Personne capturée durant son évasion

Dernière mise à jour le 28 octobre 2014.

Eldon J. BROMAN / O-665661
Whitewater, Walworth County, Wisconsin, USA
Né le 16 août 1923 à Whitewater dans le Wisconsin / † le 3 avril 2012 à Heber Springs, Arkansas, USA.
1st Lt, USAAF 95 Bomber Group 335 Bomber Squadron, pilote
Atterri aux Pays-Bas.
Boeing B-17F-BO Flying Fortress, n° série 42-30272, OE-U / "Fritz Blitz", abattu lors de la mission du 10 octobre 1943 sur Münster.
Ecrasé à Haaksbergen, au Sud-Est d'Enschede, Pays-Bas.
Durée : 6 semaines.
Arrêté à Liège le 21 novembre 43

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 1118.

L’appareil décolle de Horham avec 11 hommes à bord, l’homme supplémentaire est le 1st Lt Charles M. Forney qui sert d’observateur lors de cette mission. Touché peu de temps après le largage de ses bombes par des tirs de la Flak, le B-17 est attaqué quelques minutes plus tard un peu avant la frontière hollandaise par la chasse allemande. C’est vraisemblablement le système d’alimentation en oxygène qui est atteint. Un incendie se déclare et après 5 minutes l’intercom ne fonctionne plus. Avant cela, le mécanicien-mitrailleur dorsal T/Sgt Roy E. Rightmire Jr avait signalé que sa mitrailleuse était enrayée. Lorsque Broman et le navigateur Fowler allèrent s’inquiéter de son sort, ils le virent inanimé, apparemment par manque d’oxygène. Ils l’extirpèrent de sa nacelle, lui endossèrent un parachute et l’amenèrent au bord de la soute d’évacuation. Rightmire n’ayant aucune réaction, ils le poussèrent hors de l’appareil en actionnant le déverrouillage de son parachute. Rightmire, dont le corps fut trouvé par la suite par les Allemands près de Lingen, à 90km au nord-ouest de Münster, repose au Netherlands American Cemetery à Margraten, Pays-Bas. Rightmire sera le seul tué, les 10 autres seront fait prisonniers, Eldon Broman parvenant à s’évader un temps. Les noms des membres de l’équipage sont repris sur la plaque dont la photo figure en bas de page.

Sans interphone et avec le feu dans le cockpit, Broman, qui avait donné l’ordre d’évacuer l’appareil, saute avec son copilote, le Lt John H. Chaffin.

Eldon Broman atterrit dans un arbre d'où il peut descendre sans trop de difficultés. Il entend des tirs de mitraillette au loin et comme son parachute resté coincé dans l'arbre est trop voyant, il décide de quitter immédiatement les lieux.

Après une longue course à travers bois, il se réfugie dans un vieux trou de fantassin pour se reposer. Après y avoir enterré son survêtement et ses bottes de vol et avalé de la benzédrine, il se remet en route vers l'Ouest, se dirigeant à l'aide de sa boussole. Toujours dans les bois, il traverse plusieurs clôtures longeant apparemment la frontière germano-hollandaise jusqu'à ce qu'il arrive à une grand-route fort fréquentée. Le lettrage de camions qui passent lui fait déduire qu'il se trouve à présent en Hollande. Il traverse la route lors d'une accalmie du trafic et emprunte vers l'Ouest une route secondaire flanquée d'une piste cyclable.

La soirée tombant, il décide de s'adresser à une femme trayant une vache dans la cour d'une ferme. La femme s'enfuit en hurlant et son mari apparaît en courant. Il finit par se faire comprendre et les fermiers lui donnent un verre de lait et un miroir. Il comprend l'émoi de la femme lorsqu'il voit son visage horriblement gonflé et le front noirci par les brûlures. Comprenant qu'il ne pouvait se déplacer ainsi, il demande d'être mis en rapport avec la résistance.

Le fermier s'en va et une demi-heure plus tard, un jeune homme arrive à vélo, apportant un autre vélo pour Broman. Celui-ci remercie ses hôtes et s'excuse auprès de la fermière pour la frayeur causée et les deux hommes pédalent jusqu'à la petite cabane/abri du jeune homme dans une autre partie de la forêt.

En fait, ce jeune homme est Patrick Laming et Broman reste sous la protection de ce helper pendant environ trois semaines, le temps que ses brûlures guérissent et que ses cils et sourcils repoussent. Il reçoit des faux papiers avec sa nouvelle identité "Jean SEPRINEE" et, à la fin octobre, Laming le met sur un train vers le Sud de la Hollande. Il poursuit alors sa route à pied, parfois en rampant, ou à vélo, en tram, en train, une fois dans une Pontiac et dans une barque. Il finit par traverser la frontière vers la Belgique avec l’intention d’atteindre à Liège.

Eldon Broman va à Roermond chez la famille de Henri et Jeanne LOVEN (au n° 90 Willem II Singel), où il reste du 30 octobre au 05 novembre 43. Y sont aussi : William Whitlow, John Ashcraft et le Sgt Ross Repp. Ils quittent tous Roermond pour Neeritter où ils rencontrent le Résistant Renier Hubert van de VIN qui les cache chez lui, 130 Haardstraat à Neeritter, jusqu'à minuit le 6 novembre lorsque Theodor FLORQUIN vient chercher les quatre aviateurs. Il les guide jusqu'à sa maison à Geistingen, juste passé la frontière belge. La liste des Helpers belges, établie après la guerre, indique son adresse à la fois comme Geistingen et 14 Steenweg à Ophoven. Il doit vraisemblablement s’agir de l’actuelle Venlosesteenweg traversant les deux communes, voisines l’une de l’autre.

De là, Pieter KOOLEN, un policier habitant Dorpstraat à Ophoven, guide les quatre hommes chez Jean HILVEN au 74 Genitstraat à Meeuwen, pour que celui-ci les mène chez Gertrude "HENDRIKX" à Maaseik. La liste des Helpers belges mentionne Gertrude HENDRICKX à la Dorpstraat à Ophoven. Broman reste caché chez elle jusqu'au 23 novembre pour être ensuite guidé jusqu'à Liège par Léopold et Anna ERCKENS (habitant au 95 Langstraat à Elen, entre Maaseik et Dilsen-Stokkem).

Les quatre hommes sont menés à Liège le 23 novembre en fin d'après-midi au 1er (2e?) étage d'un immeuble à appartements où ils rencontrent deux sergents de l'US Air Force qui y étaient arrivés peu de temps auparavant. Leur guide, un résistant, assez petit et mince, parlait français, anglais et ce que Repp pense être du néerlandais. Les aviateurs explorent les lieux et constatent, pas à leur aise, que la seule issue en cas de besoin est l'escalier par lequel ils ont eu accès à l'appartement. Ils s'installent au salon, leur guide va dans la cuisine préparer de quoi manger, l'un des sergents se rend aux toilettes au rez-de-chaussée. Soudain, le guide se rue sur le palier, crie un avertissement, sort un pistolet automatique et tire cinq ou six coups en direction de SS allemands montant l'escalier. Les SS ripostent en tirant, sans toucher personne, alors qu'ils redescendent les escaliers, tandis que le guide saute par la fenêtre de la cuisine, atterrit sur le toit d'une remise et s'échappe en courant. Le bâtiment avait été manifestement surveillé et les allemands avaient vu entrer le guide belge et les quatre hommes. N'en voyant que trois à l'étage, ils cherchent le quatrième qu'ils retrouvent en bas. Les quatre aviateurs, craignant pour leur vie car ils sont habillés en civil, sont alignés contre le mur du salon et voient revenir le guide peu après, le visage gonflé et tuméfié. Ils pensent que c'est davantage dû à la brutalité des SS qu'à une éventuelle chute.

Les trois sous-officiers sont amenés à la Prison de Saint-Gilles à Bruxelles, où ils sont placés dans une même cellule exigüe.

Broman passe d'abord par une base aérienne de la Luftwaffe dans la région, où on le met au secret dans une cellule. Comme ses geôliers n'ont pas découvert la lime de son kit d'évasion lors de sa fouille, il s'attaque aux barreaux de sa cellule. Il n'a pas beaucoup avancé dans ce travail lorsqu'on vient le chercher pour le transférer vers la prison de Saint Gilles à Bruxelles.

Broman est mis, à nouveau au secret, dans la cellule voisine de celle de Repp. Ils sont questionnés quasi quotidiennement quant à l'identité de leurs helpers. Comme les autres, Repp se contente de décliner nom, grade, n° de matricule.

Peu de temps avant Noël, Broman exige via un gardien un entretien avec le commandant allemand de la prison pour se plaindre du traitement infligé par les hommes de la Gestapo, que détestaient même les soldats de la Wehrmacht qui apportaient la nourriture aux détenus. Un matin, il répète sa demande à un des gardes et il finit par voir le chef de la prison, un colonel de la Wehrmacht, qui le reçoit en compagnie d'un interprète. Broman invoque l'approche des fêtes de Noël, joue la corde sensible, déclare que lui et ses trois compagnons sont des aviateurs, pas des espions et qu'il serait bien qu'ils puissent passer les fêtes en compagnie d'autres aviateurs dans un camp de prisonniers, plutôt que de continuer à pourrir dans cette prison infâme. Il ajoute que leur conscience ne les ferait jamais donner les noms de leurs helpers, même s'ils les connaissaient et conclut en flattant l'officier dont il se dit certain qu'il a l'autorité pour les transférer.

Le colonel ne réagit pas et Broman est reconduit dans sa cellule. Dans l'après-midi, il est conduit dans la cellule de Repp et des deux autres et un jour ou deux plus tard, Broman et les trois sergents sont conduits en train vers le centre d'interrogation de la Luftwaffe, le Dulag Luft à Oberursel près de Francfort.

Comme des bombardements de la RAF avaient touché Francfort dans la nuit du 20 au 21 décembre et que beaucoup d'appareils avaient été abattus, le flux de nouveaux prisonniers fait que par manque de place, nos quatre aviateurs sont dirigés à pied vers un autre camp que celui qui leur était destiné, toujours dans la région de Francfort.

En cours de route, Broman aide un aviateur canadien, fortement blessé à un pied et à une cheville, à continuer à avancer. Des civils allemands jettent des briques sur le groupe, mais ne visent pas Broman et le canadien. Les gardes allemands n'empêchent pas les jets de pierres, mais interdisent de frapper les prisonniers.

Arrivés au camp, ils peuvent se savonner sous une douche chaude, on leur donne des uniformes propres venant des Croix Rouge canadienne et américaine, via la Croix Rouge Internationale.

Après avoir passé la Noël à quatre dans ce camp, les trois sergents sont transférés au Stalag XVIIB près de Krems, en Autriche. Broman, lui, est transféré en train vers le Stalag Luft 1 à Barth où il reste jusqu'à la libération du camp par les troupes russes du Maréchal Rokasovky en début mai 1945.

Eldon Broman rejoint alors brièvement son unité à Horham avant d'être rapatrié aux Etats-Unis sur un navire hopital. Retraité de l'US Air Force comme Lieutenant-Colonel, il décède en 2012 et repose au cimetière Cleburne County Memorial Gardens à Heber Springs, Arkansas, USA.


L’équipage du Lt Eldon BROMAN (au milieu, devant).


Plaque mémoriale de l'équipage au 8th AF Museum Memorial Gardens, 8th Air Force Museum, Pooler, Georgia, USA.


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters