone, il arrivera en Angleterre le 31 juillet 1944 (E&E 852).

Barr, dont c’est la 16ème mission, saute vers 13.000 pieds (4.000 m) et peut voir que tout l'équipage a pu sauter. Il ouvre son parachute vers 450 m et atterrit sur une ligne de barbelés près d'une forêt (vraisemblablement la Forêt domaniale d’Arques). Par signe, il fait comprendre aux nombreux curieux qu'il faut brûler son parachute qu’il avait jeté dans un trou, ce qui est fait. Il va alors se cacher dans la forêt jusque 18 heures. Il se rend ensuite à une ferme peu éloignée où le fermier lui donne à manger et l’héberge pour la nuit. Le lendemain il reçoit un imperméable et des vieux souliers et part à 6 heures du matin avec 3 œufs cuits durs. Il marche jusqu'au 22 mars au soir et deux Français d'environ 35 ans le prennent en voiture alors qu’il se trouve "à 16 kilomètres passé Gisors". Ils le conduisent dans un café-garage à "Le Fayel" (?) chez un couple et leur jeune fils. Il y reste 3 jours au lit.

Les gens amènent une jeune femme qui parle un peu anglais pour l'interroger. Il reçoit alors des vêtements civils. Il est conduit le 25 mars à Sancourt (à 13 km au nord-ouest de Gisors) par un ami de la famille chez M. TETAR, un homme âgé à moustache qui parlait bien l'anglais, et qui le loge 4 jours. La liste des Helpers français reprend Mr et Mme Paul TETAR comme habitant à Saint-Denis-le-Ferment, un peu au sud de Hébécourt et Sancourt (Département de l’Eure). Barr est alors conduit chez Georges VALOIS à Rouville, à 2 km au nord-ouest d’Hébécourt et reste chez lui un mois. Il y reçoit une carte d'identité arborant une photo de lui, prise par un homme passé chez les TETAR (Barr avait perdu son kit d’évasion en sautant de l’avion et n’avait pas de photos d’identité prêtes à l’emploi).


Fausse carte d’identité au nom de Jean Barreau (copie reçue de sa nièce Barbara Barr Jackson et son mari Alan en juillet 2023).
Les localités de naissance et de résidence sont fictives et le département de la Loire se trouve
à des centaines de kilomètres au sud de la région où Barr était susceptible de circuler, d’autant plus comme cultivateur.
Le but des contrefacteurs (non-identifiés) était probablement, pour confondre les contrôleurs, de lui donner une raison de voyager vers le Sud et retourner chez lui (?)

Le 22 avril, Georges VALOIS le conduit à Sérifontaine (à 5 km au SE de Rouville) pour prendre un train et le guide à Paris. On lui présente là M. PHILIPPE (Philippe d'ALBERT-LAKE du 1bis Rue Vaneau, Paris VIIème, chef de secteur pour Comète dans l’opération Marathon-camps secrets), qui lui présente à son tour un capitaine canadien (Jacques DU PAC DE MARSOULIES, responsable Sécurité de la ligne Shelburn, du 115 Rue Notre Dame des Champs, Paris VIème) qui le remet à une Yvonne (Veuve DIXIMIER du 8 Rue Jean Moreas, Paris XVIIème) qui le conduit le 22 avril chez Mme Marie Suzanne LEMONNIER et sa fille Alice Anita au 2 Rue Ernest Renan à Paris XVe. Barr y est rejoint le 23 avril parr Robert Sidders. Ils y restent jusqu'au 13 juin, jour où ils partent pour une cache secrète près de Châteaudun.

En compagnie de Sidders, Barr se retrouve le 13 juin 1944 à la Gare d'Austerlitz à Paris où ils rejoignent un groupe comprenant Charles Martin, le Fl/Off belge Jean Croquet et le Fl/Sgt Larry Clay. Un jeune homme de 21 ans à lunettes et cheveux noirs nommé "Pierre" (Pierre ROBERT du 26 Avenue Pierre Ier de Serbie à Paris XVIe) les conduit en train jusque Dourdan et marche avec eux jusque Châteaudun. Là un camion les prend et les mène à la Forêt de Fontaine près de Villebout (Cloyes).

Barr se retrouve ainsi à Bellande dans un camp de 31 évadés, dirigé par un "colonel britannique Lucien" (le Squadron Leader belge Lucien BOUSSA) et le Belge "Jean" (Jean de Blommaert). Quand le nombre d'évadés monte à 60, un deuxième camp est construit à Richeray à 11 kilomètres au sud-ouest. Barr mentionne qu’un agent français nommé "Gilbert" y travaille. Dans son rapport concernant la mission Marathon en France, Lucien BOUSSA reprend "Gilbert", dont il pense que le nom réel est Pierre Guillaumin (sic) de Alluyes, près de Bonneval, au nord de Châteaudun. Il déclare que "Gilbert" a travaillé sans relâche à transporter à vélo sur de longues distances le ravitaillement pour le camp ainsi que le convoyage de groupes d’aviateurs, ceci pendant plus de trois mois. L’orthographe correcte du nom de Pierre est en fait GUILLAMIN, qui fut vice-président de l’association créée pour la réalisation du mémorial inauguré le 11 juin 1967 en bordure de la Forêt de Bellande.

Le 10 août, Lucien BOUSSA vient annoncer que les Allemands ont évacué les alentours. Barr va chercher du vin à une ferme et deux Britanniques en jeep (un capitaine et un soldat) lui disent qu'ils l'attendaient. Ils rencontrent BOUSSA qui va alors demander un transport. Le 11 (dit Barr), une fille vient dire que 4 camions d'Allemands sont à Cloyes. Un des Belges va voir et revient dire que ce sont en fait des Américains. Un peloton de Tank Destroyers arrive au bois durant l'absence de BOUSSA avec les évadés de l'autre camp. Le lendemain, ils sont transportés au Mans, où un des deux capitaines britanniques est le Canadien de Paris (Jacques DU PAC DE MARSOULIES), que Barr reconnaît.

Après y avoir passé une nuit, le gros des forces part pour Laval, quelques-uns, dont Barr, étant oubliés au Mans. Un camion vient rechercher Barr et quelques autres et les conduit à Omaha Beach. Ils y passent deux nuits. Le Capitaine Luria de la 9th Air Force règle leur transport par avion vers Northolt le 18 août.

Il arrive à Londres le même jour et est débriefé le 19 au 63 Brook Street. Stuart Barr aura l’occasion de revoir son pilote Myers Wahnee à Roswell, New Mexico, en 1951 et apprendra que Wahnee avait nommé un de ses enfants, un fils, Stuart Barr Wahnee en son honneur. Resté dans l’Air Force, Stuart Barr quitte le service en 1963 avec le grade de Capitaine.


Charles Martin, son fils Nicholas et Stuart Barr à Bellande en 1967
(photo reçue de Nicholas Martin)

Stuart Barr est revenu à Bellande en 1967. La photo ci-dessus le montre en compagnie du bombardier de la RAF, Charles Martin et son fils Nicholas. Martin avait fait avec Barr et d’autres le voyage depuis Paris jusqu’à Fréteval en juin 1944.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters