Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 27 juin 2017.

John Lewis GRIFFITHS / 1379633
"Helva" St-Mary's Drive, Rhyl, North Wales, UK
Né le 7 septembre 1921, Pen-y-Parc, Gwaenysgor (Prestatyn), North Wales / † ?
Sgt, RAF Bomber Command - 102 Squadron, mitrailleur arrière
Atterri dans les environs de Sibret, à une vingtaine de km au nord-ouest de Martelange, Luxembourg belge.
Handley Page Halifax Mk. II, W7677, DY-Q "Queenie", abattu par la Flak dans la nuit du 8 au 9 septembre 1942, au retour d'un raid sur Frankfort
Ecrasé à Rambrouch, 15 km à l'ouest d'Ettelbruck (G. D. Luxembourg)
Durée : 2½ mois
Passage des Pyrénées : le 21 novembre 1942

Informations complémentaires :

Rapport d'évasion SPG 3311/991 (complet).

Le Halifax décolle de Pocklington à 20h57 heure anglaise. Touché par la Flak au retour de Frankfort, l’appareil a son moteur extérieur gauche endommagé. De multiples ratés se développent et le pilote Sgt Farrel donne l'ordre de sauter aux environs de Martelange vers 1 heure du matin. Farrel reste encore aux commandes de l'appareil qui s'écrase.

Le pilote F/Sgt Francis Harold John Farrell, le navigateur Sgt John Goodson Phillips et l’opérateur radio/mitrailleur Sgt Owen Kidd Barclay sont tués. Ils reposent dans une tombe collective dans le cimetière de l’église de Folschette (Rambrouch) au Grand-Duché de Luxembourg. Le sergent K. R. Wright et le W/O Frederick Whitfield seront immédiatement arrêtés. Ce dernier mourra de cause naturelle en captivité le 5 mars 1945. Il repose au Berlin 1939-1945 War Cemetery.

Seuls John Griffiths (la présente fiche) et son coéquipier, le mitrailleur dorsal Edward Heap parviendront à s’évader.

Griffiths atterrit dans un arbre d'une forêt en province de Luxembourg. Il y laisse son parachute et se laisse tomber au sol (± 8 m), se coupant au nez et aux lèvres. Il marche jusqu'à l'aube, cherchant vainement des équipiers. Il se débarrasse de son "costume de tailleur" (un surtout de forme peu élégante que les mitrailleurs arrière ont en dotation) mais garde sa veste brune chauffante électrique pour être moins repérable. Il ne parvient pas à se localiser et marche à l'Ouest avec son compas de survie sur 15 Km, à travers des bois. Il n'ose pas approcher d'un village, ne sachant s'il est quelque part en Allemagne et marche ainsi cinq jours, couvrant ± 35 Km avec ses bottes fourrées et se reposant peu.

Le 12 ou 13 septembre 42, il atteint une ferme à Libramont. Affamé, il demande à manger et on lui explique les villages qu'il doit éviter entre Libramont et Dinant à cause des troupes allemandes.

Il marche vers le nord et arrive à Forrières où il est nourri, reçoit des souliers, une veste et une casquette. Il évite Rochefort et dort dans une ferme à 10 Km à l'Est de Beauraing, aux environs de Genimont (?).

Le 16, il poursuit sa route vers Givet. Un peu avant d'y arriver, des fermiers le font rentrer chez eux, lui donnent une paire de souliers et il dort devant le feu.

Le 17, arrivé en France, il doit traverser la Meuse dans Givet. Il continue en direction de Fumay, mais s’arrête à mi-chemin, est nourri et dort dans un petit hameau.

Le 18, il traverse Vireux-Molhain et Montigny-sur-Meuse. Un gosse lui demande "RAF ?" et lui fait signe de le suivre. Ils traversent la Meuse en barque et vont à une ferme près de Fépin, à environ 5 km au nord de Fumay. C'est à partir de là que son évasion est organisée. Le gamin vient lui dire qu'on viendra le lendemain pour lui.

Le 19, le curé et Gabriel Joseph MATHIEU, bourgmestre de Rienne (Belgique) depuis 1926, qui parle un peu l'anglais, lui demandent son identification. MATHIEU déclarera à la Sûreté qu'il l'a remis à Georges ADAM, de Rienne, et qu'il l'avait reçu du bourgmestre de Gros-Fays (Marcel BOURGUIGNON). Griffths reste deux semaines à cette ferme et ces personnes (du groupe de Rienne) viennent le voir trois fois avec des cigarettes, du chocolat, du thé et du sucre. [Le bourgmestre MATHIEU sera arrêté par la suite et, transféré en camps en Allemagne, d’abord à Buchenwald, puis à Langenstein-Halberstadt, mourra en mai 1945 à Waldersee-Dessau. Quant à Marcel BOURGUIGNON, arrêté le 25 mai 1944 à Gros-Fays, il sera envoyé lui aussi en Allemagne et passera par les camps de Buchenwald, Dora et Nordhausen, où il mourra de faiblesse et malnutrition le 3 mars 1945.]

Le 1er octobre, le gamin vient chercher Griffiths pour l’amener chez lui à Fépin. Une femme vient alors le chercher pour le guider jusqu’à Rienne et il y loge chez le bourgmestre MATHIEU. L'organisation de Liège, en amont, semble secouée, et on cherche une autre filière. En novembre 42, le groupe de Muno était sans nouvelles du SOE, André HEYERMANS ayant été arrêté ; il faudra attendre l'arrivée de deux autres agents du réseau SOE Physician-Prosper (Walthère MARLY et Pierre GEELEN) en mars 43 pour rétablir la liaison.

Le 3 octobre, Griffiths est conduit en vélo à Monthermé (France) et passe sans formalités de douane avec son guide (le douanier français PROST, brigadier aux Hauts-Buttés, au sud-est de Fumay, qui travaillait pour de nombreux réseaux).

De là, ils prennent le train vers Charleville-Mézières et Griffiths doit redonner son identification à une autre filière. On prend sa photo et il reçoit une carte française. Un "Breeze" (Étienne BRICE de Charleville-Mézières) va à Paris pour se renseigner sur le suivi de son évasion, mais revient avec de mauvaises nouvelles.

Griffiths part le 12 octobre avec un guide (du groupe Becco, filiale du réseau d'espionnage Bayard de Liège) via Sedan, Carignan et Muno en Belgique. Il reste six jours à Muno dans une ferme (la "Platinerie" dans les familles de Georges LEDANT-PRESTAT et Arthur DACREMONT, son beau-fils) et reçoit une carte d'identité belge par le réseau SOE Prosper, via Joseph GODFRIN, bourgmestre de Muno et Gaston BIAZOT, également de Muno. Il s'agit de la filiale Gaspard III de ce réseau.

Le 18, Griffiths part à Florenville et prend le train pour Liège avec une jeune Liégeoise, Clara QUANTEN (du 2 Rue Petite Voie à Herstal), qui travaille pour le réseau local de Prosper. Deux hommes les conduisent dans un café. Après deux heures, il apprend que la Gestapo a semé la panique, et qu'il aurait dû avoir rejoint Albert Arkwright, Henry Coombe-Tenant et Rupert Fuller, mais qu'ils ont dû déjà quitter leur cachette. Les demoiselles RITSCHDORFF les ont conduits au Boulevard Général Jacques à Etterbeek/Bruxelles.

La femme (Clara QUENTEN) le conduit alors au 14 ou 146 rue de l’Université à Liège chez "Jimmy" (James PARKER-KREMER), un Anglais qui sert d'hébergeur de secours, où il passe la nuit.

Le 19 octobre, Griffiths part chez le beau-frère de PARKER où il sera hébergé pendant deux semaines au n°3 Rue des Prémontrés par Charles KREMER et son épouse Célestine MOTTIN, boîte-aux-lettres de Bayard. Il apprend que l'organisation Marseille avait été démantelée, mais qu’il serait mis en contact avec une autre. Les KREMER hébergeront encore quatre ou cinq autres pilotes évacués par Comète, et 15 aviateurs au total.

Griffiths part ensuite loger "20 jours" au 13 Rue de Mambour, toujours à Liège, chez Paul FREROTTE, un résistant du MNB. BECCO (Nicolas BECCOZ ?) du réseau Bayard l'y a amené et il est remis au commissaire liégeois Louis RADEMECKER du 47 Rue Auguste Dunnay (qui sera arrêté le 6 décembre 1942 et mourra le 14 mars 1943 à la Citadelle de Liège). Via la jeune femme (Clara QUENTEN ?), Griffiths reçoit une authentique carte d'identité belge et passe à l'autre réseau (JAM), dont le chef (en fait un adjoint du capitaine Arthur RENKIN de Luc-Marc), un commissaire de police (Louis RADEMECKER), vient l'identifier.

Le 3 novembre (soit cette date est erronée, soit Griffiths n’est pas resté 20 jours chez FREROTTE…), il est amené en taxi à la gare d'Ans où il prend un train pour Bruxelles. Thérèse GRANDJEAN le guide à Bruxelles, chez le Dr Antoine GOETHALS au 34 Rue de la Vallée à Ixelles, et non pas comme d’abord envisagé, chez les "DE GROEVE" au 770 Chaussée de Gand à Molenbeek-Saint-Jean, l’architecte Arthur DE GROEVE et son épouse ayant été arrêtés le 9 octobre 42 (dans une vague d'arrestations dirigée contre le réseau Luc). [A noter que l’Almanach de Bruxelles pour 1939 reprend A. DE GROEF, architecte, à cette adresse à Molenbeek…]

Paul HOLEMANS, un agent du VMann Johan Vandecasteele de la GFP (Geheime Feld Polizei) parisienne, conduit Griffiths en début novembre chez Jeanne MONNIER-DEPOURQUE au 51 Rue Dupont à Schaerbeek. Conscient du danger, le baron Jacques DONNY intervient et prend les dispositions nécessaires pour faire bouger Griffiths.

Elsie Jeanette MARECHAL prend alors Griffiths en charge et le mène chez ses parents Georges et Elsie Mary MARECHAL au 162 Avenue Voltaire à Schaerbeek, mais il doit déménager après quelques jours. De là, la jeune Elsie MARECHAL conduit Jack Griffiths le 11 novembre chez une jeune veuve - Élisabeth FERAILLE divorcée et veuve WARNON, au 16 Rue Vanderhoeven à Saint-Josse - et il y voit une photo de Edward Heap, de son équipage, qui y a logé. Durant la semaine, Elsie vient lui apporter son passeport pour la France et lui apprend à répondre aux questions posées aux passages de frontières. Elsie MARECHAL et ses parents sont arrêtés le 18 novembre 1942 à la suite de l'arrivée de deux faux aviateurs américains (en fait des imposteurs allemands) en provenance des Ardennes.

Le 18 novembre, un Belge guide Griffiths en train de la gare du Midi jusqu’à Paris avec un ex-pilote qui rejoint la RAF (Jean-Louis Gheysens). Griffiths loge une nuit chez Frédéric et Andrée DE JONGH, très probablement à la villa du 6 Avenue des Érables à Saint-Maur-des-Fossés. Cette cache sera abandonnée après l'arrestation d'Elvire MORELLE chez les MARECHAL le 18 novembre, la villa étant louée à son nom.

Griffiths quitte Paris le 19 avec Andrée DE JONGH, Jean-Louis Gheysens et un Français (Marcel Mocquax).

Un Anglais ("Bee" Johnson) et une femme (Elvire DE GREEF) les rejoignent à Bayonne le 20. Ils restent quelques heures chez un Basque à Saint-Jean-de-Luz (Ambrosio SAN VICENTE, au 7 Rue Salagoïty) où ils signent dans le carnet des invités (voir ci-dessous), les trois évadés suivant alors Andrée DE JONGH en bus et à pied jusqu'à une ferme (Bidegain berri), d'où ils passent la frontière avec un guide basque espagnol. C'est le 29e passage de Comète par la route de Saint-Jean-de-Luz et la Bidassoa.


Mot de remerciement de Jack Griffiths dans le carnet d'Ambrosio San Vicente.

Ils passent la journée du lendemain dans une ferme en Espagne et vont en voiture à San Sebastian, où ils restent 3 à 4 jours chez Bernardo ARACAMA au n°7, 5e étage à gauche, Calle Aguirre, Miramon, à San Sebastian.

Griffiths est pris en voiture à Madrid et envoyé à Gibraltar après deux ou trois jours.

Il vole de Gibraltar à Hendon le 6 novembre [sic, ce doit être le 6 décembre] 1942 et est interrogé à Londres le 7 pour l’établissement de son rapport d’évasion.


Mention dans la London Gazette du 5 février de l’octroi de la DFM
(Distinguished Flying Medal) à John L. Griffiths et à son coéquipier Edward Heap.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters