Dernière mise à jour le 21 août 2022.
Edward Alexander CAMPBELL ("Red") / J-25414
250, Queensway Avenue, Humber Bay, Toronto, Canada
Né le 26 août 1923, King City, Ontario, Canada / † 4 mai 2016 à Paris, Ontario, Canada.
Fl/Lt RCAF, RAF Bomber Command 514 Squadron, pilote
Atterri près de Morenneville, au sud-ouest de Saint-Cloud-en-Dunois, Eure-et-Loir, France.
Armstrong Whitworth Lancaster MkII N° série : LL692 Immatriculation : A2-C, abattu par un chasseur (du 2./NJG 2 ? Lt Johannes Strassner ?) dans la nuit du 28 au 29 juillet 1944, lors d'une mission sur Stuttgart.
Ecrasé à la limite de Lutz-en-Dunois et Ozoir-le-Breuil sur une parcelle de la ferme de Villiers, près de Saint-Cloud-en-Dunois (Eure-et-Loir) à environ 10 km au sud-est de Châteaudun, Eure-et-Loir, France.
Durée : 2 semaines.
Camp Marathon : Fréteval.
Rapport d'évasion SPG 3348/103.
L'appareil décolle à 21h47 de Waterbeach. Touché à plusieurs reprises par des tirs de chasseurs allemands, deux de ses moteurs en feu, l'avion ne pourra regagner l'Angleterre. Le pilote Edward Campbell (la présente fiche), dont c'est la 25e mission, donne l'ordre de sauter.
Le Fl/Off Robert Roy Giffin, RCAF, sera le seul à perdre la vie. Récemment promu pilote, il avait été désigné spécialement ce jour-là, pour sa première mission, en tant que copilote et "huitième homme", l'équipage habituel d'un Lancaster n'en comportant que sept. Mort de ses blessures le 30 juillet, Robert Giffin repose au Cimetière municipal de Saint-Cloud-en-Dunois.
Seul le navigateur Sgt Earl F. Garland, RCAF, blessé à la jambe, sera fait prisonnier. Comme Campbell, tous les autres parviendront à s'évader : le mécanicien, Sgt W. Donaldson ; le mitrailleur dorsal, Sgt Earl Jones ; le bombardier, Fl/Off Jack Chapman ; le radio, Sgt Arthur Lyons et le mitrailleur arrière Sgt Sam Harvey.
Lorsque Campbell quitte lui-même l'avion en dernier, le déplacement d'air emporte ses bottes de vol. Il doit batailler ferme pour trouver le moyen d'ouvrir son parachute, mal endossé vu les difficultés à se mouvoir dans l'avion en vrille. Lorsque la panoplie s'ouvre, le choc entraîne des blessures à ses mains glissant trop rapidement le long des lanières et ses chevilles s'entrechoquent dans un craquement sourd. Il atterrit sur le dos dans un champ de blé à environ 300 m de l'endroit où son avion venait de s'écraser.
Devant une maison proche, il s'adresse à trois femmes en chemise de nuit, réveillées par l'explosion, mais n'obtient pas de réaction. Un attroupement se forme et on (selon le fils de Campbell, ce pourrait être Marcel LIGER, du 3 Rue Rouget De Lisle à Courbevoie ?) le conduit à une ferme voisine où un couple âgé les fait entrer dans la cuisine, puis commence à questionner l'aviateur. Pendant ce difficile dialogue, Campbell ne parlant que peu le français, le bruit d'une motocyclette se fait entendre. Vite, on le cache dans une pièce voisine, avant l'arrivée d'un officier allemand suivi du chauffeur de la moto. L'officier questionne le maître de maison, qui déclare n'avoir vu personne et penser que tous les occupants de l'avion ont péri dans le crash. Les allemands s'en vont et Campbell peut sortir de sa cachette.
On lui donne du vin, il offre des cigarettes… et ils entendent à nouveau la motocyclette à l'extérieur. Le fermier cache alors Campbell dans une étable jouxtant la maison/ferme et le recouvre de menue paille. Dans une lettre de 1945 à Campbell, Marcel LIGER, de Courbevoie, lui rappelle qu'il l'a dissimulé sous de la paille dans une ferme. Les Allemands, déterminés, fouillent l'étable, se plantent devant le caisson dans lequel Campbell est dissimulé. Il s'attend à ce qu'une fourche le transperce et pense que son sort est scellé. Cependant, perturbés par la présence de chevaux nerveux dans l'étable, les Allemands abandonnent soudain leurs fouilles et retournent vers la cuisine, qu'ils finissent par quitter après avoir longtemps interrogé le couple de fermiers.
Ceux-ci poursuivent alors leur propre interrogatoire de Campbell, jusqu'à l'arrivée d'une jeune femme qui s'adresse en anglais à l'aviateur et qui lui demande quel type de bombes son appareil transportait. Il en comprend les raisons lorsque la jeune fille lui explique que trois jeunes hommes du village avaient été grièvement blessés - l'un d'entre eux était même devenu aveugle - suite à l'explosion tardive d'une bombe d'un avion tombé la veille non loin de là. Par la suite, le fermier le fait se cacher dans une remise proche, l'installe dans un char à bœufs où il le recouvre de gerbes de blé, lui disant de ne bouger de là sous aucun prétexte.
De sa cachette, Campbell entend le vrombissement des bombardiers de son Groupe en retour de mission. Deux heures se passent. Le fermier revient le chercher, l'invitant à le suivre vers une autre maison. Ils marchent dans un champ et le fermier se dirige vers une meule de foin… d'où sort son radio, Ben Lyons. Les deux aviateurs sont alors amenés à la maison (plutôt la ferme) de "Mr. ARTHUR", qui s'y trouve avec sa femme et deux jeunes hommes que Campbell et Lyons prennent d'abord pour leurs enfants. En fait, il s'agit de deux aviateurs descendus la nuit précédente, un Anglais et un Canadien. Ces derniers passent la nuit dans la maison, tandis que Campbell et Lyons, faute de place, logent dans une meule de foin. Par recoupement, nous avons pu identifier en mars 2014 cet "Arthur" comme étant le cantonnier Arthur JOUSSEAUX, habitant avec son épouse Marie à Bassonville, à environ 2 km à l’est de Lutz-en-Dunois, près de Châteaudun.
Dans la matinée, tandis qu'ils prennent un repas, une bombe de leur avion explose, faisant trembler la maison. Le système de retardement "9 heures" avait fonctionné. La maison, se trouvant au bord d'une route, il arrivait souvent que des soldats allemands s'y arrêtent pour acheter des œufs ou s'abreuver en eau. Les fermiers s'arrangent toujours pour avertir les aviateurs, qui ont alors plus ou moins de temps pour aller se cacher.
Un jour, le fermier prend Campbell à part pour lui apprendre que son copilote, le Lt Giffin, était mort de ses blessures quelques heures après le crash de l'avion. Peu de temps après, le fermier amène à son domicile deux autres membres de son équipage, Donaldson et Jones. Ce dernier avait été touché dans l'avion en perdition et portait des éclats d'obus dans les jambes et sous les bras. Plus tard, suite au risque grandissant de voir les allemands finalement les trouver et passer tout le monde par les armes, la fermière fait comprendre qu'elle ne pouvait plus héberger tous ces aviateurs.
La veille de leur départ, une activité plus grande autour de la maison ainsi que des visites de civils inconnus, font comprendre aux quatre hommes que quelque chose se prépare. Le 31 juillet, vers midi, vêtus d'effets civils, ils se mettent en route à pied avec un guide en direction d'un camp dans une forêt. Selon Marcel LIGER, c'est lui qui était parti en éclaireur sur la route menant au Maquis, accompagné de six autres évadés…
Se déplaçant par paires, Campbell accompagne Jones, tandis que Donaldson marche avec Lyons. Comme les blessures de Jones le font boiter, on lui donne un vélo. Les instructions étant qu'ils ne parlent à personne et ne fassent aucun signe à qui que ce soit en cours de route, ils ne répondent pas au discret signe de la main que leur fait leur mitrailleur Sam Harvey qui les dépasse sur la route, assis entre deux hommes sur une charrette tirée par un cheval. En chemin, ils doivent se cacher à l'approche d'une limousine noire emportant des officiers allemands vraisemblablement en retraite accélérée.
Chacun ayant depuis longtemps bu sa propre bouteille de vin reçue de Madame JOUSSEAUX, ils sont assoiffés après ces heures de marche et s'arrêtent près d'un champ. Ils pensent trouver de l'eau dans un baquet destiné aux moutons, mais découvrent un liquide recouvert de mousse verdâtre. Ils écrèment la mousse pour plonger une bouteille dans l' "eau", y mettent quatre des tablettes d'halazone que contient leur kit de survie (quatre fois la dose normale pour la quantité), secouent le mélange pendant vingt secondes (au lieu de "laisser reposer 20 minutes") et se partagent immédiatement le breuvage.
Dans l'espoir de pouvoir bientôt également se sustenter, les quatre hommes s'arrêtent à une ferme où une femme leur donne de la viande et du fromage. Les sabots, trop petits, que Mme JOUSSEAUX lui avait donnés, commencent à meurtrir les pieds de Campbell et la femme lui présente des chaussures en ersatz de caoutchouc, dont les semelles sont déjà craquelées. Il les enfile, et le groupe poursuit sa route. Les pieds en sang, Campbell est obligé de marcher sur le sol plus tendre des bas-côtés de la route.
Dans la soirée, après une marche d'environ 35 km, Lyons, Campbell, Donaldson et Jones, menés par Daniel COGNEAU, du 125 Rue Saint-Jean à Châteaudun, arrivent au camp de Bellande à Fréteval où ils retrouvent leur bombardier Chapman et leur mitrailleur Sam Harvey. Après moins de deux semaines dans le camp, ils y sont libérés le 13 août par des troupes américaines.
Campbell est interrogé le 15 août par l'I.S. 9 et rentre en Angleterre le 17. Il est rapatrié au Canada le 29 septembre 1944 et démobilisé le 28 août 1945.
Merci à Roger Guernon pour ses informations et la photo de l'équipage.
Par ailleurs, Douglas Harvey, le fils de Sam Harvey a réalisé en 1992-1993 un documentaire/fiction sur ce vol de l'équipage de Campbell. Intitulé "Thousands Fell from Angels High", la 1ère partie de cette vidéo peut être visionnée à http://www.youtube.com/watch?v=yKeXrJlVYoc, page sur laquelle se trouvent les liens sur les 2ème et 3ème parties.
Edward Alex Campbell ne put lui-même être présent en juin 2014 à Bellande-Villebout lors des journées organisées à l’occasion du 70ème anniversaire des camps de la Forêt de Fréteval. Ses petits-enfants, Beverly et Wesley Allen purent y assister et retrouver Donald Harvey, le fils de Sam Harvey, mitrailleur arrière du Lancaster piloté par leur grand-père.