Aviateurs de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 15 avril 2020.

Alvis David ROBERTS / O-679228
1008 East Jefferson Street à Fort Worth, Texas
Né le 28 mars 1920 dans le Comté de Dallas, Texas / † le 17 avril 2012 à Fort Worth, Texas
2nd Lt, USAAF 389 Bomber Group 567 Bomber Squadron, bombardier
Lieu d'atterrissage : aux environs de Hogeveen, en Hollande, vers 15 heures
Consolidated Liberator B-24J-100-CO, 42-100424, HP-V / "Roll Call", abattu par la Flak lors d'une mission sur Genshagen (± 24 km SSE de Berlin) le 6 mars 1944
Atterrissage forcé/écrasé à Staphorst (NL)
Durée : 6 mois
Camps : Beffe et Porcheresse

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 3249. Rapport d'évasion E&E 1687 disponible en ligne.

L’appareil décolle de Hethel (Norfolk, Angleterre) à 08h30. Touché par la Flak à hauteur de Vechta, il est obligé d’abandonner la formation pour amorcer le retour vers l’Angleterre. Le moteur n° 3 s’emballe, l’appareil est en feu, son aile droite brisée. Le pilote Lt Kenneth Griesel donne l’ordre d’évacuer l’avion, trop endommagé.

Seuls Alvis Roberts et son pilote Kenneth Griesel réussiront à s’évader. Leurs huit co-équipiers seront faits prisonniers : le copilote 2nd Lt Kenneth E. Anderson, le navigateur 2nd Lt Philip J. Gibbons, le mitrailleur dorsal T/Sgt Alfred L. Brawner, l’opérateur radio T/Sgt Manuel A. August , le mitrailleur ventral S/Sgt Howard W. Brittan, les mitrailleurs latéraux S/Sgts Richard E. Devoe et Woodrow E. Wooten ainsi que le mitrailleur arrière S/Sgt Carl R. Hill.

Dans son rapport très succinct, Roberts indique seulement qu’il saute à environ 5.500 m, qu’il se tord sérieusement la cheville droite en atterrissant et que son équipement est emporté par des résistants. Dans le livre «Target Berlin» sur cette mission du 6 mars (Jeffrey Ethell et Dr Alfred Price – 1981), il rapporte que, tombé en Hollande, il vit trois gamins l’approcher en courant. Ils ne parlaient pas anglais mais étaient très amicaux. Puis un homme est arrivé à vélo, s’est approché de lui et en lui serrant la main lui a dit en anglais «My name is Arnold, I lived in Chicago !» «Arnold» lui montre alors un moulin à un peu plus d’un km de là, lui dit de s’y rendre, d’y rentrer et d’attendre. «Arnold» dit alors quelque chose aux enfants, qui enroulent alors le parachute et l’emportent au loin. Ensuite, « Arnold » enfourche son vélo et s’en va.

Surveillant les alentours pour éviter des patrouilles allemandes, Roberts se dirige alors vers le moulin. Peu de temps après son arrivée là, «Arnold» et un de ses amis y arrivent à vélo. L’autre homme donne son vélo à Roberts, qui suit alors «Arnold» qui roule à environ 200 m devant lui. Après avoir roulé pendant environ 20 minutes, les deux hommes arrivent à une ferme où on dit à Roberts de se cacher dans une meule de foin tout à côté. Plus tard dans la soirée, on le fait entrer dans la ferme, on lui donne à manger avant qu’il aille dormir dans un grenier. Durant la nuit, il peut entendre des camions militaires allemands roulant sur la route proche de la ferme. Toujours selon ce récit, Roberts est déplacé deux jours plus tard et rejoint son pilote Griesel. Pas d’autres détails dans le livre qui indique seulement que les deux aviateurs purent s’évader en voyageant en Hollande et en Belgique avant de se joindre à des troupes américaines en septembre.

On trouve dans les deux pages du site hollandais TARGET="http://members.multimania.nl/veldeling/liberat.html" consacrées au crash du «Roll Call», un texte de l’historien local Albert Metselaar («Informatie Centrum Geschiedenis Hollandscheveld e.o.», Hoogeveen), dont nous résumons ci-après des extraits ayant trait à Alvis Roberts : Le Docteur BROUWER, du village de Elim, va à la rencontre de trois ou quatre autres membres de l’équipage, demande s’ils sont blessés. La réponse est négative et il les amène chez lui. Malheureusement, ils seront rapidement arrêtés à l’arrivée d’une patrouille allemande à la maison du médecin. On mentionne l’aide apportée à deux autres, tombés dans les champs près du village de Moscou, par Rieks KROEZEN qui les mène chez l’instituteur local PENNINGS qui parle anglais. Dans la soirée KROEZEN les guide vers le Sud et l’auteur de l’article déclare n’avoir pu vérifier ce qui leur est advenu par la suite. Nous savons qu’ils ont été capturés.

Le nom d’Alvis Roberts apparaît sur les pages du journal de l’époque gardé par Arnold DOUWES et reproduites sur le site en question. DOUWES rapporte qu’au matin du lundi 6 mars 1944, il se trouvait avec un ami au Nieuwe Krim (à environ 8 km à l’Est de Coevorden), observant les formations de bombardiers attaqués par les chasseurs allemands. Ils voient un chasseur ennemi s’écraser non loin, puis aperçoivent un parachutiste tomber à distance. Ils rejoignent l’endroit de sa chute et voient l’américain entouré d’une foule, personne ne connaissant l’anglais. DOUWES se présente à l’aviateur et lui dit que tout le monde, lui compris, feraient mieux de quitter l’endroit.

DOUWES poursuit son récit : Lui et «Nico» (Max Nico LÉONS, un juif caché à Nieuwlande) emmènent Roberts, car c’était lui, à une fermette où ils l’aident à se débarrasser de son équipement. Ils cachent son casque, ses lunettes, son survêtement et ses gants sous des plants de pommes de terre. «Nico» va chercher une salopette et des sabots chez le fermier Frans van de Winne et revient avec deux vélos. Roberts enfile la salopette, chausse les sabots et les trois hommes quittent rapidement le champ, Roberts étant handicapé par son pied foulé. Arrivés sur la route, Roberts enfourche alors le vélo de Nico, ce dernier s’asseyant sur le porte-bagage de Douwes, et ils roulent jusque chez l’instituteur Seine OTTEN à la Brugstraat à Nieuwlande, où ils empruntent un troisième vélo pour se rendre dans un bois où les jeunes hommes avaient une cachette.

Il y a trop de monde sur la route et on décide de se rendre plutôt chez le fermier Bouwe ZIJLSTRA à la Coevorderstraatweg à Nieuweroord, entre Hoogeveen et Geesbrug. Ils croisent en cours de route des motos allemandes avec side-cars, vraisemblablement à la recherche des aviateurs. Arrivés chez ZIJLSTRA, on cache Roberts dans une meule de foin et le soir, Roberts est invité à la table du fermier qui fête son anniversaire. Douwes dit avoir appris par la suite que le Docteur Brouwer avait caché chez lui deux des autres aviateurs du «Roll Call» avant qu’ils se fassent arrêter.


La famille Zijlstra en 1937. Bouwe est assis au centre-gauche, et Tini est assise à gauche.

Douwes écrit le mardi 7 mars dans son journal que Nico LÉONS a veillé Roberts chez ZIJLSTRA durant la nuit. Il ajoute qu’au matin, vers 05h00, Peter et Herman Otten ont réalisé un dessin au départ d’une photo de Roberts que ce dernier avait donné à Douwes et que Mme Otten a écrit un poème au verso du dessin, dont Douwes a fait la traduction à l’intention de l’aviateur. Douwes est allé discuter avec ce dernier chez ZIJLSTRA où on a fait venir le Docteur J. REYNIERSE de Hollandscheveld, qui soigne le pied fort gonflé de Roberts. Douwes remet le dessin à ce dernier et comme Roberts hésite à l’emporter par peur de sa découverte en cas d’arrestation, Douwes et lui décident qu’il sera conservé en Hollande pour remise après la guerre. Douwes termine en signalant qu’un soir, habillé en infirmier, Roberts a été conduit à vélo à Hoogeveen par deux véritables infirmières de l’Hôpital Bethesda de la ville, dont l’une s’appelait Zuster Tini, la propre fille de Bouwe ZIJLSTRA. [Trijntje "Tini" ZIJLSTRA était sœur supérieure et on rapporte à http://home.planet.nl/~jlafeber/LeendertLafeber.html) qu’elle faisait cacher des personnes recherchées chez le patriote Leendert LAFEBER, peintre en bâtiment habitant à la Schutstraat à Hoogeveen. Nous ignorons si Roberts y a été hébergé].

Albert Metselaar complète le récit de Douwes en indiquant que Roberts a revu par la suite son camarade Kenneth Griesel et que les deux hommes sont arrivés chez la famille de Harry J. P. OTTEN à Erp (à ne pas confondre avec les OTTEN de Nieuwlande) où ils sont restés jusqu’au 9 avril. De là, selon Metselaar, ils ont été menés à Bakel, d’où ils seraient partis (en train ?) vers Maastricht, puis passés par Eben-Emael (à notre avis, ce pourrait être Lanaye) avant d’arriver à Liège en route vers le Sud. Metselaar déclare que l’on ignore la suite…

D’autres sources citent comme ses helpers en Hollande : Otten (H.J.P. OTTEN de Erp – confirmation de ce qui précède), Poels (J.G. POELS, de la ferme Antoniushoeve de sa famille au Zwarte Plak, America, près de Horst) et Vrij (Jaak VRIJ, du groupe «Van den Brink» de Maastricht). Une source que nous n’avons pu vérifier indique que Griesel et Roberts sont arrivés chez les OTTEN à Erp le 23 mars 1944. C’est Jacques VRIJ qui fait traverser la Meuse à Roberts et Griesel en direction de la Belgique.

Nous n’avons pas de détails sur la suite du parcours des deux hommes depuis leur arrivée en Belgique mais par recoupement (rapports d’Alan Willis et de William Elsberry) , nous pouvons dire qu’ils se retrouvent le 4 juillet 1944 avec 27 autres aviateurs dans une école (orphelinat) à Beffe où ils ont été amenés en camion. Les deux hommes y resteront pendant trois semaines. Elsberry confirme les y avoir vu avec entre autres, le 2nd Lt Alan WILLIS, le 2nd Lt Haney Gladys (Henry Gladys), le 2nd Lt George Vogle, le Sgt Harry Asthon (Harold Ashman) et le Sgt Milo Blakely.

Par la suite, en compagnie vraisemblablement de nombreux autres évadés, Griesel et Roberts arrivent finalement au camp de Porcheresse dirigé par Emile ROISEUX.

La photo en bas est de Gaston MATTHYS et montre des aviateurs alliés à "La cabane des chasseurs" au camp de Daverdisse-Porcheresse en août 1944, un refuge de l'opération Marathon au cours de laquelle les aviateurs alliés étaient rassemblés dans des camps dans les Ardennes belges et en France. Merci à Régis Decobeck pour cette photo, merci aussi à Marie-Claire-Roiseux-Vienne, fille d’Emile Roiseux, pour les photos de la cabane.

Alvis Roberts est débriefé le 6 septembre par le 2nd Lt Robert Bacon de l’I.S.9. Rentré en Angleterre, il est à nouveau interrogé, cette fois par le M.I.S. pour l’établissement de son rapport.

En novembre 1944, il est de retour au Texas, comme le montrent les deux photos ci-dessous (https://library.uta.edu/digitalgallery-beta/img/20038780 et https://library.uta.edu/digitalgallery-beta/img/20038781).


First Lieutenant (Lt.) A. D. Roberts visiting his parents, Mr. and Mrs. E. S. Roberts at 1008 E. Jefferson Avenue, Fort Worth, Texas. He is shown sitting on a couch and wearing his military uniform. He is a graduate from Polytechnic High School. He spent six months behind enemy lines after his B-17 was shot down over Holland on March 6. Behind his left lapel Roberts wears a silver winged boot, insignia of the "Late Arrivals Club." Official decorations worn by First Lieutenant Roberts are the Purple Heart and the Air Medal, awarded for six missions. Published in Fort Worth Star-Telegram morning edition, November 5, 1944.

First Lieutenant (Lt.) A. D. Roberts is shown with his parents, Mr. and Mrs. E. S. Roberts at their home at 1008 E. Jefferson Avenue, Fort Worth, Texas. Lieutenant Roberts is home on leave. He is sitting in a chair and his parents are sitting on the arms of the chair. He is wearing a military uniform. Mr. Roberts is wearing trousers and half sleeve shirt and Mrs. Roberts is wearing a floral dress. Published in Fort Worth Star-Telegram morning edition, November 5, 1944.

Alvis Roberts repose au Dallas-Fort Worth National Cemetery à Dallas, Texas.


La cabane des Chasseurs au camp de Daverdisse en août 1944.


La cabane en 1978 et 1984.

Bouwe Zijlstra était l'arrière-arrière-grand-père de Jason Vanderhill, de Vancouver. Ce dernier nous a fourni le journal de Max Nico Leon, remis à sa grande-tante Tini, l'infirmière du récit, décédée en 2017. Merci à lui également pour la photo de famille ZIJLSTRA et le lien vers les archives du Fort Worth Star-Telegram.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters