Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 4 mai 2021.

Kenneth Fredrick FAHNCKE / 15329254
Regional Route 1, Celina, Liberty, Mercer County, Ohio
Né le 13 mars 1921 à Rockford, Ohio / † le 21 juillet 1993 à Pleasanton, Buffalo County, Nebraska
Sgt, USAAF 92 Bomber Group 327 Bomber Squadron, mitrailleur arrière
Atterri dans les environs de Bassenge, Province de Liège, Belgique.
Boeing B-17 F60 DL Flying Fortress, n° série 42-3435, abattu le 17 août 1943 par des chasseurs lors d'une mission sur Schweinfurt.
Écrasé près de Tongeren, débris éparpillés sur Neerrepen, St Huibrechts-Hern et Kuttekoven, Province de Limbourg, Belgique.
Durée : 10 semaines
Passage des Pyrénées : le 3 octobre 1943

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 654. Rapport d'évasion E&E 225 disponible en ligne.

C'est la première mission de Kenneth Fahncke, comme pour 5 autres membres de l’équipage ce jour là, inconnus du pilote qui n’a jamais volé avec eux. Le 42-3435 est flambant neuf et a été livré à la base la veille seulement.

L’appareil décolle d’Alconbury vers 11h00 du matin et au-dessus de la côte belge, la formation est attaquée par plusieurs chasseurs ME-109 et Fw-190. L’appareil est touché dans deux moteurs qui commencent à vibrer et cracher de l’huile, d’autres obus atteignant le gouvernail. Dans sa tourelle arrière, Fahncke est légèrement blessé au bras et de petits éclats se logent dans ses doigts, l’empêchant d’actionner correctement sa mitrailleuse. Sur le vol du retour, après le largage des bombes, le B-17 est à nouveau attaqué par des chasseurs et, faisant plusieurs manœuvres d’évitement, perd le contact avec le reste de la formation. Les ennuis mécaniques s’accumulent et sous les attaques répétées des chasseurs, l’appareil est tellement endommagé que le pilote Captain Roland L. SARGENT donne l’ordre de l’évacuer. Le B-17 explose peu après que l’équipage l’ait abandonné et ses débris sont éparpillés sur plusieurs villages. Un compte-rendu complet de la mission elle-même est à cette page.

En plus de Fahncke, trois autres members de l’équipage parviendront à s’évader : James Berry, Harry Richards et George Mikel ce dernier se faisant arrêter plus tard.

Les six autres seront arrêtés et faits prisonniers : le pilote Captain Roland L. SARGENT, le copilote 1st Lt Keith E. BYINGTON, le navigateur Captain Robert T. McNEELY, tous trois arrêtés près de la Gare du Nord à Paris une dizaine de jours après le crash ; le mitrailleur ventral Sgt John J. WHITLEY et le mitrailleur droit S/Sgt Nathan SCHWARTZ.

Le rapport E&E 225 de Fahncke est très succinct. Une grande partie de son évasion étant similaire à celle de Joseph Walters, le rapport E&E 224 de ce dernier, plus complet, couvre leurs deux expériences. Fahncke ne se trouve pas loin de l’endroit où Walters a été recueilli et il se trouve dans un camion Chevrolet conduit par un belge qui avait été chauffeur de taxi à New York lorsqu’il charge Joseph Walters pour les mener à une fonderie à environ 7km de Boirs où le contremaître les garde pour la nuit dans son bureau, un médecin arrivant le lendemain pour soigner les blessures de Fahncke. Le docteur était accompagné d’un homme auquel les deux aviateurs remettent les photographies en civil de leur kit d’évasion pour l’établissement de faux papiers. Vers midi, une auto arrive amenant un homme et une femme, un vieillard et un gendarme et ils emmènent les deux aviateurs en voiture chez un prêtre à Liers près de Liège où ils rencontrent leurs co-équipiers Moore, Kiniklis et Bruzewski.

Il nous paraît que le chauffeur du premier camion (l’ex chauffeur de taxi de New York) doit être Ghislain MICHELEMS du service Bayard (non cité dans les rapports E&E – habitant 62 Rue Bas-Rhieux à Liège) mais dont nous savons que c’est lui qui a conduit les deux évadés chez le docteur Charles KREMER, podologue, au 3 rue des Prémontrés à Liège. [ Arrêté le 11 décembre 1943 avec son épouse Clémentine, Charles KREMER est fusillé à la Citadelle de Liège le 26 janvier 1944.]

Le rapport de Walters poursuit en indiquant que pendant les deux jours que Fahncke, Moore, Kiniklis, Bruzewski et lui passent là dans la même pièce, ils y sont rejoints par King (qui doit être le mitrailleur gauche de Walters), Roy Claytor, Raymond Nutting et Lorch (il s’agit du 2nd Lt Kenneth R. Lorch, bombardier à bord du même appareil que Claytor, Nutting et John Burgin, mais qui sera fait ultérieurement prisonnier.)

On renseigne Walters comme logé (avec Fahncke…) pendant "une vingtaine de jours" (du 20 août au 03 septembre) chez Paul FREROTTE, un résistant du MNB, habitant "13 Rue de Mambourg" à Liège selon la liste des Belgian Helpers établie après la guerre en vue de l’attribution de récompenses. Le rapport de Walters indique qu’ils (le groupe des neuf américains) restent "là" jusqu’au 3 septembre (nous comprenons "chez FREROTTE"…) date à laquelle Walters, Fahncke et Claytor sont partis vers Bruxelles en train guidés par un homme. L’homme n’est pas identifié dans le rapport, mais il doit s’agir de Victor VAN DEN SANDE, habitant 13 Rue de Visé à Bressoux-Liège. Arrêté par la suite, il trouvera la mort à 28 ans le 26 février 1945 au camp de Dora en Allemagne.

La suite du rapport indique qu’arrivés à la gare, les 3 hommes sont pris en charge par le fils de Mr et Mme KATZ qui les mène dans la maison de ses parents près de l’aéroport (vraisemblablement à Evere…) chez qui ils prennent le repas du soir. Le fils KATZ les guide alors vers une maison où ils logent jusqu’au mercredi 8 septembre. Avertis par KATZ d’une possible descente de la Gestapo, les évadés quittent leur planque et vont dormir une nuit dans un bois. Claytor et Fahncke sont ensuite séparés de Walters, Fahncke passant quelques jours par le centre de rassemblement chez Hélène CAMUSEL au 160 Rue Marie-Christine à Laeken avant d’être est hébergé chez Simone CANCELIER, belle-mère de Jules DRICOT, au 8 Rue de la Réforme à Ixelles. Le 25 septembre, Fahncke retrouve Walters à la gare où ce dernier est amené par Florentine PIRART-DE WIT.

Ils descendent en gare de Tournai et sont guidés jusqu’à Blandain, près de la frontière française, où, dans une maison appartenant à un Français, ils rencontrent deux hommes, l’un d’eux étant un avocat ou notaire à Bruxelles. On les fait passer la frontière, ils marchent le long d’une route, on s’arrange avec le douanier et ils montent dans un bus en direction de Lille. Les rapports ne mentionnent pas Henriette HANOTTE, mais elle renseigne Walters (et donc également Fahncke) comme ayant été convoyés par elle dans ce passage. L’E&E 224 indique que le voyage en train jusqu’à Paris se fait en compagnie de deux hommes et qu’ils arrivent dans la capitale française le samedi 25 septembre vers 19h30. A noter que Joseph Walters et Fahncke figurent sur une liste d'Amanda STASSART, qui mentionne les avoir guidé jusque Paris.

Selon le rapport, Walters et Fahncke sont menés depuis la gare jusque chez Germaine BAJPAI où ils logent une nuit. Ils sont séparés le lendemain, Fahncke allant chez une Mme Raymonde (COACHE à Asnières), Walters allant chez "Daisy" (Marguerite) BENOIT au 3 Rue Jean Moréas, Paris XVII. Le 1er octobre, Fahncke le rejoint chez "Daisy" BENOIT, le rapport de Walters indiquant qu’ensuite, Mme BAJPAI et Mme Raymonde guident Walters et Fahncke vers un parc de l’autre côté de la Seine en face de la gare (ce pourrait être la gare de Lyon, du côté de laquelle ils se trouvaient avant de passer le fleuve, le jardin étant probablement le Jardin des Plantes ?), où ils rencontrent un homme – environ 1,72m, l’air d’un anglais, moustachu, les cheveux foncés, le visage boutonneux et dont Germaine BAJPAI dit qu’il est le chef de l’organisation ("Jérôme" = Jacques LE GRELLE).

Le chef leur dit alors de suivre la dame de petite taille qui l’accompagnait. La dame (Marcelle DOUARD ?) fait le voyage en train avec eux jusqu’à Bordeaux où elle les confie à un jeune belge ("Franco" = Jean-François NOTHOMB). A la gare, ils rencontrent Joseph Aquino, Charles Bennett et William Hooker. De Bordeaux, le groupe prend un train pour Dax où des vélos les attendent pour l’étape qui les mène à Bayonne où ils logent dans une taverne.

Voici le récit de Walters : Le vendredi 1er octobre, "un étudiant français" les guide dans le train de Paris à Bordeaux et ils y arrivent le samedi 2 au matin. Le guide les quitte et un autre les prend immédiatement en charge. Une demi-heure plus tard, ils sont dans le train pour Dax avec des tickets pour Saint-Jean-de-Luz. Ils reçoivent des bicyclettes à la gare et vont à Bayonne. Ils s'arrêtent avant la ville et passent la nuit au premier étage d'une auberge à Sutar (Chez Marthe MENDIARA née VILLENAVE) où passent beaucoup d'Allemands. Vers 17 heures, ils partent à vélo et grimpent vers les montagnes. On leur reprend les vélos et ils poursuivent à pied vers les Pyrénées dans l'obscurité, se mettant en route dans la soirée du 3 octobre.

Joseph Walters, Charles Bennett, William Hooker, Kenneth Fahncke et Joseph Aquino sont guidés vers la frontière espagnole par Jean-François NOTHOMB et Marcel ROGER.

C'est la 60e traversée de Comète avec le groupe de Pierre ETCHEGOYEN, Pierre et Baptiste AGUERRE et Jean ELIZONDO, qui passent par Larressore et Jauriko borda.

Vers 5 heures du matin le 4 octobre, ils arrivent en Espagne et se reposent un peu dans une ferme (Jauriko borda) avant de repartir pour se rendre à la police de Séville (sic). Le poste de police n'est qu'à quelques centaines de mètres des barrières où des gardes allemands patrouillent le territoire français (c'est donc à Dancharinea).

Sous escorte d'un soldat espagnol, ils sont conduits pour dormir une nuit à Urdax et partent le lendemain en bus à Elizondo depuis Telleria. Ils grimpent à bord d'un "train du 14e siècle" (le Txikito Tren) pour se rendre à Irun.

Après deux jours en prison (probablement à l'hôtel de ville appelé "Casablanca" que Walters décrit comme "une maison française"), ils sont remis au consul américain venu de Bilbao, signent un certificat de sécurité le 5 octobre et séjournent pendant 5 semaines à l'hôtel del Norte jusqu'au 6 novembre. Ils voient beaucoup de soldats allemands à Irun durant cette période.

Le 6 novembre, Joseph Walters et les autres sont conduits par le consul à San Sebastian et y dorment une nuit après avoir vu le major Clark. Après un dur et long trajet dans un véhicule de reconnaissance américain, ils arrivent à Madrid le 7 novembre.

Tôt le 9, ils descendent du train qui les emmène de Madrid dans une petite ville proche de Gibraltar (La Linea). Ils voyagent en 3e classe avec des soldats espagnols de la division Azul.

Un major les fait passer la frontière le 10, date à laquelle ils arrivent à Gibraltar. Ils y sont interrogés le même jour par un officier britannique, et le 19, ils décollent de Gibraltar, atterrissant à Bristol le lendemain. Fahncke est interrogé à Londres le 21 novembre par l’IS9.

Kenneth Fahncke repose au Mountain View Cemetery à Kingman, Arizona, USA.


Quelque part en Belgique en 1943 : debout de gauche à droite : Kenneth Fahncke, Joseph Walters et Roy Claytor.
Cette photo a servi à découper leurs photos d'identité.

Mot de remerciement de Fahncke dans le carnet de Pierre Elhorga.


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters