Personne passée à une autre ligne d'évasion

Dernière mise à jour le 19 août 2016.

Nom/Matricule : Donald FERGUSON /1021760
Cluer, Harris Island, Outer Hebrides (Scotland) - ses parents habitaient Inverlochy, Fort William, dans l’Inverness-shire, Ecosse
Né le 30 avril 1918 à Fort William, Ecosse / † Le 24 novembre 1943 (circonstances inconnues).
Sgt RAF, RAF Bomber Command 7 Squadron, mécanicien.
Lieu d'atterrissage : Près de Venlo, Pays-Bas.
Short Stirling Mk I, BK760, MG-X, abattu la nuit du 10 au 11 avril 1943 par Hptm Walter Ehle du II./NJG1 lors d'une mission sur Francfort.
Ecrasé à 03h45 dans le canal Bocholt-Herentals à Tongerlo, 5 km ESE de Bree, Limbourg belge.
Durée : 5 semaines.
Passé en Espagne le 20 mai 43.

Informations complémentaires :

Rapport d'évasion SPG 3313/1253 (Appendice C).

L'appareil a décollé à 23h31 de Oakington le 10 avril. Il arrive avec un quart d’heure d’avance sur l’objectif et est touché à trois reprises par la Flak. Atteint à nouveau sur le vol du retour, le Stirling se trouve à faible altitude à hauteur de Bree en Belgique lorsque des tirs de mitrailleuses légères l’atteignent dans le milieu et l’avant du fuselage. C’est alors que le Hptm Ehle passe à l’attaque. Les tirs du chasseur allemand atteignent au moins quatre des réservoirs d’aile et les deux mitrailleurs sont probablement tués lors d’une deuxième attaque. L’appareil en feu amorce une remontée avant de plonger vers le sol et d’aller s’écraser dans le canal Bocholt-Herentals sur le territoire de Tongerlo, commune de Bree.

Cinq hommes sont tués et seront enterrés au Heverlee War Cemetery après la guerre : le pilote Sqn/Ldr Humphrey William Albert Chesterman AFC, le Sgt Ernest Tolson (observateur), le Sgt Leslie Ellis (opérateur radio / mécanicien), le Sgt Bernard Stanley George Bugg (mitrailleur) et le Sgt Walter "Wally" Moore (observateur). Un monument aux aviateurs se trouve près du Keyartsmolen, Keyartstraat, Tongerlo.

Donald Ferguson et le navigateur Stanley Moore peuvent s'échapper et passeront en Espagne.

Donald Ferguson est trouvé par FIDDELAERS de Kinrooi, et ce dernier avertit Albert GIELEN du 38 Heppeneert à Maaseik, qui vient le chercher à vélo avec Pierre VAN DINTER de la Kerkstraat à Maaseik pour être conduit chez Mlle NYSSEN à Ophoven [La liste des helpers belges reprend une Marie NYSSENS, Albertlaan, à Maaseik…]. Jean MOBERS prévient Lucien COLLIN à Hasselt. Pierre VAN DINTER et son fils vont chercher Ferguson à Ophoven à vélo, le fils revenant à pied. Ferguson est ensuite conduit chez Jean MOBERS (dans son magasin) qui lui donne des vêtements civils et où Henri HUYSMANS (9 Kerkstraat, Maaseik) lui fournit une carte d'identité. Il doit être passé par le moulin à vent de Dilsen chez Maria "Gertrude" MOORS. [Jean MOBERS est repris à la liste des Helpers belges avec comme adresse 9 Majoor Aertsplein à Maaseik. Il y a une Kolonel Aertsplein dans cette localité. Arrêté par la suite, Jean MOBERS a été exécuté le 19 avril 1944 à Ludwigsburg (Pappenweiler) en même temps que Pierre VAN DINTER. Henry HUYSMANS, également arrêté et emprisonné, survivra au conflit. Tous trois se verront attribuer la Medal of Freedom, la plus haute récompense civile américaine.]


Le Moulin de Dilsen.

Une autre archive dit que le premier helper de Ferguson est Joseph BROUNS, Weg naar Bree à Kinrooi, qui lui donne quelques vieux vêtements et reçoit en échange sa trousse de survie. Le 11 avril au soir, on lui remet un message écrit signé "Bluebird". Le 12 au matin, il est conduit chez Titta BEMELMANS au 22 Groenstraat, Kloesheuvel à Tongerloo. Titta BEMELMANS porte le pseudo de "Bluebird" et est née à Ceylan (en août 1906) de parents planteurs britanniques. Ferguson y apprend que Stan Moore vient juste de partir. Il est interrogé sur son équipage et part avec Titta vers 08 heures dans une ferme voisine pour y passer la journée. Vers 19 heures, un homme vient le prendre dans une grosse maison campagnarde sise dans des bois à l'Ouest de Maaseik. Les propriétaires sont deux femmes âgées qui ne parlent que le flamand et le français. Un homme vient lui poser des questions techniques sur base d'un Form E. Vers 19 heures, cet homme revient et le prend à vélo jusque dans un magasin qu'il possède à Maaseik. Ce doit donc être Pierre VAN DINTER, 18 Kerkstraat à Maaseik.

Là, VAN DINTER remet Ferguson à une femme de Hasselt (Mme COLLIN) qui l'y emmène en train et prévient le réseau Marc par J. DEMEY. Ils arrivent vers 22 heures et demi et vont directement prendre des photos chez Henri COLARIS au 11 Diesterstraat à Hasselt. La femme (il s'agit de Clémentine LUCAS, épouse de Lucien COLLIN) le conduit alors chez elle, au 41 Rue du Démer / Demerstraat à Hasselt. Lucien COLLIN lui demande quelques détails au sujet de leur équipage et lui fait remplir et signer un Form E. Les archives du Groupe Hoornaert-Dirix mentionnent que le 13 avril 1943, l’épouse de Lucien COLLIN va chercher Ferguson chez MOBERS à Maaseik. [La liste des Helpers belges reprend Jean MOBERS avec comme adresse 9 Majoor Aertsplein à Maaseik. Il y a une Kolonel Aertsplein dans cette localité. Jean MOBERS et Pierre VAN DINTER sont arrêtés le 22 juin 1943 et envoyés en Allemagne où ils meurent exécutés le 19 avril 1944 à Ludwigsburg (Pappenweiler).]

Du 13 au 14 avril 43, Ferguson loge chez Lucien COLLIN. Selon le récit de Simone LAMQUIN, la seule survivante de l'équipe de Lambert SPANOGHE à Hasselt (qui sera arrêté le 10 juin 1943), Ferguson y fait les corrections voulues à la fiche de Stanley Moore. Il y remet un message de "l'oiseau bleu" (une demande d'émettre un message sur les ondes moyennes) et donne des détails sur son équipage : Moore, Ferguson, Tolson, Bugg, Wally Moore, Ellis, Chesterman. Le lendemain, Mme COLLIN demande à Lambert SPANOGHE ce qu’elle doit faire pour ce message de "l'oiseau bleu" (remis par l'agent de MOBERS à Ferguson pour qu'il l'emporte à Londres). SPANOGHE lui défend de l'emporter.

Le 14 avril 43 au matin, Ferguson est habillé de pied en cap et est guidé par Clémentine COLLIN-LUCAS de Hasselt chez Fernando RADELET à Bruxelles. Ils prennent le train de midi vers Louvain et ensuite le tram vicinal jusque Bruxelles. RADELET le prend en charge à un café (Le Cap Nord) devant la gare du Nord. Le 15 avril, Lucien COLLIN refuse de payer le logement de Ferguson à MOBERS car le paysan Joseph BROUNS avait reçu le paquetage de survie de Ferguson et ne lui avait donné en échange qu’un vêtement sans valeur.

Ferguson est alors logé du 14 au 29 avril chez Isabelle ANSPACH Vve PAULI au 30 Rue de Naples à Ixelles où il y retrouve Stanley Moore.

Chez Isabelle PAULI, ils reçoivent des vêtements supplémentaires. Fernando RADELET leur rend visite et leur explique qu'il a environ soixante évadés dans sa ligne.

Le 29 à 23h20, Fernando et une femme (Hortense WEETS, épouse de Charles DELLOYE) prennent Moore et Ferguson en charge jusqu'à la gare du Nord avec le Fl/Lt Wilfred Murphy, un "Sgt inconnu", qui est Archie Cowe et deux Polonais. Il s'agit de Marian Majewski (Offlag IIB) et Jan Zallas (Offlag VIIB), deux officiers d’artillerie, évadés d'Allemagne et aidés eux aussi, entre autres, par Lucien COLLIN.

Les 6 évadés et leurs guides montent à bord du train pour Paris et arrivent à la frontière à Quiévrain, entre Mons et Valenciennes. Tout le monde doit descendre et se faire interroger par un Allemand et des gendarmes (douaniers ?) belges et français. L'officier allemand pose parfois des questions et ne semble pas satisfait, mettant des personnes à l'écart. RADELET explique que ces personnes seront renvoyées en Belgique. Les deux Polonais sont mis à l'écart avec eux. Une fois le tri effectué, et pendant que l'Allemand s'adresse au groupe de mécontents, RADELET s'éclipse avec les quatre aviateurs, passe devant quelques gardes SS et remonte dans le train avec eux. Le train part à 2 heures. Hortense WEETS ramènera les deux Polonais à Bruxelles. Ils seront évacués plus tard et viendront témoigner à la libération en 1944.

Le train s'arrête à Valenciennes et la locomotive doit être réparée. Ils arrivent à Paris à 08 heures. Une femme et deux hommes les y attendent. Ils sortent séparément de la gare du Nord et se retrouvent à un café. RADELET les remet à "Monsieur Paul" (Frédéric DE JONGH).

Ils sont conduits chez Mlle Leslie de BIZIENS, alias "Marquise" au 16 Avenue du Colonel Bonnet à Paris XVIe. Son père est un amiral français. Elle leur dit plus tard qu'elle n'est pas du réseau de Frédéric DE JONGH. Elle fait effectivement partie de la ligne Chauny. Ils y restent jusqu'au 7 mai, mais prennent la majeure partie de leurs repas chez Henriettre BENECH au 7 Rue Alfred Bruneau, au coin de la rue. Murphy et le "Sgt inconnu" (Archie Cowe) sont emmenés dans une autre maison.

Le 7 mai, on conduit Ferguson et Moore chez Mme MEHUDIN née Marguerite MALPART au 41 Avenue Paul Doumer à Paris XVIe. Maurice MEHUDIN a environ 40 ans et possède une imprimerie. Son épouse fait "environ 26 ans" (née le 5 août 1907). Originaire de Calais, sa belle-sœur est une infirmière anglaise de la Croix-Rouge et habite à "Duniston" (ce doit être Derringstone), Canterbury : Mrs Goodache. Ils sont les premiers aviateurs qu'ils hébergent. [Maurice Georges MEHUDIN, né le 19 septembre 1904, sera arrêté par la suite et partira de Compiègne le 4 juin 1944 à bord du convoi à destination de Neuengamme en Allemagne. Il mourra le 9 juin 1944 à Oranienburg.]

Le 15 mai, DE JONGH leur remet leurs cartes d'identité, et 1.000 FF et 250 Pesetas à chacun des deux. Ce même jour, il les prend dans un parc près de l'université et leur présente un lieutenant de l'Armée de l'Air française appellé LABRETTE. En fait, son vrai nom est GEUGEN, son matricule est "537" et il se trouve à Gibraltar le 22 juin. Ils rencontrent aussi un autre Français "LEFORT" dont ils pensent que le vrai nom est DEGOUTTE.

Ce 15 mai, à 19h20, ils prennent un train pour Toulouse. Ils arrivent à Vierzon à 23 heures. Deux officiers allemands montent dans le train et des soldats procèdent à des fouilles. Leur ayant demandé leurs papiers et les ayant étudiés attentivement, un Allemand fait remarquer que leur adresse n'y est pas indiquée et qu'ils doivent aller en queue du train. Il conserve leurs cartes. Ferguson et Moore descendent du côté opposé au quai et remontent au bout du train, loin de la zone des fouilles. Environ une demi-heure plus tard, les haut-parleurs de la gare annoncent que "Robert Garray" (Ferguson) et "Jacques Maure" (Moore) doivent se présenter immédiatement au bureau allemand de contrôle. Ils ne bougent pas. L'appel est répété au bout de 15 minutes. Le guide leur dit qu'ils devraient quitter le train et n'y remonter que quand il redémarrera. Ils vont se cacher dans une cabane à outils le long de la voie. Le train ne part pas. Ils apprennent plus tard que les Allemands ont refouillé le train deux fois, jusqu'en dessous des banquettes. Au départ de la locomotive, ils se ruent (le cheminot les voit et ralentit sa machine) et remontent, puis vont s’asseoir dans leur compartiment sans aucun commentaire.

Le 16 à 08 heures, ils arrivent à Toulouse. Il n'y a pas de contrôle à la gare. Ils prennent un petit déjeuner au buffet pendant que leur guide achète des tickets pour Pau. A 10h20, ils grimpent dans ce train vers Pau. Le guide leur explique qu'il y aura un contrôle français qu'il faudra éviter, puisqu'ils n'ont plus de papiers. Vers 14 heures, des officiels descendent sur le quai à Tarbes. Ils arrivent à Pau vers 15 heures, où ils rencontrent un autre guide du réseau. Il avait arrangé d'aller avec eux jusque Oloron, mais il fallait changer d'idée suite à l'absence de papiers. Moore et Ferguson restent alors dans une auberge de Pau jusqu'au 18 mai.

A 15 heures, les deux guides français et nos deux évadés sont pris par un camion allemand de ravitaillement. Le chauffeur est un Espagnol et est accompagné par deux Allemands, dont un est à l'avant et l'autre à l'arrière avec eux. Le chauffeur leur explique qu'ils sont des connaissances qui ont demandé un lift jusque Oloron-Sainte-Marie. A l'approche du contrôle par la police française, ils sont inquiets mais passent sans s'arrêter. Ils arrivent à Oloron vers 16 heures et demi, vont boire un peu de vin avec le chauffeur et les deux soldats allemands, puis se rendent au rendez-vous dans un restaurant.

Un guide Espagnol (Basque ?) amputé d'un bras [probablement René DORLANNE alias "Pip, le manchot" de Rion-des-Landes] vient les prendre et les conduit chez lui. L'homme de Pau revient avec un autre guide et ils doivent acheter une paire d'espadrilles à semelle de cordes pour 130 FF. A 23 heures, ils se mettent en marche vers le Sud et traversent Sainte-Engrace, qui est à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest d'Oloron. Vers 9 heures, le guide les abandonne à 200 mètres de la frontière espagnole.

Loin d'être sûrs d'en être si proche, ils demandent à leurs compagnons français de s'adresser à la prochaine maison, mais ils répondent que c'est trop risqué. Moore va alors demander à une ferme et on lui répond qu'ils sont effectivement à 8 Km de l'Espagne. Ils reçoivent de la nourriture à une autre ferme. Les Français prennent peur et veulent retourner à Oloron, mais Moore et Ferguson disent qu'ils vont essayer la traversée de leur côté. Un autre fermier les nourrit et les autorise à dormir dans sa ferme.

Ce 19 mai à 23 heures, ce fermier leur dit qu'il connaît un passeur qui demande 25.000 FF. Comme ils n'ont que 3.000 FF et 1.000 Pesetas ... le guide accepte cette somme et la montre-bracelet de Moore. Il vient avec un camarade et Moore, Ferguson et leur guide partent à minuit. Moore avait cogné sa cheville et avait du mal à marcher. Le 20 vers 06 heures, ils passent en Espagne près du Pic de Lakhoura, passant vraisemblablement par les gorges d'Ujarre. Moore va dans une hutte et confirme qu'ils sont en Espagne. Pendant qu'ils se lavent, des Guardia Civile les arrêtent. Les Français traduisent et ils avouent être des aviateurs. A 16 heures, ils sont conduits à Isaba et enfermés dans une geôle bien sale. Le lendemain à 15 heures, on les conduit en bus à Pampelune, où ils refusent de répondre aux questions et exigent de voir le consul britannique de Madrid. Ils vont à la prison de Pampelune et apprennent plus tard que la Croix-Rouge américaine reçoit leur lettre adressée à l'ambassade de Madrid mais ne fait pas poursuivre.

Le 30 mai, l'attaché militaire américain, le colonel Stephens, apprend leur présence à Pampelune. Le consul britannique est prévenu via le consulat Uruguayen. Le Capitaine Coburn vient les voir le 2 juin. Le 5, ils sont relâchés et vont dans un hôtel à Betelu, où ils rencontrent Michael CRESWELL. Le 10, ils vont en voiture à Madrid et y arrivent le 11. Le 17, ils prennent le train pour Gibraltar.

Certains compagnons de détention à Pampelune, et qui avaient traversé avant la mi-mai 43, leur avaient transmis les informations suivantes : Il n'y a pas de contrôle sur l'express Paris-Bordeaux. Il y a moyen de passer sans difficultés en train de Dax à Bérenx, sur la ligne de Orthez. De là, il faut aller à Aïnhoa et prendre la route vers le poste frontière de Dancharia (Dantxaria). Juste avant Dancharia, une carrière de pierres se situe à l'Est de la route. En longeant un pic surmonté de trois croix et passant par des bois, on peut se diriger vers la rivière frontalière (le Lapitxuri). Des pierres permettent sa traversée. Sur l'autre rive, en Espagne, une ferme accepte d'aider les évadés. C'est la description de l'itinéraire vers Jauriko borda. A Aïnhoa, le seul mécanicien du village est Belge, et accepte de passer des fuyards en Espagne pour 3.000 FF par voyage. Le village de Urdax, en Espagne doit être évité, car fréquenté par des soldats allemands en congé.

Donald Ferguson quitte Gibraltar le 21 juin à bord d'un Dakota, en compagnie de son co-équipier Stanley Moore, de Wallace Lashbrook, Alfred Martin, Douglas Hoehn, ainsi que du Sgt Frank W. Pinkerton (Lancaster W4858 - SPG 1266) et du P/Off Donald G. Ross (SPG 1255 - de l'équipage de John Fitzgerald évacués vers l'Espagne par les lignes Dromas et Chauny/Bourgogne).

L'avion atterrit le 22 juin 1943 à Whitchurch et Ferguson et Moore sont tous deux interviewés le même jour par le MI-9.

Donald Ferguson est porté disparu le 24 novembre 1943 et est commémoré au Runnymede Memorial près de Windsor, Grande-Bretagne. Son nom figure également au Fort William War Memorial, High Street, à Fort William, en Ecosse :


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters