Dernière mise à jour le 15 mai 2017.
Arthur Frederick KELLETT ("the Spaniard") / 1258269 & 176209
c/o 26 Telford Avenue, Londres SW2.
Né à Astillero-Santander, Espagne, le 28 septembre 1920 (de mère espagnole) / † le 16 juillet 1988 à Madrid, Espagne
Sgt, RAF Bomber Command 15 Squadron, bombardier.
Lieu d'atterrissage: dans le Limbourg néerlandais.
Short & Harland Stirling Mk.III, EF348, LS-N, abattu la nuit du 22 au 23 juin 1943 par des chasseurs allemands, lors d’une mission sur Mülheim.
Ecrasé à 600 m à l’ouest de Kessenich, (Limbourg), 16 km ENE de Bree, Province de Limbourg, Belgique.
Durée : 4 mois ½.
Passage des Pyrénées : le 1er novembre 1943.
Rapport d'évasion SPG WO208/3317-1602 et WO208/5582-1602 pour l'Appendix C.
Le Stirling décolle de Mildenhall vers 23 heures et demi le 22 juin et ne peut arriver sur la cible par manque d'essence. Il est attaqué par un chasseur allemand qui endommage un des moteurs gauche vers 01:00 ou 01:30Hr durant le vol de retour. Un second chasseur l’achève en touchant le moteur voisin entraînant un embrasement de l’aile gauche. Deux pilotes allemands du 7/NJG 4, l’Oblt Hans Autenreith et l’Uffz Adam Rolf sont crédités de cette victoire. L’appareil s’écrase dans un champ près de Kessenich à 1h35 le 23 juin. Le pilote, Sgt Jack William Newport, 20 ans, et le mitrailleur arrière Sgt Wilfred Chalmers Macauley, 21 ans, trouveront la mort. Ils reposent tous deux au Heverlee War Cemetery près de Leuven / Louvain en Belgique.
Parmi les cinq autres membres de l’équipage, seuls Arthur Kellett (la présente fiche) et le navigateur P/O Donald Ivor Turner (RCAF) réussiront leur évasion. Le F/Sgt D.S.P. Roberts, le Sgt T. Mosedale et le mitrailleur John George Damboise (RCAF), initialement évadés, seront arrêtés, ce dernier étant tombé dans le piège de la fausse ligne "Capitaine Jackson" du traître belge Prosper Dezitter et capturé à Bordeaux le 29 juillet 1943.
Kellett atterrit dans un champ couvert de paille. Comme il avait été suivi durant sa descente par un phare de recherche, il ne perd pas de temps à enterrer son parachute. Il s'enfuit vers le Nord durant 5 km avant de se rendre compte que sa boussole est hors d'usage. Il poursuit ensuite vers l'Ouest. Il marche sans demander d'aide quatre nuits, en dormant dans des granges la journée. Il pense qu'il est en Allemagne quand il entend les gens parler le flamand et évite toute agglomération. Comme il avait omis de prendre sa ration de survie, la faim et la soif se font sentir.
Il croit avoir traversé la frontière non loin de Tongerloo, en passant à travers ce qui lui semble être un champ de mines anti-char non recouvertes de terre. Le 28 juin, vers 6 heures et demi, il voit une maison isolée et qu'il croit vide. Un chien aboie à son approche et un homme apparaît. Ce dernier lui demande s'il est allemand et lui fait comprendre de montrer une boite d'allumettes. Heureusement, Kellett en a une en poche et les marques anglais rassurent l'homme, qui lui indique alors une maison et lui fait comprendre d'y demander de l'aide.
Dans cette maison, Kellett est accueilli par un homme, son épouse et leur deux filles. Il reçoit du pain et du lait, son premier repas depuis le 22 juin. Ayant reçu des vêtements civils usagés, il est conduit pour aller dormir dans une meule de foin. Vers 17 heures ce 28 juin, une jeune fille d'environ 12 ans vient demander à Kellett quelques détails personnels. Le lendemain, il reçoit la visite de sa mère, qui peut parler anglais. Kellett est alors dirigé dans une autre maison. Il y reste trois jours avant d'être guidé vers une ferme à 5 km de là. Il y reste quinze jours, se cachant la journée dans une meule de foin et rentrant dormir la nuit dans la ferme. Il reçoit fréquemment la visite de la mère de la jeune fille, qui lui avoue ne pas savoir quoi faire de lui. Kellett lui propose de poursuivre sa route vers la France. Finalement, elle lui apporte d'autres vêtements civils et lui arrange son convoyage à vélo vers Maaseik. Elle lui dit être surnommée "Bluebird". Il s'agit en fait de Ada Tita (Marie Joséphine) BEMELMANS, l'épouse du Dr Michel GROENEN, née de parents britanniques à Patirada (une plantation de caoutchouc au centre de Ceylan, aujourd'hui Sri Lanka) en 1906.
Des archives nous apprenant qu’Arthur Kellett est remis le 10 juillet 1943 par le Dr Michel GROENEN (qui, surveillé, ne peut le garder chez lui à Kinrooi) à Simone GAZET, une amie dont le père est d'origine brugeoise. Elle guide Kellett en tram de Maaseik à Liège. Là, ils embarquent dans le train Cologne-Paris de 16Hr30 et descendent à Charleroi. Kellett loge finalement chez elle au 66 Allée du Beau Chéniat (Kellett indique le 21 Rue Centrale dans son Appendice C) à Loverval jusqu'au 2 octobre 43. Simone GAZET ne sachant où l'évacuer ensuite, elle le confie d'abord à des amis sûrs, surtout après l'arrestation de Marie BEMELMANS (le 26 juillet).
Un dénommé Maurice le guide à Bruxelles. Kellett loge dans un appartement de Maurice au 36 ou 38 Rue "T'Ken" (Rue 'tKint) à Bruxelles. Ledit Maurice passe la plupart du temps dans le restaurant Au Grand Roi, non loin de la Bourse et nourrit Kellers, l'emmenant parfois en promenade. Sur ces entrefaites, Simone GAZET a eu le temps de contacter un certain BORRET à Namur. Ce BORRET vient attendre Arthur Kellett et Simone GAZET vers le 28 août à la gare de Namur. Là, Kellett apprend qu'il ne peut êre évacué via la France et partirait le lendemain vers la Suisse. De plus il reçoit une nouvelle carte d'identité où sont apposées des photos faites à Charleroi. Mais BORRET change constamment la date de son départ vers la Suisse et GAZET revient après une semaine lui annoncer qu'il partirait vers l'Espagne et non la Suisse. Elle le reprend donc chez elle à Loverval (Charleroi) et lui annonce que toutes les lignes sont bloquées suite à l'annonce d'un débarquement. A Loverval, Kellett est assez libre de ses mouvements et rencontre parfois un chef local de la Gestapo qui le salue. Sa carte d'identité n'est jamais inspectée.
Durant ce second séjour à Charleroi, Kellett entend parler de la "fameuse légende" d'une ligne d'évacuation par air. Au début d'octobre, GAZET le conduit dans un couvent des Sœurs de la Charité. Là, une infirmière devait le conduire à l'avion. Ils vont en tram à Mons, et de là à sa maison à Ath. De là, l'infirmière et Kellett partent à vélo rejoindre deux résistants. Ils vont ensuite dans un village à une dizaine de kilomètres, où Kellett loge chez le curé 4 ou 5 jours. La fable de l'évacuation par air ayant fait long feu, il est visité par un chef de Résistance bruxellois qui vient lui demander quelques renseignements et le prend en train à Hal/Halle. Dixit Kellett dans son Appendix C.
Après examen d'archives, nous pouvons expliquer que Rolande CRUSIAU, Infirmière du 14 Place à Bois-de-Lessines, amène Kellett de l'Institut Reine Élisabeth, Rue de la Science à Charleroi, chez son père Julien CRUSIAU, habitant au 93 Rue de l'Hôtellerie à Lessines. Kellett dort chez lui et est conduit le lendemain chez l'abbé Louis LEMIRRE, curé de Meslin-l'Evêque, qui héberge Kellett alors trois semaines chez lui. Rolande CRUSIAU rencontre Émile ADAM, chef local du Groupe G d'Ath, chez l'abbé Louis LEMIRRE. ADAM lui communique alors le lieu de rendez-vous de Léo VAN BEL et Octave WERY à Bruxelles.
Le commandant Octave WERY signale Kellett à François HANSSENS au 14 Avenue des Tulipes / Tulpenlaan à Hal/Halle et Jeanne MACINTOSH va le récupérer "à Liège le 7 octobre". [? sic] Dans sa déclaration Kellett déclare se souvenir d'avoir vaguement connu Jeanne (il l'appelle Yvonne) un peu avant la guerre quand il fréquentait l'école à Herne Bay, et la revoir à Halle.
Kellett reste deux jours chez Jeanne MACINTOSH (en fait, chez Robert et Marie GOFFAUX, l'oncle et la tante de Jeanne, au 107 Chaussée de Mons / Bergensesteenweg à Lembeek (Halle). Jeanne, qui habitait à Londres, était venue en visite en 1939 chez cet oncle garagiste et son épouse Marie. Vu l’invasion allemande et l’occupation du pays, elle n’eut pas l’occasion de rentrer en Angleterre. Robert GOFFAUX étant Résistant, Jeanne était entrée elle aussi dans le circuit, recueillant des informations militaires et, à partir de 1942, aidant des aviateurs dans leur évasion. Pour plus d’informations sur Jeanne MACINTOSH, ses oncle et tante et François HANSSENS, voir la page de Frank Andrews. Durant ce temps, Kellett dit recevoir la visite d'un certain "Gaston" de Bruxelles, parlant l'anglais. Après deux jours, deux résistants locaux le conduisent chez un tailleur de Halle pour une nuit et ensuite dans une maison dont la propriétaire possède un magasin de lingerie. Les deux mêmes hommes le conduisent finalement à Bruxelles.
Les dates sont contradictoires mais VAN HEMELRIJK (VANHEMELRYK ?) dit bien que Jeanne Macintosh a pris Kellett en charge le 4 octobre. Kellett est renseigné comme logeant ensuite deux jours chez François HANSSENS à Hal, qui le remet à Auguste VAN HEMELRIJK - (chef de la sous-section de EVA-Soignies) à Hal. VAN HEMELRIJK/VANHEMELRYK (adresse selon la liste des Helpers belges établie peu après le conflit : 357 Edingensesteenweg, Lembeek - Halle) est occupé à organiser une chaîne d'évacuation de dédoublement de EVA par Hal, Enghien et Ath.
VAN HEMELRIJK remet donc Kellett à Joseph GHIGNY au 112 Auguste Demaeghtlaan à Hal/Halle, et ils vont ensemble chez Jean DECLEYN, 287 Brusselsesteenweg, Halle, où Kellett est encore logé. Comme DECLEYN est un peu suspect aux yeux des Allemands, GHIGNY va placer Kellett chez Mlle Christine SCHIEPERS, Rue aux Bois à Hal (actuellement Boslaan, Halle). Après quelques jours, VAN HEMELRIJK guide Kellett à Bruxelles.
Les archives du Groupe EVA renseignent Arthur Kellett comme réceptionné le 2 octobre 1943 [certainement son interrogatoire à Halle] et confié le 7 octobre par Gaston MATTHYS à René PONTY. Kellett déclare être passé par le magasin d'un marchand de poisson (il s'agit, bien-sûr, du centre d'accueil de EVA chez Prosper SPILLIAERT au 394 Chaussée d'Anvers à Bruxelles) ; il ajoute y avoir été interrogé par une homme et une femme (René PONTY et Marie Eugénie JADOUL), qui le conduisent ailleurs, dans une maison ou Kellett rencontre Robert Kellow et une "Lili". Simone GAZET avait expliqué à Charleroi qu'il se pourrait qu'elle reçoive encore d'autres aviateurs de Campine, et Kellett transmet donc cette information à "Lili", en expliquant le problème des délais qu'il a connu.
Le 15 octobre, Kellett doit être guidé par René PONTY et Marie Eugénie JADOUL pour être passé d'EVA à Comète. Anne BRUSSELMANS leur remet 900 FB pour les frais d'EVA. René PONTY vient aussitôt rendre une visite à Simone GAZET à Loverval, en compagnie de Aline DUMONT ("Lili", "Michou"), qui vient en fait voir d'où il provient, et recruter ainsi une "rabatteuse" qui a des relations en Limbourg pour Comète. A cette occasion, Simone GAZET présente Jeanne MACINTOSH à Aline DUMONT. De son côté, Kellett déclare bien que c'est lui qui a présenté Simone GAZET à Aline DUMONT, avant d'être logé chez elle cinq jours.
Le 20 octobre, Aline DUMONT présente à Frederick Lawrence, Stanley May et à Harold Hudson, un sergent RAF "fils d'un Anglais et d'une Espagnole" (Arthur Kellett, donc). Herbert Penny et un Américain arrivent 15 minutes plus tard. Kellett reste la nuit chez Aline DUMONT, avec May, Hudson et Lawrence. Nous comprenons : il loge au centre de rassemblement chez Hélène CAMUSEL au 160 Rue Marie-Christine à Laeken.
Vers la mi-octobre, Kellett se dit guidé par "Lili" avec un autre aviateur anglais vers un village près de la frontière française. Il fait nuit, mais il reconnaît la gare d'Ath et se souvient qu'ils descendent du train après Tournai pour rejoindre ce village à pied. Kellett est renseigné comme escorté au passage de la frontière française par Henriette HANOTTE. Il dit qu'ils passent en France vers 22Hr30 et rejoignent une maison où ils reçoivent de nouveaux papiers d'identité. Il y change 1000 FB en francs français, n'en recevant que pour 500 FB et laissant le reste aux guides. Ils vont dans un café et y sont repris par un douanier français (vraisemblablement Maurice BRICOUT). Il les guide à travers champs vers un petit village où ils restent deux jours. Une jeune fille les guide un matin à 5Hr30 vers une gare où ils prennent un train pour Lille.
A 10Hr30, Kellett et les autres prennent un autre train vers Paris, où ils arrivent vers 16Hr30. De la gare du Nord, ils se rendent dans une église en cinq minutes de marche. Ils y font la connaissance de "Franco" (Jean-François NOTHOMB) et trois autres membres de l'organisation. Un de ces hommes (donc, il n'y avait pas de femmes dans le comité de réception) les conduit dans le district de Montparnasse, où ils se restaurent. L'autre aviateur de la RAF quitte alors Kellett et ce dernier est guidé en banlieue chez un employé de son "helper" qui devait être mécanicien. Après trois jours, Kellet est reconduit à Paris où il retrouve un des trois hommes déjà vus dans l'église à son arrivée. Ils vont manger près de la gare d'Austerlitz. Ils y rencontrent un autre aviateur de la RAF et une femme qui allait les guider plus loin.
De là, ils prennent le train de 22Hr30 pour Bordeaux. Le 29 octobre, Jean-François NOTHOMB prend quatre évadés en train de Bordeaux à Dax : Kellett, Penny, Lawrence et May, qui sont dans le même train avec un Belge (Antoine d'Ursel pour son premier passage clandestin en Espagne). Kellett déclare qu'il fait à Bordeaux la connaissance de Frederick Lawrence, Stanley May et Herbert Penny et qu'ils vont à Dax, où ils retrouvent Jean-François NOTHOMB sans citer d'Ursel.
Tous vont ensuite à vélo depuis Dax jusque Saint-Jean-de-Luz, sauf d’Ursel, et ils dorment dans une auberge en cours de route: Kellett et les autres logent vraisemblablement à Sutar à l'auberge Larre de Jeanne MENDIARA (Kellett parle de Hendaye, ce qui est peu vraisemblable). Ils en repartent à 05Hr30 pour Saint-Jean-de-Luz. Ils vont chez une femme qui avait été servante dans un hôtel, où les parents de Kellett avaient l'habitude de résider en allant en France. La traversée des Pyrénées ne peut se faire le 30 octobre, "car les guides basques sont ivres". Ils restent deux jours chez elle.
Un Belge (Antoine d'Ursel) les rejoint le 31 au matin. Ils passent ensemble la frontière franco-espagnole la nuit du 31 octobre au 1er novembre avec deux guides dont Florentino GOIKOETXEA et parviennent à San Sebastian. C'est le 66e passage de Comète par Saint-Jean-de-Luz. Kellett déclare avoir rejoint Oyarzun le 30 octobre au matin, à 05Hr30 et être repartis pour Renteria dans l'après-midi, prenant alors le tram pour San Sebastian. Comme il parle couramment l'espagnol, il fait les déplacements seul avec Stan May.
A San Sebastian, il dit avoir été logé au 7 Calle Aguire Miramoir (Calle Aguirre dans le quartier de Miramar) au 5e étage à gauche chez un "Sr Antonio Sarasola" (Bernardo ARACAMA). Les autres membres de l'équipe les rejoignent plus tard et ils y restent cinq jours. Il en profite pour aller au vice-consulat britannique et recevoir la permission d'aller visiter ses parents à Santander. Il ne reçoit l'autorisation qu'à condition de ne pas parler de son expérience récente. Un consul le conduit à Bilbao. Il y dort au restaurant "La Bombilia" et est conduit chez lui le lendemain, le 6 novembre. Ses parents avaient été prévenus officiellement qu'il était déclaré manquant, il leur avait écrit depuis la Belgique et un cousin chimiste ayant des connaissances à Berlin, Julo De Loscobos, avait essayé vainement d'en apprendre plus. Après 10 jours, l'Attaché de l'Air le conduit à Madrid. Quelques jours plus tard, il prend le train pour San Rocque et un bus pour Gibraltar.
Michael CRESWELL prend les autres à Madrid le 3 ou le 4 novembre. Ils quittent Madrid le 7 et arrivent le même jour à Gibraltar. Arthur Kellett quitte Gibraltar par avion le 5 décembre 1943 et arrive à Portreath en Angleterre le lendemain. Le 7 décembre, il est débriefé par le MI-9.
Après la guerre, Arthur Kellett retourne en Cantabria, au nord de l'Espagne. Il débute une carrière professionnelle à la banque Santander comme directeur du département étranger jusqu'à sa pension. Arturo vivait à Madrid au moment de son décès en 1988, et laisse sa veuve Mercedes et leurs quatre enfants.
Merci à son neveu Roger Kellett, pour ses informations.