Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 3 avril 2019.

Rasse Philippe Albert Enguerran de LIEDEKERKE

Né à Londres, le 17 février 1915 / † à Bruxelles le 20 février 1997
Activité en mai 40 : Officier de carrière, campagne de mai 40 à l'artillerie.
Mission SOE HERZELLE, mission CLAUDIUS-TYBALT. Liaison et coordination entre Londres et Résistance (FI et AS).
Pseudonymes/Noms de guerre : Collie, Claudius-Théo-Philippe Levain-Collie-Désiré-Valentin-Prosper.
Zone d'activité : Belgique, depuis Bruxelles.
Tutelle : Sûreté de l'Etat - Section T du SOE. Genre : Renseignement - Sabotage.
Passage des Pyrénées : le 19 septembre 1943

Informations complémentaires :

Dossier Archives Notariales Défense OO/37200 + Dossier ARA.

Il entre à L'Ecole Militaire le 28 novembre 1934 et est sous-lieutenant de carrière en 1939 dans l'artillerie.

Capturé le 29 mai 1940 et échappé, il quitte la Belgique occupée en isolé le 1er octobre pour rejoindre la direction belge des dépôts de matériel à Toulouse ou Montpellier. Il est à Vichy en décembre 1940, puis en Suisse, et à Marseille en janvier 1941. Là, avec Hugues Regout et Georges de Menten de Horne, ils embarquent clandestinement pour Alger. En Algérie, ils sont mis en résidence surveillée près de Mascara de février à mai 1941. Avec un officier de marine français, ils "empruntent" un yacht à Oran et débarquent cinq jours plus tard, de nuit, près d'Almeira en Espagne. Après un repas, ils reprennent la mer jusque Gibraltar. Ils y furent d'abord incarcérés comme espions. Du 26 août au 29 septembre 1941, il perçoit des soldes à Gibraltar. Il arrive en GB, à Malvern, le 12 octobre 1941.

Il y devient agent ARA pour trois missions : du 01 mars au 30 septembre 1942, du 15 juillet au 31 décembre 1943 et du 08 février au 31 juillet 1944.

1° Mission HERZELLE (obtenir des renseignements sur le FI et l'AS) : parachuté au nord-ouest de Marche-en-Famenne le 02 mars 1941 avec le radio Roger "Tiger" Cerf [arrêté le 08 mars et fusilllé le 04 août 1942 - tombe n°44 au cimetière secret de Hechtel], il interroge les chefs du Front de l'Indépendance et de l'Armée Secrète. Le commandant Claser et lui sont guidés dès le 09 avril en France par Julie Delwiche, en train jusque Besançon et en bus jusque Salins-les-Bains. Ils traversent à pied la forêt d'Arbois sur la ligne de démarcation et prennent un train de Lyon à Montpellier. le réseau Sabot les conduit alors via Toulouse à Perpignan. Un guide les fait passer en Espagne. Le 03 mai 1942, ils sont arrêtés dans le train pour Cerbère. Après leur libération de Miranda, ils se rendent à Lisbonne et puis à Gibraltar. Le 10 juillet 1942, ils sont de retour à Londres.

2° Mission CLAUDIUS-TYBALT (FI et MNB pour financer et organiser aide aux réfractaires et sabotage) : parachuté au nord-ouest de Namur le 15 juillet 1943 avec le radio anglais Alfred "Pointer" Blondeel [qui reviendra en Angleterre par la ligne Félix], avec 2 millions FB en liquide et diamants et des radios "Eureka" pour les largages. Il revient de cette mission par Comète et arrive en Angleterre le 04 octobre 1943.

Il n'a pas logé à l'auberge Larre de Marthe MENDIARA-VILLENAVE, mais fut invité chez les HOUGET à Biarritz, comme le montrent les photos ci-dessous.

Il devait traverser la Bidassoa avec François-Xavier Harkins et John O'Leary dans le 56e passage de Comète via la ligne de Saint-Jean-de-Luz et la Bidassoa, les trois évadés seuls avec les guides basques.

Il semble clairement avoir traversé dans le 57e passage, encore une fois via la Bidassoa. de Liedekerke a certainement quitté les aviateurs avant la prise en charge par le consulat britannique, ne pouvant dévoiler au MI-9 qu'un agent du SOE avait emprunté la ligne Comète.

Notre camarade Peter Verstraeten, qui étudie le SOE, nous signale qu’il a a trouvé dans le cadre de la mission CLAUDIUS-TYBALT, une interview de Philippe de Liedekerke datée du 25 octobre 1943 et se trouvant dans un dossier SOE (HS9) aux archives anglaises de Kew, nous fournit les informations suivantes :

Philippe De Liedekerke est un jeune officier belge qui passa deux mois en territoire occupé. Sa mission consistait à entrer en contact, en Belgique, avec les organisations de Résistance F.I.L., M.N.B. et le Groupe G de manière à leur apporter un soutien financier, de discuter de leur façon d’agir et de leur rôle lors du Débarquement. Il devait également contacter les services SOE en Belgique.

Son périple au départ de l’Angleterre aura duré 81 jours dont 11 furent passés en Espagne. Il voyagea avec un groupe d’aviateurs alliés du fait que l’un de ses contacts le renvoya en Angleterre via une ligne d’évasion utilisée par la R.A.F. Il parvint à éviter les autorités espagnoles, et arriva sans encombre à Madrid. Au cas où il serait capturé, on lui avait dit de se faire passer pour un soldat canadien. Il s’opposa à cela étant donné que les officiers étaient généralement conduits dans des hôtels et relâchés alors que les autres gradés étaient emprisonnés en attentant que l’on se renseignait à leur sujet.

La ligne d’évasion qu’il utilisa, est, ou était, connue sous le nom de la Ligne d’Évasion Dédé. Il la décrit comme une très bonne ligne. Les membres de son groupe ne furent pas contrôlés une seule fois et ne rencontrèrent pas de grandes difficultés, excepté le fait que les aviateurs de la R.A.F. et américains n’étaient pas habitués de marcher, et avaient un tel manque d’entraînement qu’ils s’écroulaient et qu’il fallait les porter. Le voyage ne durait cependant que neuf heures et, le lendemain, ils étaient tellement fatigués qu’ils ne réalisaient absolument pas qu’ils avaient franchi les Pyrénées. Philippe de Liedekerke était incapable de se souvenir de l’itinéraire parcouru car la traversée eut lieu dans l’obscurité totale et sous une forte pluie. Il n’avait eu qu’à suivre le guide.




Philippe de Liedekerke et Jean-François NOTHOMB photographiés à Biarritz
avec Denise Houget chez les parents de cette dernière.

Le groupe quitta Saint-Jean-de-Luz le 22 septembre à 19h00 et franchit la frontière durant la nuit. Le lendemain, ils se réfugièrent dans une ferme avant de prendre le tramway à San Sebastian où une voiture vint les prendre pour les conduire à Madrid.

Philippe de Liedekerke déclara qu’il avait reçu l’instruction d’envoyer un message radio lorsqu’il voulait retourner au Royaume-Uni mais il ne le fit pas de crainte de devoir attendre trop longtemps pour être pris en charge par une ligne d’évasion.

Grâce à ses propres contacts, il quitta Bruxelles le 13 septembre avec un compagnon. Ils prirent un train pour Mons et poursuivirent leur voyage en tramway jusqu’à Erquennes, un petit village à la frontière française. Ils traversèrent, à pied, la frontière durant la nuit. Au matin, ils rejoignirent le train Bruxelles-Paris, à son arrêt, à la frontière. Ils arrivèrent à Paris, le 14 septembre au soir, et y furent rejoint, à la gare, par un contact français nommé LEGRELLE (il pourrait s’agir de Jacques LE GRELLE qui dirigeait le secteur Comète de Paris, mais ce n'est pas certain). Alors qu’ils étaient à Paris, de Liedekerke descendit à Épernay pour deux jours afin d’y rencontrer l’une de ses relations qui vivait là-bas. Il s’agissait de M. SERVAGNAT, le chef local de "Ceux de la Résistance" [Mr & Mme Pierre SERVAGNAT, 73 Avenue de Champagne, Epernay (Marne) – Grade 5 - Il s’agit du colonel Pierre Servagnat qui avait épousé une Belge, Fernande Nieuwenhuys, qui sera déportée à Ravensbrück d’où elle reviendra.]. Il le décrivit comme étant un très brave homme, et ce fut lui qui le mit sur la route d’évasion par laquelle il traversa les Pyrénées. [Or, il déclare avoir déjà rencontré un contact] Après quelques jours à Paris, ils prirent le train pour Bayonne, dotés de papiers d’identité français.

Il effectuera par après une 3° Mission : SCIPION.

Avec André Wendelen, il sont les seuls agents ARA belges à avoir été parachutés et être revenus trois fois des territoires occupés. Mis à la disposition du ministère des Affaires Étrangères (ambassade de Belgique à Londres) le 21 septembre 1944, il entame une carrière diplomatique. Tous deux étaient des hommes de confiance du gouvernement en exil et avaient des relations dans les cercles les plus élevés.

Merci à M. Charles-Albert de Behault pour ses informations additionnelles.


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters