Aviateur de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 24 juillet 2021.

Henry Francis COLT Jr. / O-718249
40 Heath Hill, Brookline 46, Massachussetts
Né le 19 février 1924 à New York City / † le 1er décembre 2012 à Easthampton, Massachusetts, USA
2 Lt, USAAF 305 Bomber Group 365 Bomber Squadron, navigateur
Atterri vers midi à l’est de Clabecq, entre ce village et Braine-le-Château
Boeing B 17G-55BO Flying Fortress, 42-102645, KY-A, abattu par un FW 190 le 9 août 1944 lors d'une mission sur Munich détournée sur Karlsruhe
Ecrasé à Zegelsem, entre Brakel et Renaix/Ronse (Flandre Orientale), Belgique.
Durée : 4 semaines
Camps Marathon : Bellevaux et Acremont

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 8067. Rapport d'évasion E&E 1961 disponible en ligne.

L'appareil décolle de Chelveston à 06h00 heure anglaise. Les bombes à peine larguées sur l'objectif, le B-17 est touché par la Flak. Attaqué ensuite par un chasseur Fw190, ses ailerons ne peuvent plus être contrôlés, le moteur gauche est en feu et le pilote Clayton E. Child donne l’ordre de quitter l’avion.

Outre Henry Colt (la présente fiche), trois autres parviendront à s’évader, le 1 Lt Harold Kilmer, bombardier, le S/Sgt Andrew Kuhn, mécanicien et mitrailleur dorsal et le co-pilote Lt Kenneth French (E&E 1756 – atterri près de Braine-le-Château, aidé par Emile Crispeels de cette localité et renseigné comme ayant séjourné dans des fermes à Hal et Enghien et interrogé le 7 septembre 1944 par l’I.S.9.)

Deux membres de l’équipage ont trouvé la mort dans le crash de l’appareil, l’opérateur radio S/Sgt John B. Dubinskas et le mitrailleur dorsal Sgt John R. Waldren. Le pilote Clayton Child sera fait prisonnier, tout comme le mitrailleur arrière Sgt Jerry R. McEldowney et le mitrailleur latéral droit, le Sgt Grady Lucus Jr. Ces deux derniers sont rapportés comme décédés durant leur détention. Il semble que Lucus et McEldowney auraient été abattus par des soldats allemands. Les circonstances de la mort de Mc Eldowney et Lucus ne sont pas clarifiées. La mention de la découverte de leurs corps dans les décombres de l’appareil à Zegelsem, ainsi que de leur inhumation à Oudenaarde, provient du MACR, qui reprend la traduction de documents établis par les autorités allemandes… qui n’auraient jamais déclaré officiellement que les aviateurs ennemis auraient été abattus dans leurs parachutes ou après leur atterrissage… Jerry Robert McEldowney repose au Cimetière Américain des Ardennes à Neuville-en-Condroz, Belgique. Les restes de Grady Lucus ont été rapatriés aux Etats-Unis en 1949 ; ils reposent au East View Cemetery à Vernon, Wilbarger County, Texas.

Nous reprenons ici ce qui figure à l’E&E de Colt, qui indique qu’après son atterrissage dans un petit jardin à la lisière de Clabecq vers midi, Henry Colt abandonne son parachute dans un arbre et le restant de son équipement est caché par des Belges, qui l'attendaient avec des vêtements civils. Des gens ont vu sept parachutes dans le ciel. Lui signale n'en avoir vu que 5 et qu’il a retrouvé son mécanicien Kuhn après trois jours.

Colt se cache toute la journée dans un bois et trouve encore de l'aide dans la soirée, sous la forme d'un fermier qui vient le chercher et dès ce moment "son évasion est organisée".

La nuit du 9 août, il indique avoir été emmené à Braine-le-Château où il reste chez Mme "la parmentaire" (La liste des Helpers belges reprend simplement "Mme PARMENTIER" à Braine-le-Château, sans autres détails… - voir ci-dessous). Grâce à des témoignages repris dans des ouvrages édités à Braine-le-Château, en 2002, "Dix années troublées de 1935 à 1945" de Georges Pické (pp. 216-217 et 162-163) et en 1994 dans "L'album de la libération" (pp.104-105), sources que nous a transmis André Desmet en mai 2019, nous en savons un peu plus sur les premiers jours de l’évasion de Henry Colt.

Aux pages 216 et 217 de "Dix années troublées de 1935 à 1945" paru en 2002, figure un témoignage de Marie-Thérèse BERTOUX-GRIMMELPREZ, fille des époux GRIMMELPREZ-VANDEVILLE et relatant l’aide apportée par ses parents à l’aviateur "Harry" Colt. Ce récit, dont la chronologie et certains détails ne correspondent pas à la version reprise ci-dessus, rapporte que les parents de Marie-Thérèse travaillaient dans l’après-midi du 9 août 1944 sur leur champ, situé entre le bois de Lembeek et la Rue St-Véron. Ils virent six hommes sauter en parachute d’un avion volant assez bas et semblant en difficulté. Vers 16 heures, le couple fut intrigué par des bruits de branchages brisés provenant de la lisière du bois et vit apparaître un homme revêtu d’une veste de toile bleue, le reste de son habillement étant de couleur beige. Ils apprirent plus tard que la veste avait été donnée par "un habitant de Clabecq" à un aviateur qui se cachait dans un champ derrière chez lui. Les époux GRIMMELPREZ amenèrent l’aviateur chez eux (la liste des Helpers belges reprend Achille GRIMMELPREZ au 20 Rue Saint-Véron à Braine-le-Château). Madame GRIMMELPREZ précédait les autres à quelque distance pour s’assurer que personne ne puisse les voir. Tout se passa sans encombres, mais la recherche de vêtements civils pour Colt fut assez problématique, sa taille ne correspondant pas à celle d’Achille et le pantalon de ce dernier laissant les mollets de Colt à nu.

Après lui avoir servi une omelette au jambon, on mena Colt, muni de chaussures d’Achille, beaucoup trop petites, chez les grands-parents de Marie-Thérèse, au sentier des Meurisses, tout proche. Entretemps, Marie-Thérèse avait été envoyée chez le Résistant Raoul LEROY (10 Grand’Place, Braine-le-Château) où elle se trouva en présence d’un inconnu qui discutait avec Raoul. Avisé du problème de l’aviateur, Raoul renvoya Marie-Thérèse chez elle, disant qu’il passerait dans la soirée chez ses grands-parents. Raoul passa donc là dans la soirée, accompagné de Robert MUSCH. Colt était caché dans un champ proche, non moissonné, souvent visité par la grand-mère s’enquérant de ses besoins. Selon le récit de Marie-Thérèse, Raoul LEROY et Robert MUSCH emmenèrent alors Colt chez Emilia PARMENTIER, qui vivait avec sa sœur Denise à la Rue de la Vallée.

Le lendemain, Emilia se débrouilla pour trouver à Colt des vêtements à sa mesure. Ils furent offerts par Madame FORTEMPS, épouse d’Armand, qui les remit à l’aviateur, dont le costume de son fils qui se trouvait alors au Congo Belge. Ainsi vêtu plus correctement, Colt fut pris en photo par les neveux d’Emilia. Les clichés pris par Monsieur PIERARD, dont celui-ci-dessous, ne furent développés qu’après la Libération, en septembre 1944. Colt fut ensuite pris en charge par Achille LEONARD, qui, à vélo, le conduit jusqu’à Braine-le-Comte. (Liste des Helpers belges : "Achille LEONARD" et "Mme & Max LEONARD", à Braine-le-Château, sans autres détails…)


Photographie de Henry Colt, revêtu de vêtements civils, prise par un Mr Pierard
dans le jardin d'Emilia Parmentier, 6 Rue de la Vallée à Braine-le-Château
(Document reçu en mai 2019 d’André DESMET)

Selon le récit de Marie-Thérèse, Colt fut ensuite pris en charge par Achille LEONARD, qui, à vélo, le conduit jusqu’à Braine-le-Comte. Son récit se termine en reprenant l’adresse à Boston que Colt leur avait donnée, ajoutant "qu’un message de la BBC nous apprit qu’il avait rejoint la Normandie dès le 18 août"… [ Ce dernier détail est erroné, le rapport d’évasion de Colt indiquant qu’il a été interviewé le 10 septembre 1944 après la libération du camp secret dans les Ardennes par des troupes américaines.]

Dans le livre de François De Troyer, "Tenace Mémoire" Résistance et espionnage en Brabant Wallon-1989, page 128(1) est cité le résistant Émile Balligand du refuge OURS. Celui-ci, en 1943 organise deux nouveaux gîtes (chez Mr du Bois de Roest et chez Mr Duvivier). Le couple habitait chaussée de Nivelles, 166 (n° 40 avant 1947) à Braine-l'Alleud, non loin de la ferme de l'Alliance, Chaussée de Charleroi, 1 Plancenoit à proximité du lion de Waterloo ( +/- 1,5 km à travers champs). C'est probablement ici à l'Alliance que les évadés étaient regroupés. Un chemin de campagne reliait en ligne droite ces deux lieux. Ce qui conforte l'idée du choix de la résistance pour le gîte chez Madame du Bois (Madame du Bois Germaine née de Roest d'Alkemade épouse Ernest du Bois (Revue Brania 2012/1-2, pp. 90-91).

Cet endroit est encore une fois cité dans le livre de François De Troyer " L'impossible oubli" Récits de la Résistance et de la collaboration en Brabant Wallon - 1987, page 43 : Dans la description "Les actions de l'Armée Secrète" est cité l'aide apportée aux parachutistes tombés à Braine-le-Château et en particulier "le second aviateur fut conduit à "l'Alliance" à Waterloo, pour être intégré dans une chaîne d'évasion vers la Grande Bretagne".

Reprenons ici, le rapport d’évasion de Colt : Le 10 au soir, il va chez un(e) ami(e) qui habite à 100 mètres de chez Madame PARMENTIER. C'est là que Kuhn fait son apparition le 12 août. Kuhn rapporte simplement dans son E&E que Colt et lui ont passé une nuit chez une Madame DUBOIS… Ils sont ensuite guidés vers Bruxelles par un guide de EVA, "Max" (Charles BOURDILLOUD), et vont alors loger ensemble 10 jours chez Gaston "Schafs", en fait Gaston SCHOFS au 25 Rue Victor Oudart à Schaerbeek. Il se confirme qu’ils sont hébergés par SCHOFS du 14 au 22 août 44.

Pris le 22 août 1944 chez SCHOFS à Schaerbeek par Yvonne BIENFAIT, infirmière à l’Hôpital de Schaerbeek, et évacué le même jour en train avec Jacques BOLLE vers Namur, Colt arrive au camp de Bellevaux (Kuhn indique qu’ils ont fait le voyage ensemble). Son rapport indique qu'il est conduit dans un camp "entre Massin et Valliances" (Maissin et Villance à hauteur de Daverdisse et Porcheresse), où il rejoint 5 autres aviateurs. Ils sont ensuite placés en forêt de "Lucy à l'Est de Acremont" (Forêt de Luchy, à Jehonville). Ils y restent avec 18 autres aviateurs jusqu'à la libération par des troupes américaines.

Colt est débriefé par le major d’Infanterie Irwin Luiten le 10 septembre, jour où il rentre à Londres. Il avait appris de Kilmer à Paris que le mitrailleur arrière Sgt Jerry R. McEldowney aurait été arrêté. Les archives américaines, qui reprennent bien McEldowney dans les listes de prisonniers, indiquent seulement qu’il est décédé durant sa détention.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters