Personne passée à une autre ligne d'évasion

Dernière mise à jour le 18 novembre 2023.

Henry Vincent SCHULTZ ("Hank") / O-805688
412 Montgomery Avenue, Laurel, Maryland.
Né le 16 septembre 1917 à Williamsport, Lycoming County, Pennsylvanie / † le 30 juin 1964
2nd Lt, USAAF 93 Bomber Group 328 Bomber Squadron, copilote.
Consolidated Liberator B-24J-50-CO, 42-73507, GO-D / "Sunday Girl", abattu lors d'une mission sur Hannover le 30 janvier 1944.
Atterrissage forcé vers 12h30 à Bunschoten, près de Nijkerk (Gelderland), Pays-Bas.
Durée : 12 semaines
Camps : interné en Suisse

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 2341. Rapport d'évasion E&E 2325 disponible en ligne.

Le B-24 décolle de Hardwick le 30 janvier à 07h30, heure anglaise. Au nord-est d’Osnabrück, un des moteurs de l'appareil encourt des avaries en route vers l'objectif, que l'équipage n'atteint pas. Le pilote décide de faire demi-tour vers la base et de larguer les bombes en chemin sur des installations ferroviaires. Un autre moteur est touché par des tirs de la Flak et prend feu. Perdant rapidement de l'altitude, et malgré le lestage de tout le matériel lourd à bord, il descend si rapidement que le pilote donne l'ordre d'évacuer. Comme le pilote avait déclaré vouloir rester à bord de l'avion, les membres de l'équipage décident de rester aussi et finalement le pilote effectue un atterrissage forcé. Les hommes sont secoués, mais personne n'est sérieusement blessé. Informés par le navigateur de leur position, le groupe décide de se séparer par paires et de se diriger vers le Sud.


Le B-24 après son atterrissage forcé près de Nijkerk
(photo via http://www.americanairmuseum.com/media/35520)

De l'équipage du Lt Harold Killian, du radio Theodore Simmons, du mitrailleur Raymond Slomowicz, des Sgt Donald Crawford et Leroy Croy, également évadés.

Quatre membres de l’équipage seront faits prisonniers : le navigateur 2nd Lt Edward L. James ; le bombardier 2nd Lt Carl J. Gusikowski, le mitrailleur droit S/Sgt George R. Haynie et le mitrailleur arrière S/Sgt Duthiel H. Borcherding.

Schultz se casse un doigt dans l’atterrissage. Dans son E&E, Schultz corrobore le récit de Killian. Celui-ci et Schultz marchent vers le sud-ouest pendant une heure puis se cachent dans un marais pendant 3 jours. A la fin du 3ème jour, Schultz approche un garçon de 16 ans qui amène son frère aîné auprès d’eux. Peu après, arrivent 3 jeunes étudiants hollandais à vélo. Ils ont une vingtaine d’années, l’un d’entre eux parle anglais et leur demande leurs plaquettes d’identification (dog tags). On leur dit de rester cachés dans le marais. Plus tard, vers 18h00, ils leur apportent des vêtements et des chaussures.

Les deux aviateurs vont se cacher dans une grange de la ferme du père du garçon de 16 ans et y passent la nuit. L’un des 3 garçons vient les voir et leur dit que bien que ne connaissant pas d’organisation qui pourrait les aider, il ira se renseigner à Amsterdam. Au matin, le garçon revient bredouille et ils retournent à la grange où ils passent la journée, le fermier leur apportant de la nourriture. Dans la soirée, un membre de la "Secret Army" passe les voir et les interroge. On les transfère alors vers une autre grange où ils passent la nuit. Au matin, on les mène à un bois où ils passent la journée à se construire une petite hutte à l’aide d’herbes. Ils retournent à la grange pour la nuit, vont se cacher au marais et le lendemain soir retournent à la ferme. A 21h00, un membre de l’organisation, grand, environ 40 ans, les guide jusqu’à une route et leur fait rencontrer Gelius OTTENS, officier de police, qui leur apporte des vélos et les guide chez lui au 7 Randenbroekerweg à Amersfoort. Dans la même localité, des sources néerlandaises indiquent qu’ils ot été aidés par Gerritt van den BORN (Langestraat 87, Amersfoort).

Killian et Schultz restent chez les OTTENS jusqu’au 25 février. [Tandis qu'ils se trouvaient chez les OTTENS, un bébé naquit et on le baptisa Harold Henry OTTENS.] Ils apprennent que Slomowicz et Simmons se trouvent cachés à Nijkerk (ils n’entendront plus parler d’eux après). Le 25 février, un courrier de l’organisation, appelé "Tony", arrive et leur dit qu’ils partiront le lendemain. Gelius OTTENS et sa nièce Johanna leur disent qu’ils les accompagneront en train, mais qu’ils vont d’abord les présenter à "Joker" FOLMER, étudiante en linguistique à l’Université d’Amsterdam. [Il s’agit de Johanna Marie "Joke" FOLMER de Meppel]

Le lendemain matin, les deux aviateurs, Gelius OTTENS, sa nièce Johanna et Joke FOLMER prennent un train pour Utrecht. De là, un autre train les mène à Driebergen, où Joke les confie à un jeune homme qui les guide à vélo jusque Zeist, où Joke les rejoint par après en train. Joke habitait là la maison de son père, revenu de ses plantations aux Indes Néerlandaises quelques mois avant la guerre. Joke les prend en photo pour confectionner de faux papiers. Killian et Schultz logent chez Joke pendant 8 jours. Avant leur départ, on y amène leurs coéquipiers Leroy Croy et Donald Crawford, qui logeront après eux chez Joke.

Après avoir reçu un coup de fil de Maastricht, le 3 mars (selon la partie manuscrite du rapport de Killian et Schultz), Joke les guide en train jusqu’à Maastricht. A leur arrivée, le contact suivant ne peut se faire comme prévu, mais finalement un homme arrive et Killian, Schultz et Joke le suivent. A un moment donné, Joke les quitte et l’homme les mène jusque chez un couple d’un âge avancé - l’homme s’appelle "Joseph" - tenant un magasin de fleurs artificielles à Maastricht.

"Joseph" les fait se cacher dans une pièce de son dépôt attenant à sa maison. Comme la liaison avec Bruxelles ("Comète") avait été coupée entretemps, ils restent chez "Joseph" pendant 14 jours. Ils y sont interrogés, les renseignements et leurs photos étant transmises à Bruxelles par un courrier qui s’est fait arrêter en route. Le plus petit des deux hommes s’occupant de leur cas à Maastricht, vient les chercher le 16 mars pour les conduire au nord de Maastricht. Après une heure de route, l’homme s’adresse à un jeune homme d’environ 19 ans. Ce dernier les accompagne à pied jusqu’à une rivière et les fait passer la frontière en bateau. Arrivés en Belgique, ils sont menés par le jeune homme dans une petite ville pour y loger chez un Juif et un autre homme plus âgé. Vers 7 heures du matin, un Russe arrive avec des vélos et les mène jusqu’à un arrêt de tram. Ils entrent dans un café d’où un homme, petit, 55 ans, en possession de leurs papiers d’identité, les mène en tram chez lui à Hasselt, où ils rencontrent sa femme (forte, cheveux roux) et leurs deux enfants. [Il s’agit de Florent BIERNAUX, de son épouse Olympe, née DOBY, leur fils Raymond (20 ans) et leur fille Eliane (14 ans), du 17 Thonissenlaan à Hasselt. Killian et Schultz seront les deux derniers aviateurs qu’Albert BIDELOT, du 6 Tivoli à Lanklaar, délivrera aux BIERNAUX.]

Killian et Schultz logent là une nuit et le lendemain, la femme (Olympe BIERNAUX) les guide en train jusqu’à Liège. Elle les présente à un membre de "l’Armée Blanche" et sa femme avant de repartir pour Hasselt. L’homme, "Joseph", grand, environ 30 ans, moustachu et boîtant légèrement, leur est présenté comme étant un membre important du mouvement de Résistance. [Il s’agit en fait du M.N.B., dont Joseph DRION, époux d’Yvonne PIROTTE, était le Chef Provincial. ] Un rapport de la Sûreté de l’Etat d’avril 1949 sur le Groupe DRION reprend les noms de Killian et Schultz comme aidés par Joseph DRION, qui les reçoit le 16 mars d’Albert BIDELOT. Selon ce rapport, DRION héberge les 2 aviateurs chez lui au 15 Place des Guillemins à Liège jusqu’au 18, jour où il les remet à Léon CHRISTIAENS, du 58 Rue Hoyoux à Herstal.]

Reprenons le rapport E&E : Après avoir rencontré "Joseph" (DRION), Killian et Schultz sont menés par lui chez "Joseph et Paulette", tenant une boulangerie (pas de précision de lieu), où ils rencontrent le pilote Américain John J. Stahl Jr, abattu le 20 février dans son B-17 42-31430. Stahl se porte garant de l’identité de Killian et Schultz. Également aidé par le Groupe DRION, Stahl a été arrêté le 12 avril, mais 3 membres de son équipage réussirent leur évasion (voir https://www.evasioncomete.be/fchernoje.html ). "Joseph" le boulanger mène alors Killian et Schultz chez "Mme. Van Kampenhousen", environ 45 ans, corpulente, mère d’une fille de 18 ans et un fils de 16/17 ans, et dont le mari se cachait à la campagne pour éviter une nouvelle arrestation. [Il doit s’agir de Marcelle VAN CAMPENHOUT de la Rue du Vieux Mayeur à Liège, reprise sans autres détails à la liste des Helpers belges.]

Killian et Schultz logent là deux jours avant que Joseph DRION leur amène "Jacques", un jeune homme qui leur avait trouvé une nouvelle cachette, chez un baron et sa femme, propriétaires d’une usine de zinc. Ils logent seulement deux jours chez ces gens, car la baronne craignait trop d’être arrêtée. Joseph DRION les reconduit alors chez Mme VAN CAMPENHOUT où ils logèrent quelques jours. "Jacques" vint alors les chercher pour les mener à Jemeppe chez un nommé "Arthur", propriétaire d’une petite quincaillerie. Ils restent là "une quinzaine de jours ou plus" (3 semaines selon Schultz), en compagnie de l’épouse d’"Arthur", leur fille et une dame âgée qui avait été infirmière durant la guerre 1914-1918 et se cachait chez eux. Après leur séjour là, Killian et Schultz sont ramenés à Liège par Joseph DRION et "Jacques". Ils restent une semaine à Liège, près de la Citadelle, chez un professeur d’art à l’Université, prénommé Noël et qui avait vécu en Angleterre durant la dernière guerre. [ Dans la liste des collaborateurs du Groupe DRION, il y a un Noël SIMONIS, habitant à la Rue Saint-Laurent, non loin de la Citadelle…] C’est la dernière fois que Schultz est mentionné dans le rapport. Dans son propre rapport, Schultz indique qu’il a vu Killian pour la dernière fois à Belfort (voir ci-dessous).

Killian et Schultz sont ensuite ramenés par Joseph DRION chez Mme VAN CAMPENHOUT pour une fête d’adieu. Y étaient également présents :


Mot de remerciement de Schultz dans le rapport de Joseph DRION (Archives NARA)

Le lendemain après-midi, les 9 aviateurs et 3 guides quittent Liège pour aller à Couvin, via Namur où ils changent de train. De Couvin, ils marchent jusqu’à Charleville-Mézières, d’où ils prennent un train pour Nancy, passant la nuit dans la gare. Le lendemain, ils prennent un train pour Belfort. Kendall, le dernier dans la file, se fait arrêter car son ticket ne lui permettait pas d’aller plus loin que Belfort. Kendall, le dernier dans la file, se fait arrêter car son ticket ne lui permettait pas d’aller plus loin que Belfort. Il quitte donc le groupe. Dans l’E&E, on retrouve Killian plus tard à Delle, à quelques kilomètres au sud de Belfort, où lui et Stahl sont en tête de la colonne des 9 évadés (dont Schultz…), sans guides, ces derniers les ayant quittés sur la route de Blamont, se méfiant de certains hommes qui semblaient suivre le groupe depuis Belfort…

A Delle, Schultz rapporte que Killian et Stahl trouvent un homme qui se dit prêt à les aider à passer la frontière vers la Suisse cette nuit-là. Killian et Stahl vont au village avec l’homme pour chercher de la nourriture. Schultz, Zolner, Pogodin et Engstrom vont se cacher dans un bois en attendant leur retour (Pyles et Prosperi se perdent…) Le rapport de Schultz indique que la suite est la même que dans le rapport de Killian… mais leurs chemins se séparent à Delle… Nous ignorons donc comment et avec l’aide de qui Schultz parvient en Suisse. Le rapport de Pogodin indique que celui-ci y est arrivé le 24 avril, Prosperi apparemment le 27, comme Pyles.

Henry Schultz (ainsi que Pyles, Pogodin et Prosperi) quittent la Suisse le 13 septembre dans le groupe du Capitaine Douglas Hoverkamp, pilote de Prosperi. Ils vont alors à Annecy et rentrent de là par avion en Angleterre le 29 septembre 1944.

Décédé en 1964, Henry Schultz repose au cimetière national d’Arlington, Virginia.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters