Dernière mise à jour le 19 août 2019.
Lorne Edward KROPF / J7931
4 Pioneer Street, Kitchener, Ontario, Canada
Né en 1918 à Kitchener / † le 25 juillet 1966 à Waterloo City, Ontario, Canada
P/Off, RAF Bomber Command 405 Squadron RCAF, opérateur radio/mitrailleur
Atterri près de Vieux-Reng / Élesmes, au nord de Maubeuge (Nord, France)
Handley page Halifax Mk. II, n° série W7770, LQ-Q, abattu la nuit du 16 au 17 septembre 1942, par un chasseur allemand (probablement l’Oberleutenant Paul-Hubert Rauh du II./NJG 4) lors d'une mission sur Essen, Allemagne
Écrasé vers 00h40 le 17 septembre sur la piste de l’aérodrome de La Salmagne, à 2 km au sud-ouest de Vieux-Reng / Élesmes, au nord de Maubeuge (Nord, France)
Durée : 5 semaines
Passage des Pyrénées : le 20 octobre 1942
Rapport d'évasion SPG 3311/950.
Le Halifax a décollé à 20h52 heure anglaise de Topcliffe, Yorshire. Environ un quart d’heure avant d’atteindre l’objectif à Essen, un pare-flamme du moteur intérieur gauche est détruit par le feu. Un peu plus tard, au cours de la phase de bombardement, le système d’alimentation en oxygène tombe en panne. Malgré ces difficultés, le pilote Murray maintient le vol et parvient à terminer l’opération. L’avion met alors le cap vers le retour mais malheureusement, il est détecté près de la frontière belgo-française par un chasseur de nuit allemand. Ce dernier passe à l’attaque vers 00h37 heure continentale à hauteur de Maubeuge alors que le Halifax vole à une altitude de près de 5000 m. Les tirs du chasseur mettent le feu à l’aile gauche. Le pilote donne alors l’ordre de quitter l’appareil, mais avant que qui que ce soit puisse réagir, le Halifax explose, éjectant Kropf (la présente page) et le mécanicien Barnicoat, 22 ans. Ce dernier était le seul Britannique à bord et habitait à Weymouth, dans le Dorset, tous les autres étant Canadiens.
Cinq de ces derniers seront tués : le pilote F/S William Frederick Murray, 20 ans, de Armstrong, British Columbia ; le navigateur F/S Charles Andrew Paton, 20 ans, de Toronto dans l’Ontario ; le mitrailleur arrière F/S Charles Albert Kitson, 20 ans également, de MacGregor, dans le Manitoba ; le bombardier/observateur F/S William Seaman Grant, 27 ans, de Clifton Royal, dans le New Brunswick et le mitrailleur dorsal F/S Joseph Gordon St. Louis, 28 ans, de Renfrew dans l’Ontario. Tous les cinq reposent au cimetière communal de Maubeuge (Maubeuge Centre Cemetery), dans le Département du Nord, France, Rangée A, tombes 22 à 26.
Seul Lorne Kropf, dont c’était la 5ème mission, parviendra à s’évader. Le mécanicien Sgt. Ronald Ernest Hayward Barnicoat, le bras cassé, fut arrêté et soigné pendant 12 jours à l’Hôpital de Saint-Gilles à Bruxelles (vraisemblablement celui situé à l’Avenue Molière). De là, il fut envoyé d’abord en Allemagne avant d’être interné au Stalag Luft 6, près de Heydekrug, Memelland (actuellement Šilute, en Lithuanie) et libéré au printemps 1945.
Le rapport d’évasion de Lorne Kropf est très succinct et ne donne que peu de noms de ses Helpers. Nous en reprenons la teneur ci-dessous et l’avons complétée par la traduction d’extraits de 2 articles parus dans la presse canadienne en 1943-1944 au sujet du parcours militaire de Lorne Kropf, ainsi que par des renseignements sur la localisation de son atterrissage qui nous ont été communiqués en juillet 2019 par Bernard Feutry, de Vieux Mesnil près de Maubeuge, que nous remercions ici. Des recherches complémentaires en juillet 2019 ont permis de découvrir des détails sur ce que nous avions trouvé dans les archives de Comète concernant certains de ses Helpers.
Dans l’article, Lorne Kropf rapporte qu’alors qu’il s’occupait de sa radio, "J'ai entendu des impacts de balles dans l'avion, mais je n'avais aucune idée de l'importance de ces coups quand j'ai entendu le pilote nous ordonner de sauter de l'avion. Sur l'intercom, j'entendis le mécanicien de vol demander : 'Devons-nous vraiment sauter?'… Et le pilote dire 'Oui, tout le côté gauche de l'avion est en feu'. L'avion était salement touché et l'équipage reçut confirmation de l'ordre de sauter, mais l’évacuation fut perturbée car le sas de sortie était encombré. Selon Kropf, "le Halifax avait dû perdre environ 3000 m d’altitude en quelques secondes, puis les réservoirs de carburant explosèrent. Il pensa qu’ils avaient atteint le sol, mais sentant le souffle violent du vent, il constata que l’appareil était encore en train de tomber. Il poussa de toutes ses forces avec ses mains et ses pieds pour se dégager et y parvint finalement. Il ne se souvient pas s’il est sorti par un trou dans le fuselage ou quoi que ce soit." Il rapporte par ailleurs que "lui et un autre membre de l'équipage furent expulsés dans l’air. Kropf commença à tomber et parvint à tirer la corde de son parachute (un mouvement de réflexe naturel) mais il n’a aucun souvenir d’avoir effectué cette manoeuvre. Il vit l'avion en flammes sous lui et un autre parachute descendant vers le sol. Le moment d'après, il réalisa qu'il avait atterri, assez durement, dans un champ de navets. Il avait seulement une égratignure ou deux au front [son rapport d’évasion se borne à dire qu’il s’était légèrement foulé une cheville en atterrissant]. Il pouvait voir les flammes de l'avion illuminant le ciel et il se rendit compte qu'il était trop tard pour aller aider qui que ce soit."
"Le mécanicien de bord Barnicoat se trouvait entre moi et l'avion. Je ne voulais pas essayer de le rejoindre par peur d'être vu. Je crois que ce fut une bonne idée de n'avoir pas essayé car il fut fait prisonnier." Lorne, qui précisons-le, ne savait pas à ce moment que l’autre parachutiste était Barnicoat, trouva un endroit où se cacher et s'endormit dans son parachute jusqu'au petit jour. Il cacha son parachute au coin d'une clôture et remarqua un fermier travaillant dans un champ voisin. Par des signes et à l'aide de sa carte, qui faisait partie de son kit de survie, il put faire comprendre qu'il voulait savoir où il était. Il se cacha toute la journée replié dans un tas de grains. Le fermier lui apporta à manger et lui donna des vêtements qu'il mit par-dessus son uniforme. Quand le fermier lui apporta quelque nourriture vers midi, il apprit que cinq hommes de son équipage avaient été tués et que le sixième (dont il avait vu le parachute) souffrait d'un bras cassé et avait été fait prisonnier. A son arrivée en Grande-Bretagne plus tard, il apprit que l'autre seul survivant était Barnicoat, le mécanicien de bord. A la nuit tombée, Lorne commença à marcher en direction du Sud, vers Paris. Il contourna Maubeuge, ce 18 septembre, puis se cacha dans un buisson pour la journée. Il rencontra un autre fermier dans son champ, qui l'emmena chez lui et l'hébergea pour la nuit. Le 19 septembre, le fermier emmena Lorne, assis sur sa bicyclette, chez un ami. "John" (sic) et sa femme emmenèrent Lorne en train jusqu’à un faubourg de Charleroi (aucun ne parlait anglais), où il resta pour la nuit avec des parents de "John". [Dans son rapport d’évasion, Kropf indique que c’est à Grand-Reng près d’Erquelinnes, passé la frontière franco-belge, qu’il fut d’abord conduit à vélo. Et que c’est là qu’on lui échangea les francs français de son kit d’évasion contre des francs belges.] Le dimanche 20 septembre, à 8h00 du matin, Lorne quitta Charleroi pour Bruxelles avec "John" et sa femme. Il fut amené chez le beau-père de "John"où il passa la nuit. Ces hôtes lui donnèrent des vêtements civils et le débarrassèrent de ce qui restait de son uniforme.
Les archives nous confirment que dans la nuit du 20 au 21 septembre 42, Kropf loge chez le beau-père d'un ex-officier de cavalerie belge ("Jean"). C'est un agent d'assurance et son fils, Albert "Adrien" (en fait, ADRIAENS), un ancien policier militaire français, est "un couturier qui possède deux magasins à Bruxelles." [La liste des Helpers belges reprend Albert ADRIAENS au 117 Chaussée de Charleroi et L’Almanach de Bruxelles pour 1939 reprend "Couture Gaby" à cette adresse, une autre adresse pour la même enseigne étant reprise au 129 Rue Stevens-Delannoy à Laeken… La liste des Helpers a Jean ADRIAENS au 31 Avenue Louis Wittouck, également à Laeken. Il est renseigné comme policier et hébergeur du groupe Anne BRUSSELMANS / Marcel VAN BUEKENHOUT.]
Un article indique que "ce lundi 21, un homme 'de la Résistance ou mouvement clandestin' arriva et informa Lorne que les Allemands avaient découvert son parachute et le recherchaient. "John" était déjà au courant mais, ne parlant pas l'anglais, n'avait pas pu le lui dire. Ce nouvel ami emmena Lorne à une pharmacie où il resta dans une petite pièce à l'arrière pendant à peu près une semaine. Les repas lui étaient amenés dans sa cachette où il était enfermé la nuit. Il put lire des livres (en anglais bien sûr), mais la plupart du temps il ignorait ce qui se passait en dehors."
Dans son rapport SPG, Kropf indique que le 21, Jean (ADRIAENS donc) amène un agent belge de Renseignement et conduit Kropf dans une pharmacie (Mme Christiane et son mari Émile BURNIAT, 68 Rue du Méridien à Saint-Josse-ten-Noode, Bruxelles) où il est questionné sur son identité. Il reçoit alors une carte d'identité et loge jusqu'au 27 dans une autre pharmacie de BURNIAT [L’Almanach de Bruxelles pour 1939 la situe au 123 Avenue Eugène Demolder à Schaerbeek.]
Poursuivons l’article, dont certains éléments peu détaillés figurent dans le rapport SPG : "Le dimanche 27 septembre, Kropf quitta la pharmacie pour être emmené chez un Belge, Monsieur Buy. Buy avait rencontré sa future épouse "Cléopatra" pendant la révolution en Russie. Cléopatra, qui était une danseuse de ballet d’origine russo-polonaise, avait été heurtée par un taxi et était alitée pendant les neuf jours que Lorne resta chez eux. Lorne apprit de parents et amis de la famille qui parlaient l'anglais et venaient voir Cléopatra pendant qu'il se trouvait là, qu’après son accident, elle avait dû rester allongée sur le ventre pendant six mois et qu’elle fut d'abord sérieusement malade après qu’elle put enfin s'étendre sur le dos. Malgré son handicap, Cléo faisait toute la cuisine sur une plaque chauffante installée à côté de son lit. Quand son mari était absent, Lorne et Cléo utilisaient constamment un dictionnaire anglais-français, notamment pour s'aider à préparer la nourriture et la cuire." [La liste des Helpers belges reprend "BUY, Cdt, Avenue Gribeaumont, Brussels. N.I.-Dead". Il s’agit en fait du Lieutenant Alexandre Louis BUY, officier de réserve, arrêté par les Allemands et parti vers le camp de Buchenwald par le convoi du 8 mai 1944 - Prisonnier n° 48644. Le Moniteur Belge des 11-12 juillet 1949 nous apprend que, né à Nantes, France, le 6 juillet 1880, il était l’époux de Cléopâtre KAWKA, habitait avec elle au 151 Avenue Louis Gribaumont à Woluwé-Saint-Lambert et est mort à Buchenwald le 14 mars 1945.]
"Le lundi 5 octobre, Lorne quitte le ménage BUY et est emmené par une femme (qui n'a jamais divulgué son nom) dans une cathédrale. C'était un échange d'un mouvement clandestin à un autre." [Un rapport de "Charlotte" (l’un des alias de William UGEUX) du réseau Zéro en date du 8 novembre 42 explique que cet aviateur avait été remis par Zéro au Service Dédé.]
Les archives de Comète confirment qu’une femme (Mme Christiane BURNIAT du 123 Avenue Eugène Demolder, à Schaerbeek, agente, elle, des réseaux Marc et Clarence) conduit Lorne à une église (vraisemblablement l’église Saint-Joseph au Square Frère-Orban, lieu de rendez-vous habituel) pour rencontrer Elsie MARECHAL.
L’article rapporte qu’"une jeune fille l'attendait à la cathédrale (sic) et l'amena à Elsie (probablement sa mère). La jeune fille parlait anglais mais la discrétion était de mise et ils attendirent avant de continuer à parler. Elsie était une britannique mariée à un belge et Lorne resta avec eux pendant deux jours. C'est là qu'il apprit le 'lien brisé' (une autre personne avait payé le suprême sacrifice) dans la 'chaîne clandestine' qui devait le mener vers la Suisse." Nos précisions : la jeune fille était effectivement Elsie Jeannette MARECHAL, ("Little Elsie"), née en 1924, fille de Elsie Mary, née Bell en Angleterre en 1894 et mariée à Londres en 1920 avec le belge Georges MARECHAL. Tous les trois travaillaient pour Comète (logeurs, guides et courrier). Lorne resta chez eux pendant 2 jours au 162 Avenue Voltaire à Schaerbeek. Suite à l’infiltration de la ligne par les services allemands, tous trois furent arrêtés chez eux le 18 novembre 1942. Le père, Georges, fut fusillé le 20 octobre 1943 au Tir National à Schaerbeek, après des mois de détention à la prison de Saint-Gilles. Elsie et sa mère passèrent également par cette prison avant de partir pour l’Allemagne le 1er janvier 1944. Toutes deux furent détenues dans les camps de Waldheim, Ravensbrück puis Mauthausen, d’où elles furent libérées au printemps 1945, survivant par miracle à la misère et aux privations.
Kropf quitte Bruxelles par le train pour Paris via Lille le mercredi 7 octobre avec deux guides. [Il s'agit d'Edouard d'Oultremont et de Jean-François NOTHOMB qui vient de rejoindre Comète.] Lorne déclare qu’"il avait reçu une fausse carte d'identité (au nom de Jean Laurent, électricien) et d’autres faux documents pour pouvoir voyager jusque Paris. Le train était assez bondé et Lorne resta debout dans le corridor à fumer. Tandis qu'il regardait par la fenêtre, il réalisa que quelqu'un lui parlait en français. Regardant autour de lui, il vit que c'était le contrôleur. Comprenant que celui-ci voulait voir son ticket, il le lui tendit. Pas un mot ne fut prononcé par les deux hommes."
"A un village-frontière avant d'atteindre Lille, le train stoppa pour un contrôle douanier. Les deux officiers des douanes belge et française firent leurs vérifications d'usage. Parallèlement les gardes de la sécurité allemande contrôlaient eux aussi les passeports et cartes d'identité. Cependant, vu le nombre de personnes dans le train, seulement une partie fut contrôlée et Lorne eut la chance de passer sans se faire questionner. Un homme en face de lui fut emmené dehors pour être questionné. Lorne demanda à son compagnon de voyage plus tard ce qui lui serait arrivé s'il avait été appelé à sortir… l’autre se contenta de hausser les épaules."
Ils arrivent à Paris vers 17 heures et Kropf va loger chez Robert AŸLÉ dans l'appartement au-dessus de celui de "Mr Paul" (Frédéric DE JONGH) au 37 Rue de Babylone dans le VIIème. Il se trouve chez Raymonde et son époux René COACHE au 71 Rue de Nanterre à Asnières-sur-Seine lorsqu’y arrive un autre évadé, Michael Joyce (voir ci-dessous).
Le 8 octobre, Lorne est placé chez Élisabeth BARBIER. Élisabeth, née Campbell, et sa mère Camille, partageaient un appartement au 72 Rue Vaneau, Paris VIIème. Un homme arriva plusieurs jours plus tard et emmena Lorne visiter la ville de Paris pendant deux après-midi. "On apprit alors que les Allemands étaient en train de vérifier les passeports des gens dans la rue et que quiconque ne pouvant prouver un emploi était envoyé au travail obligatoire en Allemagne. Ceci coupa court à toute balade touristique et Lorne resta à l'intérieur pour le reste de son séjour chez les BARBIER, qui se termina le 17 octobre". Le rapport SPG se termine sur ce transfert, Kropf indiquant que la suite de son évasion correspond à celle de Gordon Mellor - SPG 3311/950…
Le samedi 17 octobre, Lorne et d’autres évadés et guides prennent le train de nuit en première classe à la gare d'Austerlitz. Kropf est accompagné de deux guides (Elvire MORELLE et Jean-François NOTHOMB, qui fait ainsi son premier voyage), de Michael Joyce, d'Aleksei Stadnik et de Gordon Mellor. La carte d'identité de Kropf le désignait comme un "poissonnier", vu qu’ils se dirigeaient vers le village marin de Saint-Jean-de-Luz. "Voyager de l'intérieur de la France vers la côte était interdit sans un visa spécial, ce qui n’était pas le cas lors de voyages d'une ville à l'autre dans la 'zône interdite'. Les tickets d'origine indiquaient 'de Paris à Bayonne', mais s'ils étaient descendus du train à Bayonne, des visas spéciaux auraient été nécessaires pour la suite du voyage. Pour éviter des problèmes, le réseau avait prévu que deux personnes montent dans le train à Bayonne avec des tickets pour tous les quatre qui indiquaient maintenant un trajet 'de Bayonne à Saint-Jean-de-Luz". [Les deux personnes étaient "Bee"Johnson et Elvire DE GREEF qui les rejoignent à Bayonne pour leur donner les tickets jusque Saint-Jean-de-Luz.] Donc, quand ils arrivèrent en gare de Saint-Jean-de-Luz le dimanche 18 octobre, "il apparaissait aux autorités qu'ils avaient voyagé uniquement depuis Bayonne, et comme ces deux villes se trouvaient à l’intérieur de la 'zône interdite', aucun document particulier n'était nécessaire. Lorne rapporte que ce dimanche 18, ils s'enivrèrent et dormirent bien."
[Les évadés passèrent la nuit du 18 au 19 octobre chez les LAPEYRE au 3 Rue Bernadou à Bayonne (voir la fiche de Germain Lapeyre).]
Le lundi 19 octobre, Lorne et ses compagnons de voyage "sont drillés à fond pour le parcours qu’ils vont devoir effectuer à pieds à travers les Pyrénées jusqu'à San Sebastian, en Espagne. Ils sont guidés par des contrebandiers transportant leur marchandise et habitués à la traversée de la frontière franco-espagnole en évitant les gardes-frontière espagnols."
Kropf signe en date du 19 le livre d'Ambrosio SAN VICENTE ARRIETA au 7 Rue Salagoïty à Saint-Jean-de-Luz. Lui et les autres évadés y reçoivent des vêtements ("pantalons et chemises de toile, leurs tenues de ville étant dans leurs sacs à dos") et des chaussures de montagne en corde (espadrilles). On leur apprend qu'en cas de capture par les douaniers français, ils peuvent communiquer avec une femme habitant en face des cellules pour obtenir de l’aide en vue de sortir de geôle.
Le 19 octobre à 21 heures, Kropf, Mellor, Stadnik et Joyce partent donc vers la frontière avec le guide basque Florentino GOIKOETXEA ainsi que "Bee" JOHNSON. Jean-François NOTHOMB et Andrée DE JONGH ferment la marche. Le groupe s’arrête à la ferme de Françoise USANDIZAGA à Bidegainberri près d’Urrugne (entre Saint-Jean-de-Luz et Hendaye) avant de partir en direction de l’Espagne. C'est le 27e passage de Comète par Saint-Jean-de-Luz et la Bidassoa.
Dans un article canadien : "A environ 5 heures du matin le 20, ils atteignirent une vieille auberge dans la province espagnole. Ils attendirent là jusqu'à ce qu'une voiture vienne les chercher et les mène à San Sebastian. Ils furent conduits dans une maison particulière où ils reçurent un petit déjeuner et se mirent au lit. Ils dormirent jusqu'au soir du 20 octobre, reçurent un repas et rencontrèrent un représentant local de l'Ambassade britannique. On leur dit qu'une voiture viendrait les prendre le 21 dans l’après-midi, ils dormirent jusqu'au lendemain."
L’auberge atteinte le 20 est celle de Oyarzun et les évadés logent chez le garagiste Bernardo ARACAMA au n°7, 5e étage à gauche, Calle Aguirre, Miramon, à San Sebastian…
Le 21, ils se rendent à Madrid dans la voiture consulaire de Bilbao, "où ils arrivèrent vers 9 heures du soir. Suivant la Loi Internationale, ils auraient dû avoir été internés, mais comme les autorités espagnoles ignoraient tout de leur présence et pour empêcher qu’elles l'apprennent, ils restèrent confinés dans les locaux de l'Ambassade. Lorne resta là quatre jours et le dimanche soir, le 25 octobre, lui et les autres évadés quittèrent Madrid par le train et arrivèrent à Gibraltar le lundi midi." Là, Lorne Kropf fit rapport à la Base de la Royal Air Force, d’où il était libre d'envoyer tout message.
Un article indique que Kropf envoya un télégramme à "Soph" (une tante, identifiée dans l’article comme étant Sophia Betzner, qui l’avait pris en charge chez elle après la mort des parents de Lorne, Norman en août 1936 et Lorena Kropf en mars 1937) pour lui signaler son arrivée en sécurité et il ajoute que "J.S. Westman, P.O. de la R.C.A., Ottawa, envoya lui aussi une lettre à l’attention de sa propre famille".
Kropf quitta Gibraltar par avion le 31 octobre à 22h30 et atterrit à Portreath à environ 7h du matin, le 1er novembre 1942. Arrivé le lendemain à Londres, il y est interrogé le même jour pour l’établissement de son rapport.
Kropf rapporte qu’après son retour d’évasion, il "resta en Grande-Bretagne environ un mois et retourna chez lui au Canada pour un congé de 30 jours."
Comme son rêve avait été depuis le début de pouvoir devenir pilote, et bien qu’informé au départ que ses qualifications académiques étaient insuffisantes, il postula pour cette spécialisation. Il apprit ensuite que sa candidature avait finalement été retenue et qu’il allait être posté au centre d’entraînement d’Eglinton, Toronto ("I.T.S.- Initial Training School") en vue de devenir pilote de chasse.
On lui octroya en 1943 la D.F.C. (Distinguished Flying Cross) pour services rendus en opérations (en 1942…) [London Gazette 5 février 1943] :
Lorsque Lorne apprit à Eglinton de son ami le F/O Louis Nault que le "Globe & Mail" de Toronto avait annoncé que cette décoration lui serait décernée, il en fut étonné. Quand Nault lui montra l’article, Kropf déclara "Je pense que je ne la mérite pas", ajoutant qu’il "souhaitait que ses camarades auraient été encore en vie pour qu’ils puissent être au courant."
Après plusieurs mois de formation, il fut envoyé à nouveau en Grande-Bretagne, pour rejoindre le RCAF 432 Squadron (Cougar). La DFC lui fut remise officiellement le mardi 10 octobre 1944 à Buckingham Palace par le Roi George VI. Kropf accomplit un certain nombre d'opérations jusqu’à la fin du conflit en Europe au début de mai 1945. Il se porta ensuite volontaire pour le Pacifique, mais la guerre dans ce théâtre d’opérations ayant pris fin au mois d’août, il retourna au Canada où il passa un congé dans sa famille à Kitchener.
Décédé en 1966, Lorne Kropf repose au Riverside Cemetery à New Hamburg, Waterloo Region, Province d’Ontario, Canada.
Une version en anglais à propos de la perte du Halifax W7770 et de son équipage se trouve à http://aircrewremembered.com/murray-william-frederick.html