Dernière mise à jour le 4 décembre 2016.
John René WHITLEY / 24002
Base de Linton-on-House, Yorkshire, Angleterre
Né le 7 septembre 1905 / décédé le 26 décembre 1997
Group Captain, RAF Bomber Command 76 Squadron, copilote
Lieu d'atterrissage : aux environs de Martigny, Aisne, France
English Electric Halifax MkII MP-V , N° série JB871, abattu par un chasseur du 3./NJG4 (Ofw. Walter Piwarz) dans la nuit du 10 au 11 avril 1943 lors d'une mission sur Frankfurt.
Écrasé vers 2h00 près de Hirson, à environ 15 km au NE de Vervins, Aisne, France.
Durée : 4 semaines
Passage des Pyrénées : le 10 mai 1943
Rapport d'évasion SPG n° 3313/1211.
L'avion décolle le 10 à 23h11 de Linton-on-Ouse et, après avoir largué ses bombes, est attaqué sur le chemin du retour volant à une altitude d'environ 5000m.
Le pilote, Fl/Lt Arthur Horace Hull, 26 ans, maintient le contrôle de l'appareil, de manière à permettre à son équipage de sauter. Cela lui coûtera la vie et on retrouvera son corps dans les débris de sa cabine de pilotage.
Trois autres hommes seront également tués : les sergents George Alfred Bozier, radio ; Philip Edwin Matthews, mitrailleur et Walter John Painter, navigateur. Comme Arthur Hull, ils sont tous enterrés dans le Cimetière Communal d'Hirson (Aisne), France.
Les quatre autres réussiront à s'évader : Whitley, ainsi que Malcolm Strange , Maurice Davies et John David. John Whitley commandait la base de Linton-on-House depuis le 23 mai 1941 et sera le plus haut gradé des officiers de la RAF ayant réussi leur évasion en Europe de l’Ouest. Il atterrit dans la cour d'une ferme en Aisne avec des vêtements d'évasion sous son battle dress. Il reste quelques heures chez le fermier, reçoit un chapeau et reste caché dans une grange jusqu'à l'aube. Il commence alors à marcher. Il approche une ferme isolée, où Mme Suzanne RICHET le laisse entrer et lui dit que son mari est prisonnier de guerre. Elle le laisse dormir 10 heures, tandis qu'elle part voir son père à Martigny, à 5 Km. Dans l'après-midi du 11 avril, le père arrive avec Julien MAHOUDEAUX, marchand de bestiaux et maire de Leuze, et ils l'interrogent. On doute un peu de certains éléments de son histoire car Strange et Davies, cachés non loin de là, avaient déclaré comme volant comme second pilote en leur compagnie, un "colonel avec une grosse moustache". L’homme recueilli par les résistants n’en portant pas, ce n’est qu’après ses explications quant à sa décision de couper ces poils trop voyants et sa rencontre par la suite avec les deux autres, auprès desquels on le conduit en voiture, que l’affaire fut réglée.
La nuit suivante, le 12 avril, MAHOUDEAUX revient avec un camion et le conduit chez lui à Leuze, dans l’Aisne, où Whitley fait la connaissance de son épouse, de sa fille Geneviève, d’un garçon appelé Roger et d’un autre appelé Daniel. Whitley y reste trois semaines, du 12 avril au 3 mai. A la longue, Whitley commence à s'inquiéter des visites fréquentes de voisins et du manque de discrétion de MAHOUDEAUX.
Émile FONTAINE, un résistant d'environ 40 ans arrive enfin. Il lui annonce que Maurice Davies et Malcolm Strange sont cachés dans d'autres maisons du village. Une nuit, M. FONTAINE arrive avec Strange et Davies, qui retournent ensuite dans leurs cachettes. Le lendemain, FONTAINE revient avec un Adrien FOURNAISE (alias "Muirion"), employé en gare de Liart et maire d'un village voisin en Ardennes : Aouste. Ils partent tous trois à vélo observer un site de radar. Un autre jour, Whitley est amené chez un photographe pour des photos d'identité. Ce photographe est un lieutenant gaulliste qui avait été parachuté à deux reprises en France occupée. Il avait un jour éliminé un homme prétendant être un aviateur abattu et qui tentait de pénétrer la ligne d'évasion. A noter qu’Émile FONTAINE (né en 1905), "Tanguy" dans les F.F.I. (Forces Françaises de l’Intérieur), était agriculteur à La Fontaine, à Aubenton. Engagé dès 1941 dans la Résistance, il est tombé dans un piège, vraisemblablement sur dénonciation, a été arrêté le 30 mars 1944 et abattu en tentant d’échapper à la Gestapo. Une rue d’Aubenton porte son nom. Quant à Adrien FOURNAISE, né le 7 mai 1902 à Mézières, il a été arrêté par la Gestapo le 24 décembre 1943 et trouvera la mort le 18 février 1945 lors d’un transfert de prisonniers vers le camp de concentration de Dora en Allemagne.
Le 1er mai, Strange et Davies sont évacués du village de Leuze.
Le 2 mai, Whitley est amené à Paris. Il est d'abord conduit à la gare d'Aubenton, entre Aouste et Leuze. Voyage en 3e classe jusque Liart. Là, ils changent de train pour Charleville-Mezières, où un homme plus âgé, M. "Poiné" (Georges POIRIER) les rejoint. Cet homme les guide à une maison à plus d'un Km, où ils passent la nuit. Georges POIRIER habite au 22 Rue de Wailly à Mézières. Georges POIRIER a été arrêté le 18 novembre 1943 et décède, torturé à mort, à la prison de Charleville le 4 juin 1944. Son fils André avait rejoint la RAF et avait été abattu près de Hesdin, Pas-de-Calais, y faisant un atterrissage forcé le 17 août 1943 (Spitfire MH419). André étant parvenu à s’évader, son père était passé le voir à Paris. André POIRIER resta en France et commença à travailler dans la ligne d'évasion Bordeaux-Loupiac de Jean-Claude CAMORS, qui fut abattu en octobre 1943 à Reims par le traître Roger Leneveu alias "Le légionnaire". Après cet incident, André revint habiter chez ses parents. Il fut arrêté à Paris le 17 décembre 1943, envoyé au Stalag Luft 4, libéré par des troupes russes au printemps 1945. Considéré comme espion, il sera incarcéré par les Russes mais, récupéré par d’autres prisonniers, il arrivera à Odessa d’où il rentrera par bateau à Glasgow. Resté en Angleterre, il mourra lors d’un vol d’entraînement le 16 décembre 1945.
Le 3 mai, Georges POIRIER reprend Whitley à la gare de Charleville-Mézières, où ils quittent M. FONTAINE. Dans le train, le chef local de la police est présenté. Il fait office de diversion pour les contrôleurs allemands. Whitley arrive à Paris l'après-midi à la gare de l'Est et prend le métro pour sortir aux Invalides. Ils vont à un ilot d'appartements et montent à pied au quatrième car l'ascenseur est en panne.
Selon Whitley, ils rencontrent un homme ayant l'air jeune, Aimable FOUQUEREL, qui les amène chez lui au 10 Rue Oudinot. Strange et Davies sont déjà là avec plusieurs autres aviateurs dont Robert Laws, qui parle très bien le français. Une jeune femme arrive et emporte des aviateurs, laissant Whitley, Strange, Davies et Laws. "Paul", un assistant d'Aimable d'environ 18 ans passe à l'appartement. Aimable explique à Whitley que son concierge pense que tous ses visiteurs viennent se faire masser chez lui, et que son boulot principal est de soigner un vieil amiral. Un jour, Aimable guide les quatre aviateurs au Bon Marché afin de réaliser des photos d'identité au Photomaton.
Les versions divergent quant aux dates. Ce serait le 4 mai que John Whitley aurait été placé dans une maison à Aubenton (Aisne) et réuni à Robert Laws, qui parle très bien le français. Les deux hommes quittent Aubenton le soir même pour Charleville-Mézières, où ils prennent un train pour Paris. Ils sont apparemment guidés par la ligne Chauny et le voyage se passe sans encombre, bien qu’aucun des deux ne soit muni d’une carte d’identité. Arrivés à la Gare de l’Est, Whitley et Laws prennent le métro et, guidés par Aimable FOUQUEREL, ils arrivent à son flat au 10 Rue Oudinot à Paris, où se trouvent les Sergents David Bradley et Bill Allen. Dans un récit postérieur, Bradley parle de Whitley, mais en disant qu'il l'a rencontré brièvement chez la mère de Leslie de Bizien, non loin de Montmartre. Frédéric de Jongh passe voir les six évadés avant que le groupe soit dispersé, Strange et Davies restant cependant ensemble jusqu'à ce qu'ils parviennent au pied des Pyrénées.
Vu l’exiguïté du flat de FOUQUEREL, Whitley et Laws vont passer la nuit dans le flat d’une dame, non-identifiée, à un autre étage. FOUQUEREL les avait pris en photo au Photomaton du magasin Au Bon Marché le 7 mai et leur avait annoncé un départ imminent. Jacques TINEL, du 254 Boulevard Saint-Germain Paris VIIe, qui vient en renfort de Jean-François NOTHOMB ("Franco"), vient les prendre en charge, après avoir bu du champagne pour célébrer leur départ. Au soir du 8 mai, Whitley et Laws sont menés à la gare d’Austerlitz où ils rencontrent un nouveau guide et le sergent Gordon Brownhill. Les trois évadés montent à bord du train pour Nantes où ils changent de train pour se diriger vers Bordeaux. Les faux papiers de Whitley l’identifient comme boucher, Laws comme coiffeur.
A bord du convoi se trouvent également Bernard Marion et David Sibbald, accompagnés de "Jacques" (Jacques TINEL). Etant d'origine francophone, Marion pourra tenir une conversation durant le voyage, Sibbald devant simuler une extinction de voix.
Ils arrivent le 8 mai à Nantes et vers midi à Bordeaux (ce serait plutôt à 9 heures du matin le 9 mai). Tous les aviateurs se retrouvent dans la gare où, suite à un exercice d'alerte aérienne, ils ne sont heureusement pas contrôlés. Jacques les conduit à un café où ils rencontrent Jean-François NOTHOMB ("Franco"), qui leur remet à chacun de nouvelles cartes d'identité et un Permis de Circulation "allemand". Il leur est annoncé qu'ils voyageront par trains locaux. Tous quittent la gare à pied individuellement dans la direction de Saint-Jean-de-Luz. Au début de l'après-midi, ils se regroupent et prennent le train pour Dax où ils arrivent vers 16h30. Arrivés à Dax, guidés par Jacques, ils prennent une chambre à l'Hôtel du Terminus, 81 Avenue Saint-Vincent-de-Paul à Dax. A la grande frayeur de Whitley, ils mangent avec des Allemands. Le gérant de l'hôtel vient et se met à discuter avec Jacques TINEL et Robert Laws. Whitley reste suspicieux jusqu'à ce qu'il lui soit dit qu'il s'agit d'un groupe de Français tentant de rejoindre l'Espagne. Une fois ce point éclairci, ils y passent la nuit.
Marion, Sibbald et Brownhill quittent Dax à vélo, escortés par Jean-François NOTHOMB, qui les mène à Bayonne. Whitley décrit NOTHOMB comme se montrant nerveux et inquiet. Ce dernier les conduit à une grande maison où ils montent à un appartement. Il leur est demandé de rester calmes et NOTHOMB demeure nerveux et irritable à chaque bruit. Une jeune femme et un homme gras viennent apporter des victuailles à l'appartement. Ils sont rejoints le lendemain à l’appartement par Whitley, Laws et Jacques TINEL (remplaçant maintenant "Bee" Johnson) qui, eux, menés à la gare par NOTHOMB, avaient pris le train du matin après avoir passé la nuit à Dax.
Jean-François NOTHOMB, accompagné de Sibbald va le lendemain à Saint Jean-de-Luz pour chercher un vélo supplémentaire, de sorte qu'à son retour, il puisse refaire le voyage avec Whitley et Marion. Ils sont rejoints plus tard dans la soirée par Laws et Brownhill. Le groupe se disperse alors dans plusieurs cafés pour se retrouver par après, à l’exception de Sibbald. Ils pédalent ensuite tous vers la frontière espagnole, tandis que "Franco" ne cesse de tancer les aviateurs et leur parlant en anglais à voix haute. Fatigué, Whitley l'invite à se mêler de ses affaires et à se calmer. Vers 19 heures, ils arrivent à Saint-Jean-de-Luz et mangent à un café. "Franco" leur distribue des pilules de benzédrine.
Le même soir, avec NOTHOMB à présent calmé selon Whitley, le groupe se sépare par paires et longe la voie principale de chemin de fer au Sud de Ciboure, où ils revoient Sibbald et deux guides, dont Florentino GOIKOETXEA. Après un peu de repos au pied d’un remblai de chemin de fer, où ils sont observés par des soldats allemands en goguette, tous arrivent dans une ferme au pied des collines, la ferme Yatxu Baïta de Joseph LARETCHE, près d’Urrugne, où ils changent de pantalons et se chaussent d'espadrilles en vue de la traversée des Pyrénées.
Whitley, Brownhill, Sibbald et Laws quittent la ferme vers minuit dans la nuit du 11 au 12 mai. Le courant de la Bidassoa étant trop fort, ils sont obligés de faire un détour et atteignent Endarlaza juste avant l'aurore. Ils franchissent le pont d'Endarlaza, heureusement non gardé, et se retrouvent dès lors en Espagne. Ils constatent que Brownhill manque à l'appel et Florentino, Jacques TINEL et Jean-François NOTHOMB, partis à sa recherche, reviennent bredouilles. Le reste de la troupe suit la voie de chemin de fer menant à Hendaye (le train de la Bidassoa ou Txikito Tren) et, passant un tunnel et traversant un ruisseau, arrive finalement au terme de son échappée. Ils semblent avoir suivi la voie ferrée des mines d'Arditurri jusque Ergoien, passage en Espagne en traversant rapidement une passerelle (à la station électrique d’Endara) avant que des officiels des douanes ne puissent réagir. Plusieurs kilomètres plus loin en Espagne, ils rencontrent un nouveau guide. Ils sont enfin conduits à une ferme isolée dans la matinée, où ils essayent vainement de dormir. Le soir, ils se remettent en marche.
C'est le 43e passage de Comète par la route de Saint-Jean et le détour d'Endarlaza avec NOTHOMB, GOIKOETXEA et Jacques TINEL qui, remplaçant là aussi Bee Johnson, apprend l’itinéraire.
Ce 11 mai 1943, ils retrouvent Jean-François NOTHOMB auprès d'une voiture à la sortie d'un village (Oyartzun ?), conduite par un Espagnol. Whitley y monte avec Laws. Ils vont à San Sebastian et sont arrêtés par deux policiers espagnols cherchant des contrebandiers, qui les laissent poursuivre. Après la traversée de San Sebastian, ils sont dépassés par une grosse Renault qui s'arrête devant eux. Les passagers sont transférés dans cet autre véhicule, qui les conduit à Madrid.
Brownhill quant à lui, avait perdu ses compagnons de vue dans les montagnes et avait décidé de poursuivre sa marche tout seul. Arrêté à sept km de la frontière par un garde espagnol, il passe deux jours en prison, puis deux autres dans un hôtel avant d'être autorisé à se rendre à San Sebastian pour voir le consul Britannique. Après deux autres semaines dans un autre hôtel et deux jours dans la prison de Saragosse, Brownhill est envoyé au camp de Miranda de Ebro où il reste environ deux semaines.
John Whitley et Robert Laws atteignent Gibraltar, qu’ils quittent le 24 mai 1943 par avion pour arriver le lendemain à Hendon en Angleterre. Après son évasion, John Whitley est décoré de la DSO et est promu Air Commodore quelques mois plus tard. Promu Air Vice-Marshall en février 1945, il prend le commandement du 4 Bomber Group et plus tard du 8 PFF Group. Après un passage au Air Ministry et au Imperial Defence College, il rejoint la 2nd Tactical Air Force comme Officier aviateur en charge d'administrer ce QG (à Rheindalen, non loin de Mönchen-Gladbach) en Allemagne.
Voir une biographie de John Whitley à la page http://www.raf.mod.uk/history/bombercommandcommandersofworldwarii.cfm.