Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 20 septembre 2023.

Earl George PRICE / R84592
219 Germain Street, Saint John, New Brunswick, Canada (318 Esther Street, Pembroke, Ontario en 1947)
Né le 7 septembre 1921 à Canterbury, York County, New Brunswick, Canada / † le 5 février 1979 à Pembroke, Renfrew County, Ontario, Canada
Sgt RCAF, RAF Bomber Command 158 Squadron, bombardier
Atterri en parachute entre Nunspeet et Epe, à 15 Km au sud-ouest de Zwolle, Pays-Bas.
Handley Page Halifax Mk II - W1215 - NP-C "Charlie", abattu dans la nuit du 5 au 6 août 1942 lors d'une mission sur Bochum, par un chasseur du 111./NJG1 (Lt August Geiger).
Écrasé à 01h28 à Oldebroek (Gelderland, Pays-Bas)
Durée : 5 semaines.
Passage des Pyrénées : 9 septembre 1942.

Informations complémentaires :

Rapport d'évasion d'Earl Price SPG 3311/972 (incomplet).

L'appareil décolle d'East Moor à 22h13 et, au retour de leur mission remplie avec succès (bombardement sur Bochum, dans la Ruhr), ils sont attaqués par un avion de combat de nuit allemand. L'appareil est en feu et l'ordre de l'évacuer est donné.

Le pilote, P/Off Clive Henry Phillips, RAAF et le mitrailleur arrière P/Off John Edwin Marshall, RAF, seront tués. Ils sont inhumés au Cimetière municipal d'Oldebroek en Gelderland, Pays-Bas.

Quatre hommes seront fait prisonniers : Sgt D. H. Furness, RAF, mécanicien (Stalags VIIIB et 344 à Lamsdorf puis Stalag Luft 7 à Bankau), P/Off Leslie Vincent Harvey, RAAF, navigateur (s'adresse à une ferme au lever du jour ; on l'y nourrit et soigne ses blessures avant de devoir appeler les Allemands, vu sa condition ; interné au Stalag Luft 3, Sagan), Sgt W. A. Thompson, RAF, mitrailleur (Stalags VIIIB et 344 à Lamsdorf) et le Sgt J. A. Byrne, RAF, opérateur radio/mitrailleur dorsal (Stalags VIIIB et 344 à Lamsdorf).

Earl Price, qui sera le seul évadé, atterrit dans un champ à environ 15 km au Sud-Sud-Ouest de Zwolle. Dans son rapport d’activités, Jacobus HOS, qui campait sur le terrain d’une ferme près d’Oldebroek, indique qu’il a trouvé Earl Price le 8 août dans les bois de la Veluwe, près de Nunspeet. L’aviateur n’était pas blessé, mais n’avait pas de chaussures… HOS (habitant au 51 Indiëstraat à Haarlem lors de la rédaction de son rapport en janvier 1946) déclare qu’après lui avoir donné à manger et des vêtements civils, il a confié Price à Hendrik ELBERTSEN au 59 Apeldoornseweg à Hoenderlo, au sud-ouest d’Apeldoorn. Le fils, Hendrik Jan ELBERTSEN le guide ensuite à vélo vers la frontière belge et ils arrivent vers 18 heures à 's Hertogenbosh. ELBERTSEN le quitte pour rentrer chez lui et Price roule désormais seul vers le sud et, le 19 août, le jour du raid sur Dieppe, se trouve à 6 km de la frontière belge, au sud de Tilburg. A noter que dans son propre dossier, ELBERTSEN père mentionne avoir aidé Price (21 jours…) de fin août à septembre et l’avoir "transporté vers la Belgique en septembre"...

Price contacte un officier des douanes Hollandais qui l'aide à traverser la frontière. Arrivé aux abords de Turnhout, il contourne la ville où se trouvent trop de troupes allemandes. Vers le 22 août, il arrive finalement à un petit hôtel appelé "Les Sapins" ("De Sparren" ?) près de Herselt (entre Geel et Aarschot), chez Mme Jean DELOGIE, une patriote convaincue qui est disposée à héberger des aviateurs n'importe quand et habitera plus tard 5 Rue Max Roos à Schaerbeek.

En septembre 2013, Michel Mesmaekers nous a transmis un rapport établi le 19 septembre 1946 par Arseen VAN HOVE. Celui-ci y indique que Earl Price a été pris en charge du 24 au 27 août par lui au 61 Dorpstraat à Oevel (à 12 km au nord de Herselt) . VAN HOVE a prévenu par téléphone Jan Jozef STEVENS (du 23 Herentalsstraat à Turnhout) de la présence de l’aviateur chez lui et tard dans la soirée du 27 août, STEVENS est venu chercher Price pour le guider ailleurs (endroit et autres personnes inconnues). Jan STEVENS, né le 1er mars 1921, était actif dans la Résistance (membre du B.N.B. – Belgische Nationale Beweging / M.N.B. – Mouvement National Belge) et outre la distribution de journaux clandestins, il est renseigné comme aidant également à l’évasion d’aviateurs abattus. Il travaillait en collaboration avec le Groupe de Gustaaf WAUTERS, chef du B.N.B. pour la région de Geel. Price est le seul de ces derniers que nous pouvons donc relier à STEVENS. Ce dernier a été arrêté le 21 février 1944. Déporté en Allemagne, on le signale comme disparu au camp de Flossenburg en mars 1945.

Vers le 29 août, une jeune fille appelée Elsie (MARÉCHAL), dont la maman est anglaise, rencontre Price dans le village d'Averbode, à 8 km au sud-est de Herselt, et l'emmène à Bruxelles par le train. Price reste du 29 au 31 août chez les parents, Georges et Elsie Mary MARÉCHAL au 162 Avenue Voltaire à Schaerbeek. C'est là que Price reçoit de faux-papiers et une nouvelle tenue civile. Arrêté le 18 novembre 1942, Georges MARÉCHAL sera condamné à mort le 15 avril 1943 et fusillé le 20 octobre 1943 au Tir National à Schaerbeek, Bruxelles.

Le 31 août, Elsie MARÉCHAL le conduit à la gare et il part en train à Lille avec un guide qui est plutôt élégant, assez grand et le fils d'un comte (il s'agit de Georges d'OULTREMONT). Au cours du trajet, Price est fouillé par des policiers français mais n'est pas davantage inquiété. Arrivés à Paris, les deux hommes sont accueillis par une femme ("a dark woman") qui les conduit vers une place où ils rencontrent un homme plutôt âgé avec des lunettes aux verres épais. C'est Frédéric DE JONGH, qui envoie Price passer deux jours dans un petit magasin en banlieue, l'épicerie tenue par Reine THOMAS et sa mère, au 25 Rue Bapts à Asnières. Reine THOMAS sera arrêtée à Paris le 7 juin 1943, en même temps qu’Aimable FOUQUEREL et Lucienne LAURENTIE (née SERRES), tous deux habitant au 10 Rue Oudinot dans le VIIe. Tous sont tombés de la faute du traître Jacques Désoubrie, travaillant pour la Gestapo. FOUQUEREL sera fusillé au Mont Valérien à Paris le 28 mars 1944, en même temps que Frédéric DE JONGH et Robert AYLÉ. Lucienne LAURENTIE sera déportée en Allemagne, transférée au camp de Ravensbrück (prisonnière 35231) le 6 avril 1944, puis à celui de Flossenburg (50727) et libérée du Kommando (camp de travail) de Holleischen (Holysov), Tchécoslovaquie, le 3 juin 1945. Quant à Reine THOMAS, épouse MAGUERET, elle reviendra du camp de Ravensbrück en mai 1945.

Le 2 août (selon son rapport, de même que celui d’Arthur Fay), Price accompagne deux jeunes filles en train vers Bayonne. Dans le même convoi se trouvent un autre canadien, Arthur Fay, un anglais, Thomas Broom et un polonais, Kazimierz Rowicki. A Bayonne, une femme monte dans le train et leur fournit des tickets pour Saint-Jean-de-Luz. Elle est accompagnée d'"un homme grand et mince", "Bee" Johnson. Earl Price est repris comme convoyé par Jeanine DE GREEF pour le mener chez sa famille à Anglet.

Arrivé à Saint-Jean-de-Luz, Price et les autres logent chez un Basque jusqu'au 5 septembre. Il s'agit de Ambrosio SAN VICENTE ARRIETA, au 2ème étage du 7 Rue Salagoïty, près de la gare. C'est le 22e passage de Comète par la route classique via la gare minière de San Miguel sur la Bidassoa.


Mot de remerciement dans le carnet de Ambrosio San Vicente.


Repas au 7 Rue Salagoïty.

Lui et les quatre autres partent alors avec un guide basque vers la frontière. Ils sont interceptés par des douaniers espagnols et, tandis que Price et Fay sont pris, les autres peuvent échapper. Price et Fay passent la nuit dans un poste et sont envoyés le 7 à Irun (selon le rapport de Price, mais ce doit être le 9, puisqu'il avait signé le livre à Saint-Jean-de-Luz en date du 7). Ils restent là une semaine dans de mauvaises conditions, n'y étant interrogés que sur leur seule identité. Le 15 septembre, ils partent pour Miranda, où on les interroge plus en profondeur sur leur unité, type d'appareil, cible, comment ils furent abattus, et sur leur assistance à l'évasion. Leur interrogateur, un agent de la Gestapo se faisant passer pour un prisonnier australien, est décrit comme petit, roux, portant lunettes. Un autre gestapiste, habituellement accompagné d'un chien, a une attitude devenant de plus en plus polie au fil du temps et il ne les interroge plus autant que son collègue.

Le 28 octobre, après six semaines d'internement, Price et Fay quittent Miranda et vont loger à l'hôtel Mora à Madrid pendant quelques jours. Ils partent pour Gibraltar le 1er novembre et ils s'envolent de là le 7 novembre en Dakota pour l'Angleterre où ils atterrissent à Portreath le même jour.

Certaines différences sont manifestes entre les rapports de Price et de Thomas Broom quant aux diverses dates et à la composition des équipes entre Paris et Saint-Jean-de-Luz. Il est possible que la confusion soit due aux conditions de leur incarcération en Espagne.

Earl Price est interrogé à Londres le 8 novembre 1942 et la date de son retour au Canada est mentionnée dans sa lettre au baron Paul Greindl, père de Jean, datée du 6 août 1947 : "Après quelques jours de congé et une visite à mon ancienne escadrille, je retourne au Canada, atterrissant à Halifax le 12 décembre 1942."

Earl Price reçut la 'Distinguished Flying Medal' en 1943 pour la réussite de son évasion (https://www.thegazette.co.uk/London/issue/35891/supplement/651) mais il dira que ceux qui méritent le plus une médaille sont en fait les membres de l'organisation grâce à qui il doit d'être toujours là. Après son retour au Canada, Earl Price suivra des cours de pilotage, obtiendra son brevet le 15 octobre 1943 et recevra un autre matricule, le J.37115, mais il ne reprendra plus le combat, restant cependant en service au Canada avant d'être démobilisé le 23 janvier 1945.


Photo d’Earl Price que nous a envoyé son fils Michael en septembre 2014
et le montrant à Ottawa, probablement en 1943, étant devenu instructeur de vol.


Photo d’Earl Price en 1944 que nous a envoyé son fils Michael en septembre 2014


Earl Price, peu après la guerre, présentant le journal télévisé
de la chaîne Channel 5 à Toronto, Canada.


Les retrouvailles d’Elsie Marechal, Earl Price et Reine Thomas (Mauguaret) en 1974 à Montebello,
sur le fleuve Ottawa, Province du Québec, Canada.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters