Dernière mise à jour le 13 aoûts 2023.
Marvin Thomson GOFF / O-688343
4709 Texas Avenue, Angleton, Texas, USA
Né le 2 novembre 1918 à Angleton, Texas / † le 5 septembre 2018 à Angleton, Texas
2nd Lt, USAAF 448 Bomber Group 713 Bomber Squadron, bombardier
Lieu d'atterrissage : près de Soissons, Aisne, France
Consolidated B-24J-130-CO Liberator, 42-110087, IG- /, abattu le 1er avril 1944 lors d'une mission sur Ludwigshafen
Écrasé près de Coulombs-en-Valois, Seine-et-Marne, France
Durée : 4 mois
Camps : Fréteval
Rapport de perte d'équipage MACR 3566. Rapport d'évasion du Lt Goff : E&E 999 disponible en ligne.
Le B-24 décolle de Seething vers 06h20 heure anglaise. L’appareil en tête de la formation et devant la guider sur l’objectif est abattu et son remplaçant prend le relais. Le 110087 ne largue pas ses bombes, perd 1 heure en se dirigeant vers le nord avant de reprendre contact avec la formation. Sur le vol de retour après le largage des bombes sur une cible d’opportunité, l'appareil encourt une panne de carburant et le pilote Mellor, au vu de la réserve de carburant, estime qu’il ne pourra rejoindre l’Angleterre et demande l’autorisation d’évacuer l’appareil, ce qui lui est accordé par l’officier dirigeant la formation.
Les neuf autres membres de l'équipage parviendront à s'évader. Outre le Lt Goff, il y a : le pilote Lt Harrison C. Mellor (E&E 1100) – caché en France et libéré dans l’Indre en septembre 1944); le copilote 2nd Lt Douglas J. Eames (E&E 2357 - caché en région parisienne jusqu’à la Libération en août 1944); le navigateur 2nd Lt Frank H. Jacobson (E&E 811 - évacué via les Pyrénées) ; l'opérateur radio T/Sgt Francis C. Marx (E&E 813 - évacué via les Pyrénées en juin 1944) ; le mitrailleur ventral S/Sgt Nelson A. Branch (E&E 812 - évacué via les Pyrénées) ; le mitrailleur gauche Sgt Mike Little (E&E 719 - évacué via les Pyrénées en avril 1944); le mitrailleur droit S/Sgt Ira R. Allen (E&E 721 - évacué via la ligne Bourgogne) ; le mitrailleur arrière S/Sgt Walter T. Bressler (E&E 720 - évacué via les Pyrénées en mai 1944).
Goff voit cinq parachutes ouverts lors de sa chute, et un qui ne s'ouvre pas. Il doit s’agir du mitrailleur dorsal/mécanicien T/Sgt William A. Warren, le seul tué. Initialement inhumé au cimetière de Beauvais le 4 avril, ses restes ont été transférés après la guerre à l'American Cemetery d'Epinal, France.
Marvin Goff atterrit vers 14 heures et demie sur une route pavée à l'orée d'une forêt près d'une localité dont il ignore le nom, supposant que cela devait être près de Soissons. Voici le résumé d'un récit qu'il nous a envoyé en août 2009, d’autres détails ayant été ajoutés, notamment sur base de son rapport d’évasion :
L'arrière-train endolori dans sa chute (ce qui l'empêchera de s'asseoir pendant plusieurs jours), il enroule son parachute, le dissimule sous un paquet de feuilles puis part en courant. Il marche à travers la forêt jusqu'au crépuscule et dort quelques heures avant de se remettre en marche en direction du Sud. Son kit d'évasion comporte une barre de chocolat concentré, quelques bonbons, un petit sac destiné à récolter de l'eau et des pilules d'atabrine pour la purifier, une petite boussole.
Ne marchant que la nuit, il s'abrite de jour dans l'une ou l'autre maison isolée, évitant les villages et les zones habitées. Il s'adresse à des gens qu'il rencontre, mais, par peur, aucun n'accepte de l'aider. Il passe sa seconde nuit dans une grange, repart le lendemain, pour y revenir le soir, n'ayant toujours trouvé personne acceptant de l'aider.
Le 5 avril à l'aube, il s'approche d'une église de village et frappe à la porte. Un vieillard lui ouvre, l'examine, lui donne un œuf et une pomme de terre avant de lui dire de s'en aller. Goff va se cacher dans des bois proches et mange pour la première fois depuis le début de la mission. Il passe la nuit suivante au milieu d'un champ de glycines.
Le 7 avril, il entre dans le village de "Levignon" (NB. : = Lévignen, dans l'Oise) mais n'ose pas y rester trop longtemps et retourne au champ pour y passer la nuit. Le lendemain dans la matinée, il s'adresse à deux bûcherons, qui lui donnent les tartines qu'ils ne terminent pas de manger. Il les avale, buvant du vin à la bouteille, puis le plus âgé des hommes le prend à part et lui dit de retourner vers sa cachette, l'avisant qu'il se méfiait de son compagnon. L'homme s'éloigne à vélo en direction de Lévignen et revient une heure plus tard avec un sac de victuailles, lui faisant comprendre qu'il devait rester caché jusqu'à son retour dans la soirée. Au crépuscule, l'homme revient avec deux vélos et un manteau pour l'aviateur et les deux hommes roulent jusqu'à Lévignen. L'homme frappe à la porte d'une maison et une dame, "Geneviève", s'adresse à lui en anglais et le fait entrer. Goff restera 13 jours dans la maison de Geneviève et de son mari Georges qui se cachait, recherché par la Gestapo. Dans son E&E, il dit qu'il s'agit de Georges ARDENOIS, à Levignen. Il se confirme qu’il s’agit bien de Georges et Geneviève ARDENOIS, agriculteurs à la rue d’En Haut à Lévignen. ARDENOIS dirige un maquis dans la forêt de Compiègne.
Le père de Geneviève, apparemment chef dans la Résistance et parlant assez bien l'anglais, passe prendre son identité pour vérification, brûle son équipement dans l'âtre et lui donne des vêtements civils.
Vers le 21 avril, Goff est mené vers une autre cache de la résistance chez un marchand de vins (il cite dans son E&E Georges DINOT à Parmain en Oise, qui s’avère être en fait l’ancien département de Seine-et-Oise, devenu depuis 1968 le département du Val d’Oise. Georges DINOT habitait le 5 Rue Guichard à Parmain), et de là, Goff est guidé vers Argenteuil, où il reste une dizaine de jours chez un couple de belges dont le mari ingénieur était forcé par les Allemands de travailler à la construction d'un aérodrome. [Il cite dans son E&E que c’était chez un certain Lucien VANDENBERG à L'Isle-Adam, "Belgian Forced Labor"; il semble donc avoir confondu ici la chronologie]
Nous savons que Geno Dibetta et Clyde Hewitt sont logés à Argenteuil au 6 Rue Antonin-Georges Belin, une pâtisserie appartenant à la famille VILLENEUVE, dont la fille Denise leur servira souvent de guide. Seul le nom de Mme Elisa VILLENEUVE à Argenteuil est repris à la liste des Helpers français établie après la guerre. Il doit s’agir de la maman de Denise. Marvin Goff et William Yanzek logent chez un "Mr BREDECHE". Confirmation : un Mr et Mme Jean BREDECHE sont repris à la liste des Helpers français avec comme adresse le même numéro 6 de la Rue A.G. Belin… Par ailleurs, le rapport E&E 999 de Marvin Goff indique qu’il rencontre William Yanzek dans la maison d'un prédicateur à l'Isle-Adam (il reprend "Pastor Nill, Rue Victor, Argenteuil") dans ce qui lui semble être un centre de rassemblement d'aviateurs évadés. Il s’agit en fait du pasteur André NEEL et son épouse Madeleine au 33 Rue Victor Puiseux à Argenteuil. Selon Goff, Yanzek et lui sont logés dans un appartement au quatrième étage du bâtiment, dont le gérant est propriétaire de la boucherie au rez-de-chaussée. Le boucher ou sa femme (nommé Marcel POITEVIN, 7 Rue "Boucheron" à Argenteuil) leur apportent régulièrement de la nourriture et ils restent là presque deux semaines, avant d'être relogés chez un marchand de charbon dans la même localité, au fond d'une impasse toute proche de la Seine. La liste des Helpers français reprend un Mr Jean et Mme POITEVIN au 7 "Bvd Boucheron" à Argenteuil, dont nous pensons qu’il doit s’agir du Boulevard Bourceron, non loin de la Rue Victor Puiseux.
Durant leur première nuit là, la RAF bombarde une usine de l'autre côté du fleuve et quelques avions anglais sont abattus [Il pourrait s'agir du raid sur Chambly dans la nuit du 1er au 2 mai ?] Ils apprennent au matin que des aviateurs ont sauté en parachute et sont recherchés par les Allemands. Leur hôte va chercher trois vélos et donne à Goff et Yanzek un brassard identique au sien, marqué de la Croix Rouge. Au détour d'un boulevard, une limousine noire s'arrête, bloquant la rue et plusieurs soldats allemands en uniforme noir en sortent. Les trois hommes, le marchand de charbon en tête, font demi-tour. La chaîne du vélo de Goff sort de son logement et le français le rejoint, lui donne son propre vélo en disant aux aviateurs de retourner à la maison du prédicateur.
Nous supposons que c’est par après que Yanzek et Goff sont passés chez les VILLENEUVE à Argenteuil. Toujours est-il, qu’ayant quitté ces derniers, ils se retrouvent en compagnie de Geno Dibetta et Clyde Hewitt lorsqu’ils sont menés par un PIERRE, lunettes noires, vers un magasin de fleurs à Paris (Robert PIERRE du 26 Avenue Pierre Ier de Serbie à Paris XVIe). Il s’agit du magasin d’Andrée DONJON, célibataire fleuriste au 60 Rue de Bellechasse à Paris VIIe, dont la maison (avec sa mère Marie Vichy) est un lieu de rassemblement d'aviateurs et sert de cloison étanche entre divers réseaux. Elle en loge au moins 5 ou 6 et en guide une trentaine à Paris ou Nesles-la-Vallée avant d'être arrêtée le 7 juillet et déportée. Née le 24 juillet 1914 à Nogent-sur-Marne, Andrée DONJON (reprise dans les documents allemands comme habitant au 46 Rue Jean Jaurès à Puteaux, faubourg à l’est de Paris) a été incarcérée à la Prison de Fresnes jusqu’au 15 août 1944, date à laquelle elle est déportée de Paris, gare de Pantin, dans le convoi FMD I.264 en direction de l’Allemagne. Arrivée au KL Ravensbrück le 21/08/1944 (matricule 57501). Transférée au camp de Buchenwald le 4 septembre (matricule 50332), puis à Ravensbrück le 19 octobre (52061). Détenue ensuite dans les Kommandos de Torgau, Abterode, Leipzig-Markkleeberg, elle est libérée le 22 avril 1945 à Freital (Allemagne) et est rapatriée en France en mai.
Selon le rapport de Goff, qui ne mentionne aucune date, ils sont amenés "par la suite" dans Paris, et sont logés dans un meublé inoccupé où ils restent environ une semaine. Un jour, une dame arrive et leur dit de la suivre à bonne distance. Après une heure de marche, ils la rejoignent dans son appartement où ils passent la nuit, deux autres aviateurs s'y trouvant déjà. Le lendemain, les quatre évadés, dont Geno Dibetta montent dans le métro avec elle. Un officier allemand se tenant à la même barre que Goff et DiBetta s'adresse à eux en français et ils ne le comprennent pas. Heureusement, ayant remarqué que l'Allemand tient une cigarette à la main, DiBetta lui donne du feu et on en reste là.
Descendus du métro, les autres hommes suivent la femme jusqu'à la gare d'Austerlitz où, en compagnie de plusieurs autres aviateurs, ils prennent un train qui les mène à Châteaudun. Là, ils suivent leur guide (Solange MERET, la fille d’Abel MERET de Châteaudun ou Daniel COGNEAU, également de Châteaudun…) et rencontrent Virginia d'ALBERT-LAKE. La colonne d'évadés suit une route et s'étire sur près de deux kilomètres, chaque petit groupe de deux ou trois marchant à distance l'un de l'autre. Goff et un autre aviateur (il ne donne pas son nom) sont pris en charge et menés à une belle demeure occupée par deux dames âgées, qui les logent dans une grange où elles leur apportent de la nourriture.
Ils sont ensuite guidés vers une autre ferme où ils rencontrent trois autres aviateurs et dorment dans le grenier d'une grange. Le lendemain, deux hommes arrivent à la ferme : Jean de Blommaert et Lucien BOUSSA avec sa radio. Le jour suivant, Goff et quatre autres évadés se rendent à pied dans la Forêt de Fréteval où ils logent dans un camp. Ils n'y restent pas longtemps, car vu l'arrivée d'autres évadés, il faut construire un deuxième campement à Richeray, à environ deux heures de marche du premier, que Goff rejoint en compagnie de de Blommaert et d'une quarantaine d'autres hommes. Dans son E&E, Goff déclare être arrivé le 10 août dans ce camp et y être resté avec William Davis.
Vers le 10 ou 11 août, Goff accompagne quelques évadés pour observer en surplomb la route qui va de Tours à Châteaudun. La route est encombrée de troupes allemandes en retraite. Quelques jours après, sentant la libération proche, Goff et quatre autres évadés se rendent au village de Fréteval, disent à des clients d'un café qu'ils vont à la rencontre des troupes américaines qui approchent et, n'écoutant pas les conseils de prudence, marchent en direction de Cloyes-sur-le-Loir, où la population les accueille presque comme des libérateurs... Une heure après leur arrivée dans le village, une patrouille américaine entre dans Cloyes et le lieutenant en charge de la colonne conduit les quatre aviateurs au Camp de Fréteval où il compte les déposer, se proposant d'envoyer des camions le lendemain pour emmener tous les évadés se trouvant dans le camp.
Goff refuse de descendre et lui et trois hommes persuadent le lieutenant de les ramener vers son bivouac où ils passent finalement la nuit sous bonne garde, leur identité devant encore être vérifiée. A noter que le cinquième évadé ne les avait pas accompagnés car il avait rencontré une fille à Cloyes et préférait rester avec elle au village.
Le lendemain, 14 août, tous les hommes du camp ainsi que Goff et ses compagnons montent à bord de camions qui les conduisent à un champ d'aviation, d'où ils sont rapatriés par groupes en Angleterre à bord de C-47. De retour à sa base à Seething, Goff y rencontre son pilote Mellor, arrivé quelques jours avant lui.
Goff est interrogé le 15 août par le Lt Cameron Blair, apparemment en France, avant de partir pour Londres.
William Yanzek, compagnon d’évasion de Marvin Goff a rencontré Philippe et Virginia d’Albert-Lake à Dayton, Ohio le 11 avril 1947, en même temps que William Davis, cité plus haut et Claude Leslie. Un article du Dayton Daily News du lundi suivant qui relate cette rencontre, mentionne que Yanzek avait rencontré Virginia d’Albert-Lake à Paris et qu’elle avait participé à l’organisation de son transfert vers le camp de Fréteval, tout comme celui de Davis et Leslie. Philippe et Virginia d’Albert-Lake avaient un appartement à Paris et une maison à Levallois-Perret.
Décédé en 2018, Marvin Goff repose au cimetière d’Angleton, Texas.