Dernière mise à jour le 3 avril 2021.
Gerald "Jerry" E. SORENSEN / 19095816
Route # 1, Pocatello, Idaho, USA.
Né le 31 octobre 1919 à Blackfoot, Idaho / † le 3 septembre 1944 à Marcq-lez-Enghien, Belgique.
S/Sgt, USAAF 96 Bomber Group 339 Bomber Squadron, armurier-mitrailleur arrière.
Lieu d'atterrissage : près de Gibecq, Hainaut.
Boeing B-17G-BO Flying Fortres, 42-31152, QJ-E, abattu par la Flak lors d'une mission sur Metz le 1 mai 1944.
Ecrasé à Lanquesaint, à 400m à l'Ouest du lieu dit "La Croix", en bordure de la Route de Lessines, au nord-est d’Ath.
Durée : 2 mois.
Tué aux combats d'Enghien le 3 septembre 1944.
Rapport de perte d'équipage MACR 4237.
Selon Roger Freeman dans "Mighthy Eighth War Diary", il s'agit de la mission 8AF 333. Bombardement de gares de triage. Troyes et Reims en objectif principal pour les B17 de la 1st BD ; Bruxelles et Liège en objectif principal pour les B24 de la 2nd BD ; Metz, Bruxelles et Saarguemines en objectif principal pour les B17 de la 3rd BD.
Cet appareil est souvent noté comme écrasé à Chièvres. Le pilote (Dingledine), qui savait qu'il n'arriverait plus en Angleterre avait projeté de "planter" son zinc sur une batterie de Flak à Chièvres mais il n'y arriva pas. Il s'approcha d'un bois où les aviateurs pourraient se cacher après leur saut en parachute. A 1.500 pieds du sol, il le dirigea sur un champ et sauta en vitesse. Une dame d'Isières recueillit plusieurs membres de son équipage.
Cinq autres membres de l'équipage s'évadèrent également : George Smith, John R. Smith, Lester Hutchinson, Dinuncio Streett et Eugene Dingledine. Les 4 autres équipiers furent faits prisonniers : le navigateur James K. MacConnell, le mécanicien/mitrailleur dorsal S/Sgt Vito A. Champa, l’opérateur radio S/Sgt John R. Glass et l’assistant armurier Sgt Otto Stange Jr assistant armurier-mitrailleur gauche.
Abattu à sa 3e mission, Sorensen atterrit dans une forêt. Alors qu'il s'est tordu la cheville lors de sa chute, il se sert d'un bâton en guise de canne et erre deux jours en vivant de sa ration de survie. Il parvient dans les mains de l'un des modules d'hébergement de Anne BRUSSELMANS et est hébergé à divers endroits à Bruxelles. Victor SCHUTTERS le convoie également en véhicule de la SNCB dans Bruxelles. Voilà qui est très sommairement expliqué, mais s'avère plus compliqué.
Selon une des versions que l'on retrouve souvent, mais qui est erronée, le 3 mai 1944, Anne BRUSSELMANS l 'aurait mené chez la famille VAN DELFT à Saint-Marcoult près de Gibecq, où il serait resté une semaine. Il aurait alors été conduit chez Odette GRYSPEIRT qui l 'aurait caché dans différentes maisons de son module.
En fait, Sorensen loge d'abord 6 jours chez Charles LEPOIVRE au 16 Marais à Gondregnies du 2 au 8 mai, qui est alors le centre d'hébergement d'Émile ADAM du Groupe G que connait bien Odette GRYSPEIRT. Émile ADAM habite au 27 Rue de la Station à Gibecq (Silly). C'est Rolande CRUSIAU qui l'emmène à Gondregnies et Lucie LEPOIVRE le conduira au 9 Nemerkendries à Tollenbeek chez Cyrile SUYS ce 8 mai. Ces dates sont confirmées par plusieurs témoins. Victor SCHREYEN va chercher Sorensen et Dingledine chez SUYS pour les conduire seulement alors à Bruxelles.
Sorensen est alors hébergé pendant quelques jours à Bruxelles chez Marie Joséphine DE STOBBELEIR au 140 Avenue du Karreveld (Av. Brigade Piron) en même temps que Raymond Pencek, Eugene Dingledine et James T. Brown. Sorensen signe le 6 mai dans le carnet de son hébergeuse [probablement à son arrivée le 8 mai] de même que Brown et Dingledine, imités le 11 mai par Pencek. Conduit ensuite par Madeleine MEUNIER chez Mlle Bertha FILLÉE au 11 Rue des Boers à Etterbeek, Sorensen y loge jusqu'à la mi-mai en compagnie de Lester Hutchinson. Bertha FILLEE indique qu'il était blessé au pied et qu'il est revenu deux fois chez elle.
A la mi-mai, il va loger avec Hutchinson chez les BRICHARD au 7 Avenue Louis Lepoutre à Ixelles. Sorensen transite alors chez DE COEN au 32 Boulevard des Invalides à Auderghem, puis loge du 22 au 31 mai chez les MEUNIER au 2 Avenue de Blankedelle à Auderghem, avant d'être guidé par Madeleine MEUNIER chez Gilbert TEDESCO, 1 Place Jules Genicot à Auderghem.
Le 2 juin, Odette GRYSPEIRT l'amène à Ganshoren et il est caché deux mois chez Arthur ABEELS (père de Roger) au 19 Avenue de la Constitution, avec Bernard McManaman. Il se lie d'amitié avec Roger ABEELS, le fils, né en 1924, qui est membre de l'Armée Secrête, réfractaire, et recherché par la Werbestelle. Sorensen et McManaman aident les résistants à nettoyer et préparer leurs armes et écoutent la BBC chaque soir.
Ils quittèrent la famille ABEELS à deux reprises. Une première fois, du 10 au 17 juin pour être hébergés par François LOCUS et son épouse au 122 Rue de la Procession à Anderlecht qui déclarent pour 21 jours Sorensen, McManaman et Douglas Roraback. Une seconde fois, le 29 juillet pour se rendre chez M.GORIS au 9 Avenue Paul Janson à Anderlecht.
Le 5 août, ils revinrent Avenue de la Constitution chez les ABEELS.
Le 6 août, Émile ADAM (Menuisier au 27 Rue de la Station à Gibecq-Silly, chef d'une section du Groupe G qui a déjà secouru Sorensen au lendemain de son atterrissage) et Rolande CRUSIAU (Infirmière au 14 Place à Bois-de-Lessines et courrier au Groupe G pour Émile ADAM) rencontrent Sorensen sur la Chaussée de Bruxelles à Ghislenghien. ADAM lui passe son vélo et CRUSIAU l'emmène chez Charles LEPOIVRE au 16 Marais à Gondregnies, où est alors le centre d'hébergement d'Émile ADAM. C'est la seconde fois que Sorensen y loge, et il reste cette fois 3 jours, du 6 au 9 août, avant de se joindre au maquis de Saint-Marcoult, la maison des LEPOIVRE étant maintenant trop surveillée par la GFP.
Une autre version qui complète les archives du Groupe G mentionne qu'après être devenus membres de la Zone 1, Secteur D de l'A.S., Gerald Sorensen, Bernard McManaman et Roger ABEELS sont envoyés dans la région de Saint-Marcoult. Roger ABEELS trouve refuge chez M. FOURMANOIR à Silly tandis que Gerald et Bernard sont hébergés à Gondregnies, chez Charles LEPOIVRE et son épouse Sylvie FOURMANOIR.
Le 9 août, M. FOURMANOIR et Roger ABEELS amènent Gerald et Bernard chez la famille VAN DELFT à Saint-Marcoult (et non chez Anne BRUSSELMANS selon cette version). Gerald Sorensen y avait déjà été hébergé et Bernard McManaman fait connaissance avec cette famille. Le mois d'août les voit recueillir des renseignements sur les mouvements de troupe allemands dans la région, sabotant leurs opérations et récupérant des armes et des munitions larguées par avion à l'attention des résistants.
Ils apprennent le samedi 2 septembre au soir que des chars britanniques quittent Tournai en direction de Bruxelles.
Le 3 septembre au matin, un Capt BRENT part avec son groupe : Sorensen, McManaman, Roger Abeels, Richard Decroes, Ghislain Duhainaut, Jean Colin, le curé Venquier et le Lt Frank A. Forsyth (USAAF O-886960, du 356 Fighter Group/359 Fighter Squadron, pilote du P-47D OC-I "Fearless Fosdick" n° 42-26141, MACR 8549, abattu le 1 septembre 44 près d'Enghien - atterrissage forcé à Silly - Rapport d'évasion E&E 2079). Ils capturent une voiture allemande près du collège d'Enghien, mais sont surpris par cinq camions en colonne qui la suivent. Ces camions sont poursuivis par des blindés britanniques et se défendent, emportant leurs blessés. 180 Allemands sont capturés. Roger Abeels et Gerald Sorensen sont morts durant ce bref combat, tués par une même grenade tandis qu'ils appuyaient le repli de leur groupe.
Les corps sont retrouvés le lendemain par des soldats britanniques dans un bois jouxtant la nationale menant à Bruxelles et ramenés au 19 Avenue de la Constitution. Ils seront enterrés au cimetière de Ganshoren le 10 septembre, avec tous les honneurs. Le père de Sorensen demanda une exception à la règle pour que son fils soit enterré à Ganshoren, et non dans un cimetière militaire. Depuis 1952 une rue de Ganshoren porte le nom de l'aviateur, de même qu'une autre, celui de Roger Abeels, son compagnon d'infortune.
Nora Lee Sorensen, sa veuve, viendra en Belgique en 1947 et restera trois mois chez les Abeels. Elle a aussi rendu visite à Bertha Fillée.
Merci à Philippe Save et à Jenny Abeels, sœur de Roger Abeels, pour leurs informations.
Merci également à William Morton, fils de Nora Lee, pour les photos de sa maman aux cérémonies ainsi que pour la photo de l’équipage.
Depuis les sombres journées de septembre 1944, Jenny, la sœur de Roger ABEELS, qui ne s’était jamais mariée, visitait régulièrement les tombes de ses amis, que rejoignirent plus tard ses parents, au cimetière de Ganshoren proche de chez elle. Depuis des années, Jerome Sheridan, Président de l’AOMDA (American Overseas Memorial Day Association), avec la collaboration de l’Ambassade des Etats-Unis, organise des cérémonies officielles aux 3 cimetières américains en Belgique, ainsi que sur chacune des tombes isolées de militaires américains tombés durant les 2 conflits mondiaux.
Une de ces tombes est celle de Gerald Sorensen et chaque année, depuis 2006, Jenny ABEELS assistait à ces cérémonies, la dernière à laquelle elle participa se déroulant en mai 2011. Malheureusement, Jenny nous a quittés en novembre de cette année-là.
Le 26 mai 2014, l’AOMDA organisa la même cérémonie à Ganshoren, cette fois en présence de 17 membres de la famille de Gerald Sorensen que Jerome Sheridan avait pu retrouver aux Etats-Unis et qui se sont recueillis pour la toute première fois sur les tombes de Gerald et Roger, ainsi que celles des époux ABEELS.
Durant le séjour de la famille en Belgique, Jerome Sheridan lui a servi de guide en visitant les différents endroits où Gerald avait atterri en parachute puis avait été caché par des citoyens belges.
Le groupe passa également par le village de Marcq où un monument avait été érigé peu après la guerre, à faible distance du champ où Gerald SORENSEN et Roger ABEELS trouvèrent la mort. Leurs noms y sont gravés, de même que celui du résistant armé Armand VERSCHUEREN qui mourut de ses blessures le lendemain de l’engagement.
Après une courte cérémonie et dépôt de fleurs au monument, la famille prit la direction du village de Silly afin d’y rencontrer Carmen LEPOIVRE. Carmen est la fille de Charles et Sylvie LEPOIVRE, qui avaient hébergé Sorensen d’abord en mai puis en août 1944 dans leur ferme à Gondregnies, à quelques kilomètres de Silly.
Carmen, que l’on peut voir ici avec Evelyn Sorensen Whyte et toute la famille, fut très émue lorsqu’elle évoqua ses tristes souvenirs de la guerre et de l’occupation, la bravoure tranquille de son père Charles et de sa mère Sylvie, qui avaient hébergé 13 aviateurs américains d’avril à août 1944. Elle parla de l’arrestation de son père par la Gestapo, qu’elle vit obligé de se mettre à genoux devant sa femme et sa fille puis être frappé sauvagement à la tête avec la crosse d’un fusil, avant de voir ses parents emmenés vers la prison de Saint-Gilles à Bruxelles. Heureusement, Charles et Sylvie LEPOIVRE furent parmi les prisonniers sauvés dans l’épisode du “Train fantôme” du 2-3 septembre 1944, le dernier convoi vers les camps en Allemagne organisé par les Allemands et qui, grâce à l’action de cheminots résistants, ne quitta jamais le territoire belge.
Voir la page du site de l’AOMDA dédiée à Gerald Sorensen à "http://www.aomda.org/assets/pages/en/126_SSGT_Gerald_E_Sorensen.php"
Jerome Sheridan a écrit un livre sur l’histoire de Gerald Sorensen : “American Airman in the Belgian Resistance - Gerald E. Sorensen and the Transatlantic Alliance”
(McFarland, & Company, Inc., Jefferson, North Carolina, octobre 2014)