Personne passée à une autre ligne d'évasion

Dernière mise à jour le 29 juillet 2020.

Frank Warren GREENE / 36306227
15 South 17th Avenue, Maywood, Illinois, USA.
Né le 7 janvier 1917 à Chicago, Illinois / † le 10 avril 1980, Santa Cruz, California.
S/Sgt, USAAF 303rd Bomber Group 359th Bomber Squadron, mitrailleur ventral.
Atterri près du village de Plouray, dans le Morbihan, France
Boeing B-17 G Flying Fortress, 41-24603, BN-Y / "GREEN HORNET", abattu par la Flak et des chasseurs le 23 janvier 1943 lors d'une mission sur Lorient.
Atterrissage forcé sur le flanc d'une colline à La Garenne, Kergolay-en-Motreff, Finistère, Bretagne, France.

Durée : 5 mois.
Passage des Pyrénées : le 11 juillet 1943.

Informations complémentaires :

Rapport d'évasion du Sergent Greene : E&E 51 disponible en ligne.

L'appareil est d'abord atteint par la Flak et voit trois de ses moteurs mis hors d'usage. Devant abandonner la formation, il devient une proie facile pour une nuée de chasseurs Fw190 qui l'attaquent de front. L'équipage reçoit l'ordre d'abandonner l'avion, mais comme le pilote 1er Lt Ellis J. Sanderson et son copilote 2nd Lt Horace D. Bowman n'ont qu'un seul parachute, ils décident de rester à bord et de tenter un atterrissage forcé, ce qu'ils parviennent à faire, Sanderson perdant quelques doigts dans l'aventure.

Ils seront fait prisonniers, tout comme le bombardier 2nd Lt Grady B. Ward, le mitrailleur droit S/Sgt Harry F. Swanson, le mitrailleur gauche S/Sgt Carlos J. Silva et le mitrailleur arrière S/Sgt Joseph L. Markiewicz (qui mourra de ses blessures le 12 février 1943.)

Outre Frank Greene, trois autres hommes parviendront à s'évader : Sidney Devers, John Spence et l'opérateur radio T/Sgt John B. Miles (évacué par la ligne Pat O'Leary vers les Pyrénées - mars 1943 - E&E 29).

Frank Greene saute à environ 4600 m et perd son kit d’évasion en tourbillonnant dans l’air avant l’ouverture de son parachute. Arrivé au sol, il est rapidement entouré d’une cinquantaine de personnes qui lui parlent, semblent lui expliquer ce qu’il doit faire, mais Greene préfère emporter son parachute et se diriger vers une ferme proche à Plouray. Les fermiers le font entrer chez eux, la dame nettoyant et soignant ses blessures au visage occasionnées par des éclats de Flak. Ils lui donnent du pain et du vin, la fermière ayant caché son parachute dans un tonneau de pommes de terre.

Une dame arrive alors à la ferme et le mène vers un champ non loin de là. Elle l’aide à détruire son équipement puis le recouvre de foin, lui disant d’attendre son retour. Elle revient peu après, le guide vers un autre champ où Greene reste caché jusqu’au soir. La dame, une institutrice dont le frère avait été radiotélégraphiste dans la Marine marchande française, revient le chercher et l’emmène chez elle pour le loger pendant 1 mois. Durant son séjour, ce sont des voisins qui se chargent de le nourrir, tandis que des parents de l’institutrice tentent de contacter un réseau. Le 24 février arrive un "Mr LEBECQUE" qui lui envoie le même jour un jeune garçon, qui accompagne Greene jusqu’à Paris.

Il s’agit en fait d’Armand LEVEQUE, habitant avec son épouse Marcelle et leur fille Andrée au 19 Avenue d’Orléans à Paris 4e. Dans le rapport de Greene, "Andrée, fille de Lebecque" est mentionnée comme l’ayant aidé. Revenons au 24 février, que Greene indique comme étant la date de son arrivée chez "Lebecque, chef d’une organisation, 19 Rue d’Orléans à Paris". Le rapport est assez confus, mais nous en déduisons en vrac que : Greene loge à partir du 29 février chez "Lebecque" (LEVEQUE); pendant son séjour, Andrée LEVEQUE l’a mené chez un photographe pour le prendre en photo en vue de l’établissement de faux papiers; Andrée s’est également chargée de prendre contact avec Elizabeth BARBIER, chef d’une organisation (voir plus bas) ; le 3 ou 4 mars 1943 (Greene parle du 4), Armand LEVEQUE, prévenu, lui, par des voisins du 19, signale par téléphone à sa fille Andrée que 5 hommes de la Gestapo sont arrivés devant l’immeuble où Greene et elle se trouvent. "Mrs Lebecque" - Marcelle LEVEQUE, épouse d’Armand, est arrêtée, de même que le Sgt Daniel C. Young (Halifax W7885 abattu le 13 février 1943 - incarcéré d’abord à la Prison de Fresnes, puis prisonnier n° 1166 aux Stalags 1, 6 et 4 puis au Camp 357). Greene parvient à s’échapper "avec la fille de sa logeuse" (Andrée)... La liste des Helpers français nous apprend qu’outre Marcelle LEVEQUE, son mari Armand et sa fille Andrée ont également été arrêtés et déportées, par la suite, donc. Marcelle et sa fille sont rentrées des camps, la liste mentionnant pour Armand : "dead"…

Du 4 mars au 9 avril, Greene mentionne avoir été hébergé à Paris chez une dame ("rue Eduardo Kann, à l’arrière de l’Université de l’Agriculture"), qui n’était connectée à aucune organisation. Pour la période du 9 avril au 15 juin 1943, il cite la mention par Andrée que son père est parti pour Bruxelles et qu’il est question d’une nouvelle organisation ; qu’il est mené à l’appartement d’Elizabeth BARBIER, d’où "Paul" (vraisemblablement Frédéric De JONGH…) le mène à une autre maison; il parle d’un canadien (ce doit être Raymond LABROSSE), assistant de Val "Wells" (Vladimir BOURYSCHKINE alias "Val Williams") ; d’un contact avec le réseau "Burgundy / Bourgogne"; de la remise par Val de faux papiers à Greene, au P/O Dennison, au Sgt Spencer, à "Joe" (?), à Abraham "Konenieck" (Abraham S. Kononenko); du passage de Comète à Bourgogne par "Paul"; de la location d’une maison à Saint-Quay-Portrieux (appartenant semble-t-il à Armand LEVEQUE…); le 27 avril, "Paul" le passe au réseau de Val; "la comtesse" (Geneviève DE POULPIQUET) le guide de Saint-Brieuc à Etables-sur-Mer; le lendemain 28, Raymond LABROSSE le mène d’Etables à Saint-Quay-Portrieux, chez une "Mme HARVÉ" (Mme Suzanne HERVÉ, Rue du Commerce à Saint-Quay-Portrieux).

Le rapport de Frank Greene indique qu’il arrive le 7 mai chez Émilie CELLARIÉ à Leïn-ar-Lan, près de Plouezec, au nord de Saint-Quay-Portrieux, dans les Côtes d'Armor en Bretagne. (Un rapport SPG indique que cela se serait passé le 11 mai, mais les évadés pourraient ne pas avoir voyagé ni ensemble, ni en même temps…) Greene se trouve donc à Saint-Quay en compagnie des aviateurs canadiens P/Off Borden C. Dennison (SPG 3314/1325), F/Sgt Gordon L. Spencer (SPG 3314/1345), Sgt Douglas Cox (SPG 3314/1328), F/Sgt Elmer L. Bulman (SPG 3314/1326), Sgt Charles E. McDonald (SPG 3314/1316) et du T/Sgt américain Jack Luehrs, du même Groupe que lui et abattu le même jour.

Ces hommes sont rejoints là le 03 mai 1943 par le Squadron Leader du 616 Squadron (Spitfire) de la RAF Peter W. Lefèvre (SPG 3314/1301).

Par recoupement de rapports d’évasions SPG, nous apprenons que le 6 mai, Greene, Dennison, Spencer, le sergent RAF Georges R. Howard (SPG 3314/1329) et le Sergent russe Abraham S. Kononenko (évadé d'un camp de prisonniers - SPG 3315/1455), sont remis à l'organisation Oaktree/Bourgogne et guidés en train vers Saint-Brieuc par une comtesse (on renseigne par ailleurs que c’est Jean CAMARD qui leur servait de guide…) A la gare, ils sont accueillis par Élisabeth BARBIER (de Comète, mais collaborant avec Wladimir BOURYSCHKINE alias "Val Williams" et Georges JOUANJEAN. Les aviateurs, aidés par Jean CAMARD et la famille LANLO, sont guidés vers Étables-sur-Mer par Jean TROMELIN de Ploughin (qui voyageait sous l’identité de Gilbert Wright, américain…) et Jacques BONNERON (du 14 Avenue Georges Clémenceau à Vincennes), le but étant de rapatrier les hommes en bateau vers l'Angleterre. Suite à une modification des plans due à une vague d’arrestations, le bateau prévu n’arrive pas et on décide de repasser les aviateurs par Paris pour leur faire gagner les Pyrénées.

Le rapport E&E 51 de Greene indique que le 19 mai, lui et 8 autres aviateurs se rendent à Paris, accompagnés de Janic, le fils du maire d’Etables-sur-Mer, de "Paul" et d’Andrée. Arrivés à Paris, ils rencontrent "Val Williams" et Élizabeth BARBIER, qui les placent chez une dame à la rue Saint-Jacques à Paris.

Il semble y avoir confusion de date quelque part, car la date du 31 mai est citée pour le voyage de Saint-Quay-Portrieux à Paris de Luehrs, Spencer, Kononenko et du Sgt H. Riley, RAF (SPG 3314/1359), auxquels Frank Greene se serait joint à nouveau. Quoiqu’il en soit, arrivés à Paris, ils sont menés à l'appartement d'Élizabeth BARBIER au 72 Rue Vaneau, d'où on les place séparément à divers endroits. Selon le rapport de Greene, il est indiqué qu’après 5 jours passés dans la maison de la rue Saint-Jacques, il est retourné le 24 mai à Saint-Quay où il reste avec "Paul" et Andrée. Le 4 juin, Greene repart pour Paris avec Andrée et ils se rendent chez Élizabeth BARBIER. Le 6 juin, ils y apprennent que Wladimir BOURYSCHKINE a été arrêté "à Bordeaux" avec deux polonais et un américain. Andrée soupçonne "Roger" d’avoir joué un double jeu (il s’agit effectivement du traître Roger LENEVEU, qui provoquera le démantèlement de la ligne Oaktree en Bretagne). Une "Marie", blonde, guide Greene et Spencer vers des maisons différentes. Le 15 juin, les Allemands font irruption à la maison d’Élizabeth BARBIER. Celle-ci est arrêtée, de même que sa mère et au moins 3 aviateurs, suite aux agissements d’un autre agent allemand infiltré, Jean-Jacques Désoubrie.

Greene et Spencer sont menés par "Marie" le 18 juin chez Mesdames Maud COUVÉ et Alice BROUARD, au 25 Rue de Madrid (VIIIe arrondissement), où ils sont présentés à Raymond LABROSSE. Le rapport de Greene mentionne que "Paul" y passe les voir, disant que personne ne sait où Élizabeth cachait l’argent de l’organisation. Ce "Paul"-là ne semble donc pas être Frédéric de Jongh, car ce dernier a déjà été arrêté à la gare du Nord à Paris le 7 juin 1943.

Dans le rapport de Greene, il est indiqué qu’il pense que c’est vers le 5 juillet que "Paul" a contacté le réseau "Burgundy" (Bourgogne) et que le 8 juillet, Greene et Spencer quittent Mmes COUVÉ et BROUARD. Ils sont rejoints par un aviateur français, "Jean Bataille", et les sergents américains du 43-30058 - 384th Bomb Group, John H. Houghton (E&E 53) et Lester Brown (E&E 52) et ils rencontrent Georges BROUSSINE, chef de la Ligne Bourgogne. Les 5 hommes sont menés en train par deux guides français vers Orthez, puis Toulouse, puis Foix où ils arrivent vers 13h00 le 9 juillet. Ils montent ensuite à bord d’une camionnette et passent en Andorre dans la nuit du 10 au 11 juillet.

Arrivés par la suite en Espagne, ils atteignent Manresa au matin du 21. De là, ils prennent un train pour Barcelone où ils s'adressent au Consulat britannique et y sont interviewés par Mr Forsythe. Greene se trouve à Madrid le 26 juillet où il est interrogé par le Major Clark. De là, il part pour Gibraltar où il arrive le 5 août. Il y rencontre le Major Lewis et Donald Darling. Greene quitte Gibraltar par avion le 6 août et arrive à Portreath en Angleterre le même jour. Il rejoint son unité à Molesworth le 21 août 1943.

[Informations supplémentaires sur la mission et l’équipage sur le site Web du 303rd Bomb Group et notamment à cette page]


(de gauche à droite) T/Sgt Miles B. Jones, S/Sgt Frank W. Greene,S/Sgt Joseph L. Markiewicz, T/Sgt Sidney Devers.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters