Personne capturée durant son évasion

Dernière mise à jour le 20 novembre 2023.

William POWELL / O-808137
Yale Avenue 130, Waterbury, Connecticut, USA
Né le 9 janvier 1917 à Philadelphia, Pennsylvanie, USA / † le 5 août 1997 à Bella Vista, Arkansas, USA
2nd Lt, USAAF 385 Bomber Group 549 Bomber Squadron, navigateur
dans le Bois de Gabelle, près de Lobbes, Province du Hainaut, Belgique.
Boeing B-17F Flying Fortress (Forteresse Volante) N° série : 42-30354 - "Hustlin'Hussy", abattu le 29 janvier 1944 par un chasseur du IV./JG26 (Hauptmann Wolfgang Neu) lors de la mission sur Frankfurt.
Écrasé à Anderlues-Fontaine-l'Evêque, près de l'ancienne usine "Surchiste", Hainaut, Belgique.
Durée : 6 mois
Arrêté à Paris le 3 août 1944.

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 2268.

Le B-17 décolle de Great Ashfield à 07h00 (heure anglaise). Selon l’auteur Ian McLachlan dans un chapitre de son livre "Eighth Air Force Bomber Stories – A new selection" (Sutton Publishing Ltd – 2004 pages 41-55), dont nous avons extrait certains détails figurant sur la présente page, l’appareil est touché par la Flak, qui endommage le moteur n° 4 juste avant l’arrivée sur l’objectif. La charge larguée sur la cible, l’appareil s’éloigne de Frankfurt, mais, incapable de suivre le reste de la formation, esseulé, il devient la proie de la chasse allemande. Criblé d’obus, il est attaqué à distance par un Junker 88 dont les obus déchirent le B-17.


L'équipage du "Hustlin'Hussy" en mai 1944
Debout de gauche à droite : Arthur Pacha, mécanicien - Allen Patterson, Mitrailleur droit - Elmore Loveland, Mitrailleur arrière - William Williams, Mitrailleur gauche - Robert Piarote, radio - Leo Reynolds, Mitrailleur ventral.
Devant de gauche à droite : Ralph Palmer, pilote - Ryal Skaggs, copilote - William Powell, navigateur - Frank Wieczerzak, bombardier

L’aile droite est perforée, un incendie se déclare dans le compartiment radio et après avoir survolé la frontière germano-belge, le pilote, 1er Lt Ralph H. Palmer, qui parvient à maintenir le contrôle de l’avion, donne l’ordre d’évacuer l’appareil, qui se cassera par la suite en deux. Tous parviennent cependant à sauter, sauf le mitrailleur latéral droit S/Sgt Allen D. Patterson, qui est tué par un éclat d’obus à bord de l’avion. D’abord enterré au cimetière de Gosselies, il repose au cimetière américain des Ardennes à Neupré près de Liège.

Le pilote Palmer parviendra d’abord à s’évader et se trouvera dans une maison du même village où son copilote 2nd Lt Ryal L. Skaggs était hébergé. Ce dernier réussira son évasion (E&E 2158 – caché à Morlanwelz jusqu’à la libération par des troupes américaines le 4 septembre 1944). Il rapporte que lorsque les Allemands trouvèrent Palmer en février chez l’homme qui l’hébergeait, ils ont abattu celui-ci avant d’emmener le pilote, qui se retrouvera plus tard au Stalag Luft 1 à Barth en Allemagne. Le livre de McLachlan précise que Ralph Palmer se trouvait alors chez Eugène et Jeanne HUPIN et leur fille de 7 ans, Monique, à Chapelle-lez-Herlaimont et qu’Eugène HUPIN a été fusillé dans la Prison de Charleroi le 25 avril 1944, avec 9 autres détenus, Palmer ayant été obligé d’assister à l’exécution.

D’autres hommes échapperont un temps à la capture, mais finiront par être arrêtés : William Powell (la présente fiche), le mitrailleur dorsal T/Sgt Arthur M. Pacha, le mitrailleur ventral S/Sgt Leo J. Reynolds et le mitrailleur gauche S/Sgt William Williams, blessé au bras. Ils seront tous quatre arrêtés à Paris le 3 août 1944.

Alain Dumont, le petit-neveu de Charles STERCK, nous apprend le 30 juin 2017 que son grand-oncle a pris en charge et hébergé à Piéton, 5 membres de l’équipage, Ralph Palmer, Ryal Skaggs, Arthur Pacha, Leo Reynolds et William Williams. Ils ont séjourné pendant plusieurs jours chez sa grand-mère à Piéton avant d’être évacués par un Mr WARANDT. Charles STERCK et son frère Edmond ont tous deux été arrêtés par la suite (le 14 avril 1944) et envoyés au camp de Buchenwald en Allemagne par le convoi du 8 mai 1944. Charles, prisonnier n° 54668 est décédé le 25 mars 1945 à Ellrich ; Edmond, prisonnier n° 54667, a disparu à Rheine. Une rue de Piéton (Chapelle-lez-Herlaimont) a été rebaptisée après la guerre Rue des Frères Sterck en leur honneur.

Outre le Lt Skaggs cité plus haut, trois autres hommes parviendront à s’évader : l’opérateur radio Robert Piarote, le mitrailleur arrière Elmore Loveland et le bombardier 2nd Lt Frank F. Wieczerzak (E&E 2159 – sérieusement blessé, il sera soigné et hébergé dans la région de Charleroi et sera libéré le 4 septembre 1944 à Mont-sur-Marchienne par des troupes américaines).

Selon le livre de McLachlan, William Powell est rapidement trouvé par des résistants et placé dans la maison de René CROQUET et son épouse Gilberte (28 Rue des Quatre d’Gins à Lobbes). William Williams, caché ailleurs dans le coin comme ses coéquipiers, est soigné par un médecin, membre de la Résistance et qui lui enlève des éclats d’obus de son bras.

Dans son rapport de prisonnier libéré (RAMP - Recovered Allied Military Personnel), Powell ne mentionne pas les CROQUET mais cite Gaston GILBERT, son épouse et leur fille Renée, du 51 Rue de l'Entreville à Lobbes, qui le cachent et le nourrissent durant six semaines (du 30 janvier au 26 février). C'est Georges BOURGEOIS de cette même rue qui l'y place et contacte des gens à Bruxelles. Dans son livre, McLachlan mentionne que William Williams se trouvait avec Powell chez les GILBERT, sans toutefois donner de dates.

McLachlan indique que vu l’impatience de Powell, qui veut bouger, il est mené "le 16 avril" au 16 Rue du Marais à Gondregnies chez Charles et Sylvie LEPOIVRE et leurs enfants Lucie, Carmen et Marcel. Il ajoute qu’un mois plus tard (donc en mai…), Powell, Williams et Piarote sont guidés à Bruxelles par "Victor Screyeu et Odette Grysfont" (Il s’agit de Victor SCHREYEN et d’Odette GRYSPEIRT.) Dans une lettre (non datée, mais qui pourrait avoir été rédigée en 1974) et où Charles LEPOIVRE reprend la liste des aviateurs qu’il a aidés/hébergés, on retrouve pour la période concernée (fin mai, donc) : Dean McCall du 17 mai au 1er août, William Powell et Robert Piarote du 22 mai au 9 juillet, William Williams du 24 mai au 9 juillet et Stephen Harris du 29 mai au 5 juin…


William Powell et Lucie Lepoivre à Gondregnies en 1984.

Il y a d’autres incohérences de dates selon les sources, l’une d’entre elles disant que "le 3 février", Victor SCHREYEN demande à Jean DEVREESE du 57a Avenue des Gloires Nationales à Ganshoren, un résistant MNB et Armée Secrète, de guider Powell et Piarote chez Marie DE STOBBELEIR au 140 Avenue du Karreveld (aujourd'hui Avenue Brigade Piron) à Molenbeek-Saint-Jean, Bruxelles. Powell y aurait logé 7 semaines du 3 février à avril 44 (Powell déclare dans son RAMP qu'il y est resté 7 semaines, mais du 26 février à fin avril…), puis est caché chez Marcelle FLEBUS au 56 Rue Américaine à Ixelles - Bruxelles, guidé là par Odette GRYSPEIRT. Celle-ci déclare que Powell doit retourner à la campagne pour raisons de santé et il se trouve placé à "Gaches" (en fait chez Maurice DUMONT, 12 Rue de Silly à Gages, près de Chièvres). Il semble que Powell serait alors parti plus tard en France où il aurait rejoint le B.L.A. (Bureau de Liaison Aérien) à Alençon. Ceci pourrait avoir été la destination envisagée pour lui, mais une arrivée effective à Alençon est fort peu probable, vu la localisation de cette ville par rapport à Paris. Quoiqu’il en soit, Powell confirme dans son RAMP que Marcelle FLEBUS l'a excellemment bien soigné et caché d'avril à juin. McLachlan confirme, sans dates, le séjour de Powell chez Marcelle FLEBUS, avec un départ vers la campagne de Powell et Williams "le 1er juin 1944". Il ajoute que, la maison des LEPOIVRE étant encombrée, les LEPOIVRE ayant "courageusement hébergé sept nouveaux arrivants suite à un nouveau crash près de Lobbes" ce n’est pas chez eux qu’ils furent menés, mais bien chez Maurice DUMONT à Gages. Dans la liste établie par Charles LEPOIVRE, arrêté avec sa famille le 11 août, il n’est question que d’un total de 13 aviateurs aidés au total, hébergés du 3 avril au 9 août 1944 et cette mention de 7 nouveaux aviateurs logés "en fin mai/début juin" n’est pas crédible.

Powell déclare dans son RAMP avoir d’abord été conduit chez Charles LEPOIVRE, bien connu des SCHREYEN et d'Odette GRYSPEIRT et être resté chez les LEPOIVRE pendant une semaine avant d’aller chez Maurice DUMONT à "Gage, Rue de Gage" (en fait, 12 Rue de Silly à Gages). Mentionnons ici que Victor SCHREYEN a été arrêté le 1er juin 1944 à son domicile, 26 Rue Fontaine d’Amour à Schaerbeek - Bruxelles. Il sera déporté en Allemagne et interné au camp de Buchenwald, dont il ne reviendra pas.

McLachlan rapporte dans son récit que Powell reste environ 1 mois chez les DUMONT, passant son temps entre autres à construire un modèle de son "Hustlin’ Hussy" pour le fils DUMONT, Lucien. Il ne mentionne pas le passage par le Camp à Bruxelles.

Par ailleurs, on lit sur la fiche BRAREA de Jean DEVREESE, que "Powell et Papotte [Piarote] ont célébré les 21 ans de Piarote chez Mary au 140 Avenue du Karreveld" (cela semble peu probable, vu que Piarote est né un 12 octobre…) "Mary" est Marie Joséphine DE STOBBELEIR. On rapporte également que les deux hommes ont été convoyés de la villa "Sourire d'Avril" au "camp des Chouettes" au Bois de la Cambre à Bruxelles par DEVREESE, surnommé "Ghandy", de l'Armée Secrète.

On renseigne que Powell et Piarote et 4 autres aviateurs américains quittent ensuite le camp pour se rendre chez un autre membre du maquis à Charleville en France. Ils sont guidés par Michel HAEGELSTEEN (Michel, Jean-Marie, Charles HAEGELSTEEN, surnommé "Micky", un jeune scout de 19 ans, membre du Groupe D, tué le 23 mai 1944 lors d'une action avec la Section 5, Groupe D, de l'Armée Secrète à Six Planes ("Pont du ruisseau de Rebais"), près de Vresse-sur-Semois, dans les Ardennes belges, non loin de la frontière française. Ses parents habitaient au 79 Boulevard Saint-Michel à Etterbeek.)

Dans son rapport, Powell cite deux Français, Roger et René (vraisemblablement René FOURCHET), de Recquignies, dans le Département français du Nord, entre Maubeuge et Jeumont, qui l'accompagnent lui et 4 autres Américains pour aller à la rencontre des troupes libératrices poursuivant leur avancée en France.

McLachlan indique seulement que Powell, Williams, Arthur Pacha et Leo Reynolds sont alors menés à Paris… où ils sont tous quatre arrêtés le 3 août lors d’une descente de la Gestapo, la ligne ayant été infiltrée.

Le rapport de Powell mentionne seulement qu’il est arrivé à Paris et que c’est un médecin français qui l'a remis, comme beaucoup d'autres, dans les mains de la Gestapo. Le praticien mesurait près d’1m80, avait des cheveux foncés ondulés, parlait le français, l'espagnol, l'allemand. Sa femme était blonde et ils habitaient un appartement en banlieue.

Henri NEUFCOURT de Watermael, un co-détenu de Victor SCHREYEN à Buchenwald, déclare qu'un aviateur américain "Bill" a été confronté à Victor dans ce camp vers le 17 août 1944. Ce William ... le seul William sur la liste des aviateurs aidés par SCHREYEN, aurait été arrêté à Paris et envoyé à Buchenwald. Il se confirme qu’il s’agit bien de William Powell, qui s’est également retrouvé à Buchenwald , portant le n° de prisonnier 78294.

Par ailleurs, sur les fiches BRAREA de Marie DE STOBBELEIR et Jean DEVREESE, Powell est renseigné comme "liberated PoW". Effectivement, après son arrestation, il passe huit jours à la Prison de Fresnes où il est battu et interrogé. Transporté en train dans un groupe d’environ 2000 prisonniers, français et aviateurs Alliés, il arrive au camp de Buchenwald le 20 août 1944 où il est le prisonnier n° 78296. Comme Williams (78294), Pacha (78288) et Reynolds (78292), il tente de survivre aux privations, aux coups, à la faim. Parmi les 168, il y a 2 Néo-Zélandais, 9 Australiens, 1 Jamaïcain, 26 Canadiens, 43 Britanniques et 83 Américains. Ayant eu vent de projets consistant à faire travailler les aviateurs dans un camp de travail proche, Phillip Lamason, le plus haut gradé parmi eux, est déterminé à faire savoir au commandement de la Luftwaffe que leur détention là est contraire aux conventions. En effet, les aviateurs auraient dû être internés dans un Stalag et non un camp de travail et d’extermination. Un as de la chasse allemande, l’Oberst Johannes Hannes Trauloft de la Luftwaffe, en visite au camp pour examiner les dégâts à Dora et Buchenwald suite à des bombardements récents, est approché près des fils barbelés par quelques aviateurs parlant l’allemand, dont le F/Lt Splinter Adolphe Spierenburg, un officier néerlandais de la RAF servant habituellement d’interprète à Lamason. Trauloft prend quelques notes et promet de faire ce qu’il peut auprès de ses supérieurs pour que les prisonniers militaires soient transférés vers un camp géré par la Luftwaffe.

Ayant appris par la suite que, devant le refus des aviateurs et particulièrement de Lamason de collaborer, la Gestapo avait ordonné leur exécution pour le 24 ou le 26 octobre, Lamason redouble d’efforts. Finalement, sur ordre du Maréchal Goering, la Luftwaffe obtient finalement de la Gestapo que les hommes soient transférés dans un camp adapté à leur statut. Ce sera en l’occurrence le Stalag Luft 3 à Sagan/Zagan (Pologne). William Powell, William Williams et leurs compagnons furent évacués de Buchenwald par train le 19 octobre et arrivèrent au Stalag Luft 3 à Sagan/Zagan, Pologne, le 21.


La carte de prisonnier de William Powell à Buchenwald, confirmant sa sortie de ce camp le 19 octobre 1944

La carte de prisonnier de William Powell au Stalag Luft 3.
(Famille Powell)

Powell fera partie du convoi parti en marche forcée de Sagan, évacué à la fin janvier 1945 devant l’approche des troupes Russes. Il se retrouvera avec les Américains survivants au Stalag 7A à Moosburg en Allemagne, camp qui sera libéré le 29 avril 1945 par des troupes américaines. William Powell signe son rapport RAMP le 8 mai 45 et est démobilisé le 21 décembre de la même année.


Rapport RAMP signé par William Powell le 8 mai 1945, après sa libération.

Réengagé, William Powell avait participé à la Guerre de Corée et terminé en 1960 sa carrière dans l'US Air Force comme Capitaine. En 1984, William Powell et sa femme Yvonne ont fait le voyage vers la Belgique pour revoir Lucie LEPOIVRE à Gondregnies.

Décédé en 1997, William "Jake" Powell repose au Fayetteville National Cemetery à Fayetteville, Arkansas.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters